Services sociaux: mourir dans l’oubli

Le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal a indiqué, vendredi, qu’il ouvrait une enquête à la suite du décès « très préoccupant » de deux personnes âgées retrouvées mortes dans leur domicile d’Anjou.
Ces deux personnes devaient bénéficier de soins ou de services de la part du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de l’Est-de-l’Île-de-Montréal.
Le CIUSSS n’a pas voulu donner d’entrevue. Il a toutefois confirmé par voie de communiqué qu’il ouvrait « immédiatement une enquête approfondie » sur les circonstances entourant le « drame, qui est très préoccupant ».
En entrevue au Réseau de l’information (RDI), le président-directeur général du CIUSS concerné, Yvan Gendron, s’est dit « très attristé parce qu’on est très proches de nos gens ».
Il a indiqué que, dès qu’il a été mis au courant de la situation, il a demandé sa propre enquête « pour voir ce qui s’est passé et prévenir ». Le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal collaborera également à l’enquête des autorités.
Il n’a pas voulu en dire davantage, les informations concernant le couple âgé étant considérées comme des renseignements personnels.
Des policiers de Montréal ont fait la macabre découverte des corps de deux aînés dans leur domicile. Ils ont été appelés à se rendre à leur résidence de l’avenue de la Roche-sur-Yon, dans l’arrondissement d’Anjou.
Les voisins
Des voisins avaient affirmé qu’ils n’avaient pas vu les deux personnes âgées depuis un certain temps et que les poubelles n’avaient pas été sorties.
Le Service de police de la Ville de Montréal a déjà confirmé qu’il ne s’agissait pas d’un crime. Les policiers n’ont constaté aucune trace de violence sur les corps, ni d’entrée par effraction, ni d’éléments qui ont été déplacés dans la maison.
Le dossier a été remis au coroner pour qu’une autopsie soit pratiquée afin de connaître les causes des décès et le temps qui s’est écoulé entre ceux-ci et la découverte des corps.
L’homme de 87 ans et la femme de 86 ans étaient d’origine allemande. Les policiers n’ont pas été en mesure de joindre leur famille.
Un protocole existe
Au cours d’une entrevue, Paul Brunet, du Conseil pour la protection des malades, s’est montré outré de la situation.
Il a indiqué qu’un protocole clair est censé encadrer de telles situations. Il s’est demandé à voix haute si les personnes dépêchées pour se rendre au domicile des deux aînés avaient été formées comme il se doit ou s’il s’agissait de personnes rémunérées au salaire minimum et n’ayant pas reçu la formation requise. Il ne blâme donc personne avant de savoir.
Si les travailleurs à domicile avaient été formés, ils étaient censés suivre le protocole. Celui-ci stipule que si les bénéficiaires des soins et services ne répondent pas, ils doivent tenter de joindre la famille, des proches. Si cela ne fonctionne pas, ils sont censés appeler le 911. Dans de tels cas, lorsqu’une personne très âgée est censée recevoir des soins de la part d’une institution publique et qu’elle ne répond pas, « la police peut ouvrir la porte de force », a affirmé M. Brunet.
« Il y a une sorte de je-m’en-foutisme qui s’est installé dans le réseau depuis quelques années », a déploré M. Brunet.
« Quand ça vient de très haut, où, l’important, c’est de répondre aux ordres, de répondre aux coupes… et d’être pas nécessairement humain. Et d’entendre le ministre et le premier ministre dire que tout va bien dans le réseau… Ça se peut qu’il y ait du monde, au bas de la chaîne, sur le terrain, qui se disent “de toute façon, ce n’est pas bien grave, tout le monde dit que ça va bien et nous autres, on nage dans les demandes auxquelles on ne peut pas répondre” », a ajouté M. Brunet.