Québec n’élargira pas l’entente de régularisation des «anges gardiens»

À peine ouverte, sitôt refermée. Une semaine après que le premier ministre eut ouvert la porte à l’élargissement de l’entente sur la régularisation des « anges gardiens », la ministre de l’Immigration, Nadine Girault, a refusé d’envisager cette possibilité, causant une forte déception au sein de la Coalition pour la régularisation des statuts.
Lors d’une rencontre lundi dernier avec trois représentants de la Coalition, la ministre a laissé entendre qu’acquiescer à cette demande allait retarder l’entrée en vigueur imminente de l’entente entre les gouvernements fédéral et provincial pour octroyer la résidence permanente à certains demandeurs d’asile ayant travaillé dans les services essentiels lors de la première vague de la COVID-19. « Est-ce à dire que M. Legault recule ? Est-ce qu’il ne chante plus la même chanson ? On sait qu’on n’obtient pas toujours rapidement ce qu’on demande, mais il faut que l’autre partie soit disposée à discuter sérieusement et à faire des compromis », a dit l’ex-députée de Québec solidaire Françoise David, qui a fait partie du comité qui a rencontré la ministre de l’Immigration. « C’est évident que ni la Coalition ni moi on va se contenter de cette réponse. C’est irrecevable. »
La Coalition pour la régularisation des statuts plaide pour que non seulement les demandeurs d’asile ayant travaillé dans le domaine de la santé en soins directs avec les patients puissent obtenir leur résidence permanente, mais aussi tous ceux occupant un poste répondant à la définition de travail essentiel du gouvernement (préposés à l’entretien, gardiens de sécurité, etc.). « Pourquoi la préposée aux bénéficiaires mais pas la préposée à l’entretien ménager du même hôpital ? C’est absurde, elles ont toutes deux pris des risques et on en a terriblement besoin », a affirmé Mme David.
Il y a dix jours, répondant à une question de la co-porte-parole de Québec solidaire Manon Massé, François Legault avait déclaré publiquement qu’il allait mandater Mme Girault afin qu’elle « regarde la possibilité d’élargir » le programme. Mais cet espoir s’est rapidement éteint. « [La ministre] aurait pu nous dire qu’il était impossible de s’engager tout de suite, mais qu’on allait s’en reparler dans une deuxième étape en janvier. Ç’aurait été comme un baume », a déclaré le directeur de la Table de concertation des organismes au service des réfugiés et des immigrants (TCRI), Stephan Reichhold, qui était aussi présent à la rencontre de lundi avec la ministre. « On est sortis déçus. »
Ottawa prêt à discuter
M. Reichhold déplore d’autant plus cette fermeture de Québec que le gouvernement fédéral, lui, se dit très ouvert à l’élargissement. Le ministre fédéral de l’Immigration, Marco Mendicino, avait écrit à plusieurs reprises sur Twitter pour se réjouir que le gouvernement Legault fasse « preuve d’ouverture dans le dossier des anges gardiens et [soit] prêt à revoir les critères afin d’élargir le programme […] tel que nous le proposions dès le début de nos discussions ». Contacté par Le Devoir, l’attaché de presse du ministre, Alexander Cohen, se dit toujours prêt à discuter d’une « phase 2 » avec Québec.
La Coalition pour la régularisation des statuts, qui regroupe une quinzaine d’organismes, organise samedi, devant les bureaux du premier ministre à Montréal, un rassemblement en solidarité pour la cause. Des personnalités influentes, telles que Louise Arbour, ex-juge à la Cour suprême ayant aussi occupé les fonctions de haute-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, et Rachida Azdouz, psychologue et spécialiste des relations interculturelles, prendront la parole en appui à la cause.