SNC-Lavalin: Sami Bebawi aurait tenté d’acheter le silence de Riadh Ben Aïssa

L'ancien haut dirigeant de SNC-Lavalin, Sami Bebawi
Photo: Paul Chiasson La Presse canadienne L'ancien haut dirigeant de SNC-Lavalin, Sami Bebawi

L’ancien haut dirigeant de SNC-Lavalin Sami Bebawi aurait offert 10 millions de dollars à son subalterne en échange d’un témoignage favorable le protégeant des autorités.

« On m’a offert 10 millions de dollars en échange de la reprise de la version de Sami Bebawi », a soutenu Riadh Ben Aïssa, qui témoignait mardi au procès de son ancien supérieur.

L’offre aurait été présentée par l’entremise d’un des avocats de M. Bebawi, Me Constantine Kyres, à la suite de l’arrestation de M. Ben Aïssa en Suisse, en 2012.

« Je l’ai refusée », a indiqué M. Ben Aïssa, qui a ensuite expliqué qu’il avait commencé à collaborer avec la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

Le témoin vedette a raconté au jury qu’il a été arrêté en Suisse en avril 2012. Il y a été accusé de corruption d’agent étranger en lien avec la Libye et Saadi Kadhafi, un des fils du dictateur Mouammar Kadhafi, ainsi que de blanchiment d’argent.

M. Ben Aïssa a également rapporté une des dernières conversations téléphoniques qu’il a eues avec Sami Bebawi, quelque temps avant son arrestation.

« Un des derniers [appels] m’a frappé […] il était tout en panique. Il menaçait de se suicider. […] J’étais très surpris, mais j’ai compris par la suite, quand je me suis fait arrêter, que peut-être Sami Bebawi avait d’autres informations que je n’avais pas », a-t-il soutenu.

Protéger SNC-Lavalin

 

Sami Bebawi fait face à huit chefs d’accusation de fraude, de recyclage de produits de la criminalité, de possession de biens volés et de corruption d’un agent public étranger. M. Bebawi a plaidé non coupable à toutes les accusations.

Selon M. Ben Aïssa, M. Bebawi s’inquiétait à propos des deux sociétés-écrans suisses utilisées pour déposer l’argent des pots-de-vin, Duvel et Dinova. Or, a-t-il expliqué, à la suite de l’éclatement de la guerre en Libye en 2011, il s’était déjà assuré de « fermer les dossiers de Duvel et Dinova ».

Il a indiqué aux jurés que le nouveau chef de la direction, Pierre Duhaime, lui avait demandé que la firme soit « protégée ».

« Il m’avait dit de mettre des murs de Chine entre ce qui se passe à Genève [en Suisse, avec Duvel et Dinova] et la compagnie, qu’il n’y ait pas de rapports entre Saadi Kadhafi et SNC-Lavalin. C’était venu de Pierre Duhaime », a-t-il précisé.

Après son arrestation, M. Ben Aïssa a été détenu 30 mois en Suisse, jusqu’à la signature d’une entente de culpabilité. Il a par la suite été extradé au Canada, où il a commencé à collaborer avec les autorités.

« C’était un accord pour que la GRC puisse utiliser les déclarations que j’ai faites en Suisse et me faire témoigner si c’est nécessaire », a-t-il indiqué.

M. Ben Aïssa est également revenu sur l’achat d’un yacht de 25 millions à Saadi Kadhafi, fils de l’ancien dictateur libyen Mouammar Kadhafi. Il a signalé avoir été convoqué par la haute direction de SNC-Lavalin à Montréal afin de régler les modalités de paiement du luxueux bateau.

En après-midi, la défense a débuté le contre-interrogatoire de M. Ben Aïssa qui se poursuivra mercredi au palais de justice de Montréal. Jusqu’à présent, la défense a notamment mis M. Ben Aïssa face aux premières déclarations qu’il a faites lorsqu’il avait été arrêté et détenu en Suisse.

À voir en vidéo