Statut d’organisme de bienfaisance: l’IRAI fait appel du refus du fisc fédéral

L’Institut de recherche sur l’autodétermination des peuples et les indépendances nationales (IRAI) ne se satisfaisait pas du refus de l’Agence du revenu du Canada (ARC) de lui accorder le statut d’organisme de bienfaisance, l’accusant de « partialité », de « discrimination » et de « politisation [de son] dossier ». Il déposera sous peu un avis d’opposition devant la Direction des appels du fisc canadien.
« C’est clair, c’est même hors de tout doute que l’ARC a décidé d’adopter une politique de discrimination à l’endroit de l’IRAI », a fait valoir l’« idéateur », et principal bailleur de fonds de l’IRAI, Pierre Karl Péladeau, lors d’une conférence de presse jeudi avant-midi.
En effet, le président et chef de la direction Québecor a déjà déboursé plus d’un million de dollars afin de permettre à l’IRAI de prendre son envol à l’hiver 2016. Deux ans et demi plus tard l’IRAI a toutefois du plomb dans l’aile. Plusieurs personnes attendraient que l’Institut se voie octroyer le statut d’organisme de bienfaisance avant d’y contribuer financièrement, ce qui leur permettrait d’obtenir des crédits d’impôt d’Ottawa et de Québec pouvant équivaloir à près de la moitié de leur contribution (42 % et 48 %).
Fin de non-recevoir
L’IRAI poursuit des « fins politiques non énoncées », soit « promouvoir l’indépendance du Québec et faire avancer les intérêts du PQ », a tranché l’ARC le 2 mai dernier. « Le domaine de recherche restreint du demandeur centré sur l’indépendance du Québec et les mouvements souverainistes internationaux, coïncide avec la principale plateforme du PQ telle qu’énoncée par Monsieur Pierre Karl Péladeau lors de sa nomination en tant que chef du Parti québécois, lors de laquelle il s’est engagé à mettre en place un institut de recherche sur l’indépendance », écrit le directeur général de la Direction des organismes de bienfaisance, Tony Manconi, tout en ajoutant que l’IRAI est « dirigé par des personnes qui ont ou qui ont déjà eu des liens avec [le PQ] et est financé par Monsieur Péladeau ».
L’avocate de l’IRAI, Jessica Gaumont, a qualifié jeudi de « discriminatoire et manifestement déraisonnable » le rejet de la demande d’enregistrement de l’IRAI sur la base notamment de « l’identité des collaborateurs et en présumant leur mauvaise foi de par leurs allégeances politiques présumées ». « Il s’agit de préjugés fondés sur des opinions personnelles d’individus qui ont le droit fondamental de penser et d’agir comme bon leur semble en leur propre nom », fait-elle valoir dans l’avis d’opposition qu’elle transmettra à la Direction générale des appels de l’ARC.
« Si, éventuellement, il y avait un autre idéateur, là on aurait le statut [d’organisme de bienfaisance] ? » a demandé par la suite M. Péladeau. « Mais, chose certaine, c’est plus que de la discrimination. J’aurais même tendance à penser que ― ça, je pense que c’est très attristant pour une démocratie au 21e siècle ― nous sommes en train de politiser les institutions de notre pays », a-t-il ajouté.
L’IRAI soutient participer à « l’avancement de l’éducation » : l’une des fins de bienfaisance reconnues par les tribunaux. « L’IRAI ne contrôle ni le contenu des recherches, ni la situation géographique des populations étudiées, ni les références utilisées par les chercheurs », insiste Me Gaumont. Elle s’explique mal pourquoi L’Idée fédérale, décrite comme « un réseau de réflexion non partisan dédié au fédéralisme », s’est retrouvée dans les bonnes grâces de l’ARC, mais pas l’IRAI. « D’ailleurs, le mandat de recherche sur l’Idée fédérale démontre clairement que cet organisme peut être accusé des mêmes torts et à plus grande échelle, et pourtant, il a été jugé admissible au statut convoité. Il s’agit donc d’une démonstration de la pertinence du rejet de cette observation », poursuit-elle.
Me Gaumont transmettra un avis d’opposition à la Direction des appels de l’ARC, et ce, même si elle est persuadée que la décision du fisc serait « légitimement balayée que devant un tribunal impartial exempt de préjugé » ; en l’occurrence la Cour d’appel fédérale.