Apprendre à écouter quatre générations

Ce texte fait partie du cahier spécial Leadership
La population active canadienne n’a jamais été aussi diversifiée. En plus de compter des gens d’origine, de religion et de sexe différents au sein de leurs équipes, la plupart des organisations emploient maintenant des travailleurs appartenant à trois générations, et bientôt quatre. Des générations aux objectifs, aux besoins, aux atouts et aux attentes très différents.
Le début des années 2020 sera marqué par l’arrivée sur le marché du travail des premiers individus de la génération Z, à savoir ceux qui sont nés à partir du tournant des années 2000. Or, si les baby-boomers partent de plus en plus à la retraite, les plus jeunes d’entre eux n’ont que 55 ans et ils sont donc encore nombreux au sein de l’entreprise. Les plus vieux sont même parfois amenés à y retourner, soit pour des raisons financières, soit parce que, pénurie de main-d’œuvre oblige, ils sont courtisés. Entre les deux, les générations X (39-54 ans) et Y (21-39 ans) composent le gros des troupes.
« C’est un véritable défi pour le gestionnaire parce que ces quatre générations sont très, très différentes dans leur rapport au travail, affirme Carol Allain, conférencier et formateur en entreprise. Les boomers ont grandi dans un monde vertical prônant la rigueur, l’autorité et le devoir, alors que les nouvelles générations évoluent dans un monde horizontal axé sur la mobilité, la flexibilité et l’instantanéité, accentuées par la mondialisation et l’omniprésence du numérique. »
Leadership de proximité
Les gestionnaires font surtout partie des générations boomers et X. Et ils doivent apprendre à écouter la jeunesse, au risque qu’elle décide de quitter le navire. La pénurie de main-d’œuvre fait en effet en sorte que les employés ont l’avantage. Les dirigeants et gestionnaires doivent faire en sorte qu’ils s’épanouissent.
« Ils doivent se concentrer sur lacréation d’un environnement de travail dans lequel chaque groupe se sent valorisé et motivé pour faire de son mieux, précise M. Allain. S’efforcer de prendre davantage conscience des défis auxquels chaque groupe est confronté, tout en ne perdant pas de vue que chaque employé est un individu, et non une statistique. Les gestionnaires doivent donc développer un leadership de proximité. »
Pour amener leurs équipes à donner le meilleur d’elles-mêmes, les gestionnaires de proximité doivent ainsi se rapprocher d’elles, en s’accordant notamment régulièrement du temps de partage et de rétroaction. Ils doivent aussi disposer d’habilités de communication et d’analyse, ainsi qu’une bonne connaissance du terrain pour asseoir leur crédibilité.
« C’est beaucoup moins facile qu’avant d’être un bon gestionnaire, admet Carol Allain. Les boomers, ils faisaient ce qu’on leur disait sans contester. Les plus jeunes, il faut passer du temps à les convaincre du bien-fondé d’une demande et il faut même qu’ils participent à l’élaboration de la stratégie. Ils sont guidés par l’émotion, ils doivent être séduits. Mais en même temps, le gestionnaire a toujours des objectifs à atteindre, et ça, il ne peut pas s’y soustraire. »
Créer des synergies
M.Allain prend l’exemple d’une directrice d’école, qui a dans son établissement, des élèves issus de la génération Z et même alpha, ceux qui sont nés après 2010. Elle a des enseignants et du personnel à la fois boomers, X et Y, et des parents X et Y.
« Et tout le monde veut se faire entendre, ajoute-t-il. Aujourd’hui, les gestionnaires passent leur temps dans des rencontres informelles quand, dans le temps, on rencontrait ses employés une fois par an, tout comme les parents, dans le cas de l’école. »
Il est donc primordial de créer des synergies entre tous les employés afin de les retenir. Carol Allain souligne que 40 % des Y qui sont en poste sont en même temps à la recherche d’un autre emploi. Pour qu’ils décident de rester,sans que les autres générations se sentent trop bousculées, le conférencier conseille de favoriser un environnement où règne une communication ouverte et honnête, et une culture qui semontre tolérante à l'égard des différences. Il insiste également sur l'importance du mentorat.
« Mais il faut aussi que les attentes soient claires pour tout le monde, poursuit-il. C’est très bien le leadership horizontal, mais il doit tout de même rester unecertaine verticalité. La vérité se trouve quelque part entre ces deux styles de leadership. »
Mais où exactement? Il n’y a pas de réponse magique, répond M. Allain.
« Autrefois, le plus important dans une organisation, c’était le client, conclut-il. Aujourd’hui, ce sont les employés et les partenaires. Et quand on sait que les plus jeunes travailleurs sont capables de quitter leur poste en une heure, ça oblige forcément les gestionnaires à marcher sur des œufs. »
Quatre générations au travail
Chaque individu est unique… mais parce qu’ils sont rapprochés en âge, qu’ils ont vécu à la même époque historique et qu’ils partagent un certain nombre de pratiques et de représentations, les membres d’une même génération ont bien souvent des caractéristiques communes, qui se répercutent dans le travail.
• Les baby-boomers possèdent en général une éthique du travail marquée. Ils sont loyaux, ne contestent pas les directives et ont le goût de la performance. Ils ont travaillé de longues heures des années durant et ont ainsi accumulé une culture et des connaissances vitales pour l’entreprise.
• Moins nombreux que leurs aînés, les X ont eu du mal à se faire une place sur le marché du travail et ont subi de plein fouet le fort taux de chômage. Ils ont de fortes revendications en matière de qualité de vie, et la conciliation travail-famille est l’une de leurs grandes préoccupations. Ils font preuve d’une bonne capacité à apprendre rapidement et à gérer efficacement leur temps.
• Les Y sont nés avec une souris dans la main et ils maîtrisent très bien les outils numériques. L’entreprise peut donc se servir de leur facilité à s’adapter aux technologies les plus récentes. Revers de la médaille, ils ont le goût de gérer leur horaire de travail et sa durée, et ils sont des adeptes de la flexibilité, de la mobilité et du télétravail.
• Petits frères et soeurs des Y et enfants des X, les Z sont aujourd’hui aux portes de l’entreprise. Nés quant à eux avec un cellulaire dans la poche, ils sont curieux, lucides et (sur) informés. À la fois éternels étudiants et entrepreneurs en herbe, ils ont souvent plus voyagé que leurs aînés et sont partagés entre leur culture nationale et internationale. Depuis leur enfance, ils ont l’habitude d’être écoutés et que leur avis compte.
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