Apprendre d’hier pour construire le Québec de demain

Catherine Martellini Collaboration spéciale
Vue de l’île Sainte-Hélène, qui a été agrandie pour Expo 67.
Photo: Archives La Presse canadienne Vue de l’île Sainte-Hélène, qui a été agrandie pour Expo 67.

Ce texte fait partie du cahier spécial Génie québécois

D’Expo 67 au bras canadien de la navette spatiale de la NASA, les ingénieurs québécois ont joué un rôle clé dans les événements qui ont bâti le Québec d’aujourd’hui. Revue de quatre jalons marquants qui ont jeté les bases pour l’avenir.

L’hydroélectricité

Au fil de la construction des barrages, les ingénieurs d’ici ont développé une expertise unique qui est utilisée partout dans le monde.

« La généralisation de l’hydroélectricité a permis au Québec d’obtenir une feuille de route plus verte que sur d’autres territoires dans le monde », souligne Louise Millette, directrice du Département des génies civil, géologique et des mines de Polytechnique et responsable du Bureau de développement durable.

Photo: Archives Gouvernement du Québec L'évacuateur de crues de la centrale LG-3, à la Baie-James

En citant l’exemple du barrage de la Baie-James, celle-ci poursuit : « Imaginez donc qu’un ingénieur s’est bien assis un jour et a pensé à inonder la moitié du territoire de la Jamésie pour produire de l’électricité. Ça représente plus de 10 % du Québec ! Et c’est quand même quatre fois la superficie de la Suisse… »

L’île d’Expo 67

Véritable prouesse d’ingénierie, Expo 67 s’est tenue au beau milieu du fleuve Saint-Laurent. « Pour y arriver, on a fabriqué des îles dans le fleuve, en grande partie avec les déblais des tunnels creusés pour construire le métro », explique-t-elle.

Onze mois plus tard, l’équivalent de treize stades olympiques de mètres cubes de roc avait permis de créer artificiellement l’île Notre-Dame.

Rien n’était trop beau pour cet événement, à un point tel qu’on a aussi eu la mauvaise idée de chasser les mannes qui nuiraient aux touristes l’été en déversant un produit chimique, le DTT, dans l’eau. « Cela a eu pour effet de détruire le bar rayé, qui s’est heureusement rétabli par la suite, déplore-t-elle. La compréhension du rôle des ingénieurs a évolué au fil des années, et à cette époque, on a agi un peu comme des apprentis sorciers. »

En effet, il a fallu attendre le tournant des années 1970, et l’adoption de la Loi sur la qualité de l’environnement, pour que leur travail soit envisagé de façon pluridisciplinaire. Ce sont, par exemple, durant ces années que le cours Génie sanitaire a changé de nom pour Génie de l’environnement à Polytechnique.

« Les ingénieurs civils s’étaient jusqu’alors chargés de fournir de l’eau potable à la population et d’éliminer les nuisances, mais on a ensuite compris qu’il fallait avoir une vision beaucoup plus élargie de l’environnement, en incluant d’autres champs à la pratique pour le voir dans son ensemble », explique-t-elle.

Le CSeries

 

En 2004, Bombardier annonçait la création du CSeries, un avion qui avait pour aspiration de concurrencer les grands comme Boeing et Airbus.

« C’est le seul avion dans les 25 dernières années qui fut conçu à partir de zéro, précise Augustin Brais, directeur des partenariats et de l’infrastructure de recherche à Polytechnique. Il comprend toutes les plus récentes technologies. »

En comparaison, le Boeing 737 Max ou le A320neo sont des modèles « réchauffés », selon lui, c’est-à-dire qu’ils utilisent des morceaux qui ont déjà fait l’objet d’une certification. La certification des systèmes et des sous-systèmes pour répondre aux normes de tous les pays coûte en effet extrêmement cher. Le CSeries n’y a pas échappé. Le fait qu’il ait dû être certifié à partir de zéro explique, en partie, pourquoi il n’a pas volé avant 2013.

« Au-delà de Bombardier, de l’innovation de cet avion a découlé une série d’autres succès d’ici, notamment du côté des fournisseurs ou de la chaîne d’approvisionnement. C’est le cas du moteur qui a été commandé à Pratt & Whitney dans le cadre de ce projet et qui a permis à cette dernière de fournir ce type de moteur à d’autres constructeurs. Ce sont aussi les trains d’atterrissage conçus à Longueuil, ou encore la firme de formation CAE, devenue la championne des simulateurs offerts aux pilotes », illustre-t-il.

De plus, plusieurs technologies qui proviennent de l’aviation ont été appliquées à d’autres domaines, comme celui des drones, des éoliennes et des voitures autonomes.

Le bras canadien

 

Créée dans les années 1960, la division montréalaise de MDA, anciennement appelée SPAR Aérospatiale, est devenue la grande spécialiste des satellites de communication et de leurs composantes.

« SPAR a grandement contribué à des projets phares, comme le bras canadien et ses différentes déclinaisons, mais aussi les satellites Alouette et Anik », soutient Augustin Brais.

Si, au départ, le bras était rattaché à la navette spatiale américaine, il est devenu ensuite une entité indépendante accrochée à la station spatiale elle-même, avec des centres de commandes et des simulateurs d’utilisation du bras canadien conçus par CAE.

« On compte à Montréal sur des laboratoires de test uniques en Amérique pour les composantes de satellites », ajoute-t-il.

Un avenir tourné vers les autres

 

L’avenir du génie québécois reposera sur la collaboration. Le Partenariat entre Polytechnique et l’hôpital Sainte-Justine révèle par exemple toute l’importance qu’il y a à réfléchir à certains problèmes à plusieurs têtes. Depuis 35 ans, une trentaine d’étudiants en ingénierie travaillent au centre de recherche Sainte-Justine, de concert avec des médecins. Et cela a permis d’améliorer autant les traitements aux patients que les outils utilisés par les médecins.

« Si le génie suit la tendance actuelle et qu’il évolue de telle sorte que les entreprises et institutions universitaires collaborent plus, tout le monde y gagnera », conclut Augustin Brais.

Ce contenu spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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