Les Lakatos seront expulsées le 11 août

Elles avaient repris espoir, mais le verdict est finalement tombé jeudi : Katalin Lakatos et sa fille Gilda seront expulsées du Canada le 11 août prochain. Le gouvernement fédéral maintient donc l’avis qui avait été rendu le 12 mai dernier, acheminé quelques semaines après le rejet de la demande d’asile de cette famille rom de Hongrie.
« Je suis fatiguée, je suis tannée. La dernière fois, on avait eu une annulation de [l’avis] d’expulsion pour deux mois », a déclaré aux médias Gilda Lakatos, abattue et émue. « Je perds cinq ans de ma vie. » Après tout un battage médiatique la veille de leur expulsion en mai, un permis de séjour temporaire de deux mois avait en effet été accordé à la jeune femme de 17 ans, qui a appris le français dans une école secondaire de Montréal, et à sa mère. Pour elles, c’était le signe qu’Ottawa allait se pencher sérieusement sur leur demande de résidence permanente pour motifs humanitaires, soit le dernier recours possible pour un réfugié refusé. Un espoir vain, en fin de compte, estiment-elle.
Dafina Savic, directrice de Romanipe, un organisme qui vise à combattre la discrimination contre les roms au Canada et en Europe, déplore la façon dont le gouvernement a joué ses cartes, laissant croire que le sursis allait permettre une réponse, quelle qu’elle soit. « Le fait que [le gouvernement ait] octroyé un permis temporaire spécial, qui reconnaît les circonstances spéciales de la famille… On pensait que ça allait nous mener vers une réponse à la demande humanitaire. On les a laissées ici deux mois de plus, mais c’est perdu dans un sens. »
Immigration Canada n’a pas commenté le dossier, indiquant qu’il ne se prononce pas sur des cas particuliers.
Dernière chance
Pour empêcher son renvoi, ne reste plus à la famille Lakatos que deux semaines pour continuer à faire pression pour obtenir une réponse positive à sa demande de résidence pour motifs humanitaires. « On veut que le gouvernement démontre sa volonté de renverser ces politiques discriminatoires contre les Roms, en donnant la résidence permanente à la famille Lakatos, a insisté Mme Savic. C’est une famille qui a vraiment un très bon dossier humanitaire. »
Cette famille dit avoir connu beaucoup de discrimination en Hongrie, ce qui a poussé au suicide l’un des fils de la famille. L’emploi est rare pour les Roms et les enfants ont du mal à recevoir une éducation adéquate, certains se faisant mettre dans des classes pour handicapés mentaux, a affirmé Gilda. Exaspérés, les Lakatos — Gilda, le père, la mère et le fils restant — sont arrivés à Montréal en 2011. Malgré le rejet de leur demande d’asile en avril 2015, ils sont restés. Le père et le fils se sont fait prendre quelques mois plus tard et ont été renvoyés en Hongrie.
Dafina Savic soutient que le gouvernement Trudeau perpétue les politiques discriminatoires du gouvernement précédent. La loi C-31 avait mis la Hongrie sur la liste des « pays sûrs » en 2012 et l’ex-ministre de l’Immigration, Jason Kenney, avait déclaré que les demandes des Roms étaient « bidon » [«bogus »]. Mme Savic rappelle que le taux d’acceptation des demandes des Roms a baissé de 90 % entre 1998 et 2012.
Un parcours semé d’embûches
Juin 2011 La famille Lakatos demande l’asile au CanadaAvril 2015 Le statut de réfugié leur est refusé
Septembre 2015 Une demande de résidence permanente sur des bases humanitaires est déposée
Octobre 2015 Un avis d’expulsion est envoyé, mais la famille reste au pays
Mars 2016 Le père et le fils Lakatos sont arrêtés et expulsés
16 mai 2016 Un permis de séjour temporaire de deux mois est octroyé
28 juillet 2016 Un avis d’expulsion pour le 11 août est envoyé