Procès Normandeau: les coaccusés se disent victimes d’un système de fuites médiatiques

La chasse aux fuites médiatiques s’ouvre officiellement ce mercredi au palais de justice de Québec, où l’ex-entrepreneur Lino Zambito doit témoigner en marge du procès des ex-ministres libéraux Nathalie Normandeau et Marc-Yvan Côté.
Devant le juge André Perreault, la défense tente de faire valoir qu’« un système de fuites orchestrées minutieusement pour déstabiliser le gouvernement et le Parti libéral » nuit aux droits des six coaccusés d’avoir un procès juste et équitable — et commande donc l’arrêt des procédures judiciaires.
Outre Nathalie Normandeau et Marc-Yvan Côté, Bruno Lortie, François Roussy, France Michaud et Mario Martel font face à divers chefs de complot, de corruption de fonctionnaires et d’abus de confiance.
« Ce qu’on a, monsieur le juge, ce sont des soupçons ou des probabilités de culpabilité qui flottent sur un groupe de quatre personnes », a déclaré mardi l’avocat Jacques Larochelle, au sujet des sources à l’origine de fuites journalistiques.
Il estime que le témoignage des journalistes Marie-Maude Denis et Louis Lacroix, de Radio-Canada et de Cogeco, sera « nécessaire » pour prouver qu’un « groupe de représentants de l’ordre » a tenté d’établir au Québec « un système de justice parallèle » en s’évertuant à révéler aux médias des informations touchant des enquêtes policières.
En « dernier recours »
Sauf que la Cour suprême a statué en 2010 que les tribunaux ne doivent contraindre un journaliste à rompre une promesse de confidentialité faite à une source qu’en « dernier recours », a rappelé le juge Perreault. Pour cela — entre autres —, les journalistes Lacroix et Denis ont déposé des requêtes demandant qu’on les libère de l’obligation de témoigner en cour.
Les débats entourant celles-ci auront lieu une fois que seront terminés les témoignages d’autres personnes qui pourraient, selon la défense, permettre de déterminer les sources à la base de reportages qu’elle juge préjudiciables aux accusés.
Parmi eux : Lino Zambito. La défense avance que l’ex-témoin vedette de la commission Charbonneau « sous-entend » dans son autobiographie que la source de deux reportages de l’émission Enquête de Radio-Canada est l’ex-procureur en chef du Bureau de lutte contre la corruption et la malversation Sylvain Lépine. Ce dernier sera aussi entendu en Cour.
Aussi attendu à la barre : un enquêteur principal du dossier Joug de l’Unité permanente anticorruption, Mathieu Venne.
Dans sa requête en arrêt des procédures, la défense s’est attardée à son intérêt pour un dossier d’octroi de subvention impliquant l’ex-ministre Sam Hamad et l’entreprise Premier Tech, représentée par Marc-Yvan Côté. Ce même dossier a fait l’objet d’un reportage de l’émission Enquête ; il fait partie de ces reportages qui ont condamné les accusés « de facto dans l’esprit du public », selon la défense.
Cette dernière se défend d’avoir la « prétention d’établir l’identité exacte des sources à l’origine des fuites », mais avance que « l’immense majorité des fuites ne peut provenir que de l’État » et, plus précisément, « des forces policières ou de la poursuite ».