Éva Circé-Côté, passionnée de lettres et de culture

Photo: Bibliothèque et Archives nationales du Québec Éva Circé-Côté

Comment a-t-on pu délaisser si longtemps cette essayiste, féministe et libre-penseuse que fut Éva Circé-Côté, décédée en 1949 ? En 1903, à l’âge de 32 ans, cette femme à la forte personnalité est nommée première bibliothécaire de la Bibliothèque technique. Au Québec, lire constitue alors un défi. L’Église s’en méfie. Et les municipalités ne sont pas pressées de développer des lieux de savoir offerts aux citoyens.

Lorsque son mari meurt à l’âge de 33 ans, Circé-Côté va le faire incinérer, une chose impensable dans un univers catholique. Les foudres s’abattent sur elle.

Avec la journaliste Georgina Bélanger, elle ouvre un lycée laïque pour filles. Les niaiseries en guise d’éducation pour les filles, cela suffit, dit-elle. Trop de grec, trop de latin, pense-t-elle. Pas assez d’enseignement technique, ni de vraie culture générale. Sous sa direction, les jeunes filles danseront et feront aussi du dessin plutôt que de la broderie.

En janvier 1910, elle entame une collaboration au journal Le Pays, un hebdomadaire ouvert à la pensée libérale. Dès la fondation du journal Le Monde ouvrier, elle se joint à l’équipe et y publiera des articles jusqu’en 1942. Dès 1937, elle s’illustre dans le journal protestant francophone L’Aurore.

Sa voix est pour le moins particulière dans la société de son temps. Éva Circé-Côté prend la défense des femmes, des ouvriers, des immigrants, des Juifs pourchassés autant que des autochtones mal-aimés. Lors de ses sorties publiques, Circé-Côté défend aussi la place d’un art nouveau dans la société : le cinéma.

Dans son oeuvre, elle s’intéresse à Charles Hindeland et à Chevalier de Lorimier, les deux patriotes pendus haut et court le 15 février 1839. Leurs pensées, elle les présente comme un véritable idéal de liberté. C’est bien du côté des idées républicaines des patriotes, dit-elle souvent, qu’il faut envisager l’avenir.

Plutôt que nationaliste, Éva Circé-Côté se dit patriote, dans la lignée de ceux de 1837-1838, c’est-à-dire ouverte au monde, bien que militant pour l’autonomie de son peuple. Louis-Joseph Papineau, le chef patriote, incarne un grand modèle pour le patriotisme tel qu’elle le conçoit, c’est-à-dire comme « une idéologie, ou plutôt une passion vouée à l’affirmation d’une nation canadienne-française, avec sa langue et ses institutions, mais une nation fondée sur le progrès, laïque et inclusive d’où seraient absentes les exclusions de race et de religion ». Papineau, en ce sens, lui apparaît universel, d’autant plus que « les héros appartiennent à toutes les races, à toutes les religions ».



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