Trois ans plus tard, Québec se souvient de l’attentat à la mosquée

C’est dans une église mercredi soir que des membres de la communauté musulmane ont souligné le triste anniversaire de l’attentat à la Grande Mosquée de Québec qui, il y a trois ans, avait fait six morts.
Le comité organisateur de l’événement avait invité les proches des victimes comme le grand public à un souper communautaire à l’église Saint-Mathieu de Sainte-Foy.
Malgré la tristesse de l’occasion, la soirée s’est déroulée dans une atmosphère presque joyeuse nourrie par la présence de nombreux enfants.
Mais les premiers rires adultes ont été l’oeuvre de l’abbé de la paroisse associé à l’église. « En passant, c’est beau de voir une église pleine », a lancé l’abbé Bernard Duquette au début de la soirée, un sourire en coin.
L’événement était organisé par un comité citoyen, le même qui s’est constitué spontanément au lendemain de la tragédie pour organiser une veillée aux chandelles à côté de la mosquée.
La formule du repas autour de grandes tables rondes avait été pensée pour favoriser des liens entre musulmans et non-musulmans.
Le choix d’une église
Le comité a décidé de tenir l’événement dans une église parce que l’espace convenait bien, mais aussi pour souligner les rapprochements entre différents groupes religieux de Québec depuis trois ans, a expliqué l’un des organisateurs, Sébastien Bouchard.
En plus des catholiques et musulmans, des chefs religieux juif et anglican étaient présents. L’imam de la Grande Mosquée a également chanté des versets du Coran avant la tenue du repas — un couscous — servi en buffet.
Plusieurs veuves, orphelins et survivants de la tragédie ont participé à la soirée. « C’est pour vous autres qu’on est ici ce soir », a déclaré dans un discours le premier ministre François Legault. « Je tenais à être ici pour envoyer un message au nom de tout le peuple québécois, vous dire qu’on est à vos côtés. » Plutôt que de parler d’islamophobie comme la plupart des porte-parole de l’événement, le premier ministre a dénoncé « la haine » et souligné que cette haine ne représentait pas le Québec, mais un individu.
Dans son allocution, le président de la mosquée, Boufeldja Benabdallah, a souligné que « le chemin est long pour rétablir la concorde avec le peuple québécois ». Il a aussi dénoncé le fait qu’après 51 ans passés au Québec, on le considère encore comme un « immigrant ».
Plusieurs personnalités publiques s’étaient déplacées pour l’occasion. En plus du premier ministre, le maire Régis Labeaume et le chef huron-wendat Konrad Sioui étaient présents, ainsi que le chef néodémocrate Jagmeet Singh et de nombreux députés. La fondatrice du groupe PolySeSouvient Heidi Rathjen y assistait aussi.
Dans une autre allocution marquante de la soirée, le rappeur Webster a enjoint aux gens et aux médias de reconnaître le caractère « politique » de l’événement. « Est-ce qu’on va laisser l’ignorance dicter qui nous sommes ? Les marchands de haine, à quoi doivent ressembler nos sociétés ? »
Du soutien venu d’ailleurs
Plus tôt en journée, le comité organisateur et des représentants de la Grande Mosquée avaient convoqué les médias à une conférence de presse.
Parmi les participants se trouvait Dave Fortier, de l’organisme One World Strong. Rescapé lui-même de l’attaque terroriste au marathon de Boston en 2013, M. Fortier est entré en contact avec la direction du CCIQ après le drame.
Ces trois dernières années, les survivants de la tuerie au Centre culturel islamique de Québec (CCIQ) ont trouvé beaucoup de réconfort auprès des victimes d’autres actes terroristes commis dans le monde.
En 2018, Ahmed Cheddadi et d’autres témoins de la tuerie à la mosquée se sont notamment rendus à Pittsburgh, où un tueur avait ouvert le feu dans une synagogue, tuant 11 personnes.