Six autres bonnes initiatives en période de pandémie

Marie-Annick Beliveau, musicienne, au parc La Fontaine. L'organisme SAMS a tourné de courtes capsules vidéo de petits spectacles improvisés, accessibles en ligne gratuitement.
Photo: Valérian Mazataud Le Devoir Marie-Annick Beliveau, musicienne, au parc La Fontaine. L'organisme SAMS a tourné de courtes capsules vidéo de petits spectacles improvisés, accessibles en ligne gratuitement.

1. Concerts

Le baume de la musique

 

« J’écoute de la musique pour me rendre plus joyeux », a lancé à plus d’une reprise en point de presse le Dr Horacio Arruda. Gageons que cette proposition du directeur national de la santé publique a plu à la Société pour les arts en milieux de santé (SAMS).

En temps normal, cet organisme offre des concerts de musiciens professionnels dans des établissements de santé de la province, surtout dans des CHSLD et des résidences pour aînés. Le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) est aussi l’un de ses partenaires. « On a arrêté nos activités le 12 mars, mais, très rapidement, on s’est dit qu’il fallait trouver un moyen de rejoindre [les patients et les résidents] quand même », a expliqué la directrice générale de la SAMS, Françoise Henri.

L’organisme a donc tourné de courtes capsules vidéo, accessibles en ligne gratuitement. Mais pour aller à la rencontre virtuelle de tout le monde, il a dû faire preuve de créativité. « On s’est rendu compte que, dans les CHSLD, beaucoup n’ont pas le wifi. On a consulté les récréologues pour trouver des solutions », a ajouté Mme Henri, soulignant par la même occasion « le travail essentiel » de ces professionnels « trop souvent oubliés » pendant cette pandémie. Des capsules ont par exemple été diffusées sur des télévisions.

Ces petits spectacles improvisés ont été tournés à la maison ou en pleine nature, en solo, en duo ou en trio — « c’était avant les mesures de distanciation sociale », a précisé Mme Henri. Le répertoire couvre un large spectre : du jazz à l’opéra, en passant par la musique classique et les chansons plus populaires. La SAMS entend doubler dans les prochains jours le nombre de capsules proposées.

Guillaume Lepage

 

2. Arts visuels

On regarde avec les oreilles

 

L’exposition Frida Kahlo, Diego Rivera et le modernisme mexicain battait son plein au Musée national des beaux-arts du Québec avant que la province soit plongée dans la crise du coronavirus. Loin de se laisser abattre, l’institution a eu l’idée de diffuser son audioguide en ligne pour ceux et celles qui n’avaient pas eu la chance de déambuler entre les œuvres réunies au pavillon Pierre Lassonde avant d’être confinés à la maison. La narration de cet audioguide, accessible gratuitement depuis le site du musée, est assurée par les comédiens Tobie Pelletier et Ariane Bélanger.

L’exposition, qui se tenait normalement du 13 février au 18 mai, fait la part belle aux portraits de la mythique Frida Kahlo — sans doute aujourd’hui la plus vénérée peintre mexicaine —, bien qu’elle n’en soit pas l’objet principal. C’est plutôt le couple qu’elle formait avec le peintre mexicain tout aussi respecté Diego Rivera qui marque le parcours, désormais auditif (!).

« Les deux sont importants, même si aujourd’hui la fortune critique de Frida Kahlo a dépassé celle de son mari. On raconte l’histoire d’un couple, et on met Frida au cœur des salles », résumait en février au Devoir, lors de la visite de la presse, le commissaire et conservateur au MNBAQ, André Gilbert. Les œuvres sont tirées de la collection Jacques et Natasha Gelman, un couple de mécènes ayant amassé à partir des années 1940 des œuvres reflétant ce que le MNBAQ qualifie de « période extraordinairement féconde de l’art mexicain ».

Guillaume Lepage
 

3. Archives

Revivre des spectacles du passé

 

Radiohead a trouvé une solution pour rejoindre ses admirateurs confinés à la maison. Le mythique groupe britannique s’est engagé à diffuser sur sa chaîne YouTube, chaque jeudi, l’un de ses anciens spectacles captés en direct sur caméra. Un concert par semaine, donc, jusqu’à la fin de la pandémie. Ou du moins, « jusqu’à ce que les restrictions résultant de la situation actuelle soient assouplies ou que nous manquions de spectacles. Qu’est-ce qui arrivera en premier ? Personne ne le sait », a écrit la bande de Tom Yorke sur sa page Facebook.

Pour les intéressés, sachez que l’exercice a déjà débuté : la semaine dernière, les internautes ont eu droit à la projection complète de Live From a Tent in Dublin, un spectacle survolté qui a eu lieu en octobre 2000, en Irlande. Pouvons-nous nous attendre à (re)voir l’un des concerts du groupe donnés au Québec ? La question reste entière. Leur dernier passage remonte à juillet 2018, sur la scène du Centre Bell à Montréal.

Ce n’est pas la première fois que Radiohead se sert d’Internet pour propager sa musique — très souvent gratuitement. À l’approche de Noël, il a téléversé la totalité de sa discographie sur sa chaîne YouTube en décembre dernier.

Guillaume Lepage
 

4. Banques alimentaires

Nourrir le Québec à la table des chefs

La Tablée des chefs compte produire 1,6 million de repas afin de garnir les réserves des banques alimentaires du Québec. Au départ, l’organisme entendait en livrer environ 800 000, mais devant la popularité qu’a rencontrée son initiative Cuisines solidaires, lancée en collaboration avec l’Association Restauration Québec, l’objectif a finalement doublé dans les derniers jours.

Une centaine de chefs se sont proposés pour aider l’équipe de La Tablée des chefs, dirigée par Jean-François Archambault. On compte parmi eux Ricardo Larrivée, Jérôme Ferrer et Stefano Faita. Des chaînes de restauration telles que Saint-Hubert et Normandin se sont aussi jointes au projet. Pour chaque portion de repas préparé, un dollar leur sera versé afin de payer le personnel impliqué.

Les repas seront préparés dans les cuisines de l’hôtel Reine Elizabeth, à Montréal, et du Château Frontenac, à Québec. Ivanhoé Cambridge, une filiale immobilière de la Caisse de dépôt propriétaire des deux établissements, s’est en effet engagée à prêter ses installations.

L’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ) a lui aussi décidé de prêter main-forte aux gens de La Tablée des chefs. La maison d’enseignement de la rue Saint-Denis compte produire 36 000 repas destinés au réseau des banques alimentaires du Québec. Pour ce faire, l’ITHQ a fait appel à des cuisiniers de son restaurant, à des employés de sa cafétéria et à une partie de ses professeurs de cuisine.

Guillaume Lepage
 

5. Alimentation

Cantine pour tous… les itinérants

Puisque le mot d’ordre est de rester chez soi et que les écoles et centres de la petite enfance ont fermé leurs portes, La Cantine pour tous a décidé d’adapter son offre et de venir en aide aux personnes en situation d’itinérance à Montréal. Le réseau, qui rassemble plusieurs organisations et entreprises cuisinant des repas sains et abordables, organise désormais la production de 1500 repas par jour pour 4 centres de jour dans les quartiers Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, Ville-Marie et Plateau-Mont-Royal et les cantines mobiles nouvellement mises en place.

« On voyait des besoins énormes qui jaillissaient de toutes parts pour offrir des services alimentaires, alors que la plupart de nos organisations ont dû interrompre ou ralentir leurs activités. On a la capacité de production, alors pourquoi ne pas la mettre au profit des populations dans le besoin ? », explique Thibaud Liné, directeur général de La Cantine pour tous.

Il explique que c’est la Ville de Montréal qui a d’abord lancé l’idée en mettant progressivement en place les centres d’hébergement d’urgence pour itinérants dans les deux dernières semaines.

L’initiative est financée à hauteur de 180 000 $ grâce au fonds d’urgence pour la crise de la COVID-19 mis sur pied par Centraide du Grand Montréal. Le contrat est valable pour un mois pour le moment, mais pourrait être renouvelé si la crise se prolonge, note M. Liné. « On ne souhaite pas qu’elle soit prolongée, mais si c’est le cas, on sera toujours présents pour aider. »

Annabelle Caillou
 

6. Matériel

Les tatoueurs à la rescousse

Les tatoueurs de la province ont dû ranger leurs aiguilles et fermer boutique en raison de la pandémie de coronavirus. Mais au lieu de laisser leur matériel de protection prendre la poussière dans le placard, certains ont décidé d’en faire don au milieu de la santé. Un geste de solidarité plus que bienvenu à l’heure où les masques, les gants et le gel désinfectant sont devenus rares sur le marché.

Parmi ces bons samaritains : Claude, cofondateur et gestionnaire du Chalet tattoo shop privé, situé au centre-ville de Montréal. Il a pour sa part voulu aider des organismes jugés moins prioritaires, mais qui ont tout autant besoin de matériel de protection. « Les dons [sont allés] à des organismes tels que des refuges d’urgence pour femmes victimes de violence conjugales ou des habitations sociales pour personnes à faibles revenus, car les travailleuses et travailleurs de ces organismes se retrouvent aussi au front sans qu’on y pense », explique-t-il.

Avec ses cinq collègues — mis à pied depuis le 14 mars —, il a réussi à amasser au total 1200 gants. Ils ont aussi offert à du personnel de la santé du matériel et des liquides de stérilisation médicale pour leur permettre de nettoyer « leur environnement à leur retour à la maison afin d’éviter de contaminer leurs proches ».

Annabelle Caillou
 



Ce texte a été modifié après publication.

 

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