Homa Hoodfar a été victime de torture psychologique en Iran

Homa Hoodfar avait beau être terrorisée dans sa cellule de la prison d’Evin, elle savait qu’elle pourrait, tout au long de sa détention, se raccrocher à une lueur d’espoir : ses geôliers ne feraient pas d’elle une seconde Zahra Khazemi, cette photojournaliste irano-canadienne torturée et violée avant d’être assassinée, dans la même geôle, il y a maintenant 13 ans.
« Ils me disaient qu’ils renverraient ma dépouille au Canada. […] J’étais prête mentalement à passer quelques années en prison, ou, comme ils disaient, peut-être 15 ans », a relaté la professeure à la retraite de l’Université Concordia, relâchée le 26 septembre dernier après 112 jours de captivité, sur les ondes de Radio-Canada et de CBC mercredi.
L’anthropologue était incarcérée dans la section des prisonniers d’opinion, la même que celle où a été détenue Mme Khazemi. On l’a notamment accusée de collaborer avec des gouvernements ennemis. « Ils étaient très intimidants, ils voulaient me faire pleurer. Comme je ne pleurais pas, ils sont allés dans mon iPad. Ils ont fait jouer la musique qui a joué aux obsèques de mon mari. Et là, j’ai pleuré », a-t-elle expliqué.
« Je savais que la médiatisation de l’histoire de Zahra Khazemi les avait rendus plus prudents. » Il y avait aussi des caméras de surveillance, se rassurait-elle. Elle assure ne pas avoir été violentée, du moins physiquement.
Ses journées étaient meublées d’interrogatoires quotidiens, qui pouvaient parfois durer de nombreuses heures. Puis, une fois de retour dans sa cellule, elle tentait tant bien que mal de faire de son emprisonnement une expérience anthropologique. « Je n’avais pas de stylo, rien comme ça. Alors, je prenais le manche de ma brosse et j’écrivais, invisiblement, sur le sol de ma cellule. »
Elle a su qu’elle allait enfin être libérée quand ses geôliers lui ont dit d’être prête le lendemain à l’aube. Le jour venu, des gardiens — et des gardiennes — l’ont fait sortir de sa cellule, puis l’ont amenée sur-le-champ dans un salon de beauté, où on lui a teint les cheveux et on l’a maquillée, sous garde policière. « Il fallait aussi que je porte des vêtements aux couleurs vives. Ils voulaient que j’aie l’air en pleine forme au moment de ma libération », raconte-t-elle.
Lundi dernier, elle était enfin libérée et transportée par avion à Mascate, dans le sultanat d’Oman, un État ayant joué un rôle crucial dans la libération de la Montréalaise, qui découvre depuis son retour au pays les joies simples du quotidien, comme aller chercher son courrier ou flâner. Elle n’entend pas remettre les pieds en Iran, du moins, pas sous le régime actuel. « J’ai eu le coeur brisé » par cet ultime séjour dans sa terre natale, dit-elle.