Le Québec accueillera beaucoup moins d’immigrants que prévu cette année

COVID-19 oblige, le Québec n’accueillera cette année que 60 % à 70 % des immigrants prévus pour l’année 2020, selon le Plan d’immigration du Québec 2021 qui a été déposé jeudi. Il entend reporter sur les deux prochaines années toutes les admissions non réalisées en 2020.
En effet, sur un objectif de 44 500 immigrants cette année, le gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) se retrouve à en admettre entre 13 000 et 18 000 de moins. De ce déficit, au moins 7000 admissions, qui n’auront pas pu être réalisées en 2020, seront reportées l’an prochain et s’ajouteront aux quelque 47 500 dossiers d’immigrants que Québec va traiter. « Un rattrapage plus important pourrait être prévu en 2022 », précise-t-on.
Toujours selon le Plan d’immigration, plus de la moitié des 7000 dossiers qui feront partie du rattrapage en 2021 sont ceux de personnes dans la catégorie « immigration économique », surtout des travailleurs qualifiés. Selon la ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI), Nadine Girault, les personnes visées sont déjà sur le territoire du Québec.
Le nombre de Certificats de sélection du Québec (CSQ), étape préalable aux futurs Québécois qui veulent demander la résidence permanente au gouvernement fédéral, a légèrement dépassé les prévisions : 25 300 CSQ ont été délivrés alors qu’on prévoyait d’en octroyer un maximum de 24 700. Enfin, 59 % des immigrants qui auront été admis en 2020 seraient des locuteurs francophones et 56 % ont été accueillis dans la catégorie « immigration économique ».
Compte tenu des grands besoins de main-d’œuvre du Québec, le maintien des cibles — et le rattrapage sur deux ans — est une décision pragmatique, estime l’Institut du Québec (IDQ). « Le signal envoyé est positif dans le sens que l’esprit derrière la chose est qu’on a besoin d’immigrants. Mais en même temps, il y a des contraintes et des incertitudes et elle est reflétée par le fait que [le gouvernement] laisse la porte ouverte à ce que ça soit fait sur deux ans », a soutenu Mia Homsy, présidente-directrice générale de l’IDQ. Selon elle, certains ministres de la Coalition avenir Québec sont très au fait des défis liés à la pénurie de main-d’œuvre et il serait « contre-intuitif » de penser à une relance économique sans l’immigration.
L’opposition critique
Pour le député libéral et porte-parole de l’opposition en matière d’immigration, Gaétan Barrette, cette baisse des admissions, en raison de la COVID-19, fait bien l’affaire de la CAQ, qui a voulu réduire les seuils d’immigration. « Ils nous disent en gros que la cause du recul est la COVID, que ce n’est pas de [leur] faute et nous présentent le plan de rattrapage pour arriver aux objectifs fixés. Moi je trouve que [ces seuils] n’étaient pas une bonne idée, mais je n’ai pas le choix de laisser la chance au coureur », a-t-il dit.
Le député de Québec solidaire, Andrés Fontecilla, estime pour sa part que le gouvernement aurait justement pu faire, dans ce contexte extraordinaire, un effort supplémentaire. S’il n’est pas possible d’admettre entre 13 000 et 15 000 immigrants en raison de la COVID-19 et des restrictions de voyage et des activités de la fermeture de certains centres de traitement fédéraux à l’étranger, pourquoi ne pas avoir traité les dossiers de personnes — en situation irrégulière ou pas — se trouvant déjà sur le territoire ?
« On aurait pu utiliser des cas d’exception pour admettre un très grand nombre de personnes qui sont déjà ici. C’est bien de se préoccuper d’atteindre les cibles, mais il ne faut pas oublier que beaucoup de gens sont déjà au Québec et qu’ils travaillent. Je pense aux travailleurs temporaires et aux demandeurs d’asile. On aurait pu légaliser un grand nombre de ces cas-là. »
Dès l’an prochain, le gouvernement de François Legault prévoit d’accueillir légèrement plus d’immigrants, soit entre 44 500 et 47 500, dont 62 % seraient issus de la catégorie « immigration économique ». À terme, d’ici 2022, l’objectif est d’en admettre entre 49 500 et 52 500 au total, dont 65 % seraient issus de la même catégorie « économique », qui comprend notamment des travailleurs qualifiés et des gens d’affaires.