Apple reçoit des appuis dans son bras de fer contre le FBI

Le FBI veut avoir accès au contenu du iPhone de l'un des meurtriers de San Bernardino. Ci-dessus, des agents aménagent la scène du crime, le 7 décembre dernier.
Photo: Joe Raedle Agence France-Presse Le FBI veut avoir accès au contenu du iPhone de l'un des meurtriers de San Bernardino. Ci-dessus, des agents aménagent la scène du crime, le 7 décembre dernier.

Ce serait une question de principes et de sécurité. La multinationale américaine Apple a décidé de tenir tête au FBI et refuse de lui donner les clefs de cryptage nécessaire afin d’accéder au contenu du iPhone d’un des meurtriers de la tuerie de San Bernardino, en Californie, en décembre dernier. Mercredi, le géant a reçu l’appui de l’importante Electronic Frontier Fondation.

Pour Tim Cook, grand patron d’Apple, permettre une telle intrusion créerait un précédent qui mettrait en péril la sécurité et la protection de la vie privée de tous les propriétaires de iPhone 6. Il réclame d’ailleurs au passage un débat public sur le chiffrement des données personnelles qui selon lui, pour être efficace, doit se faire sans compromission.

« Nous témoignons un grand respect aux professionnels du FBI et nous croyons que leurs intentions sont bonnes, explique Cook dans une lettre ouverte dévoilée mardi dans la foulée de l’ordre du tribunal reçu à ses bureaux. Or, ce que le gouvernement américain nous demande aujourd’hui de créer, et qui n’existe pas, nous le jugeons trop dangereux à faire : il nous demande de construire une porte dérobée pour lui permettre d’entrer dans nos iPhone. » Une porte qui, une fois ouverte, pourra être utilisée sur tous les appareils, par le gouvernement américain sur son territoire comme ailleurs sur la planète, mais également par des techniciens ou pirates moins bien intentionnés, dit-il.

« Ce que le gouvernement réclame, ce n’est pas de l’aide, c’est l’écriture d’un tout nouveau code informatique qui va faire disparaître les composantes de sécurité des iPhone 6 qui protègent les données de tous les usagers de ces téléphones à travers le monde », estime l’Electronic Frontier Fondation, chien de garde de la vie privée aux États-Unis, qui appuie la multinationale dans sa résistance.

L’autre Big Brother

L’inflexibilité d’Apple est louable, estime le sociologue de l’UQAM André Mondoux, spécialiste de l’impact social des technologies, mais elle s’inscrit davantage dans une logique de relations publiques que dans une volonté de protéger la vie privée des citoyens. « Avec Google, Apple est ce qui se rapproche le plus de Big Brother [figure de la surveillance étatisée], dit-il. Un débat public sur l’accès aux données d’un iPhone devrait aussi porter sur le flux de données induit par le vivre-ensemble qu’Apple capte ou peut capter et sur le réel degré de transparence qui entoure cette collecte d’information ».

Dans l’enquête sur le massacre de San Bernardino, qui a coûté la vie à 14 personnes, les autorités se butent actuellement au iPhone 6 d’un des meurtriers. L’appareil, équipé du système d’exploitation iOS 9, est protégé en effet par un système de chiffrement dit « de bout en bout » développé par Apple dans la foulée des révélations d’Edward Snowdon sur les intrusions de la NSA dans la vie privée des citoyens ordinaires, révélations qui ont passablement ébranlé la confiance des internautes quant aux géants de la communication.

La clef d’encodage n’est détenue que par le propriétaire de l’appareil. Apple n’en possède pas de copie. Pis, après dix tentatives infructueuses d’accès au contenu de l’appareil, l’ensemble de ce contenu est automatiquement effacé.

Selon le FBI, Apple a l’obligation de collaborer à son enquête en fournissant les moyens techniques d’entrer à l’intérieur de ce iPhone verrouillé. Apple s’oppose toutefois à cette demande jugeant qu’elle a des implications qui vont au-delà du cas criminel cité.

Depuis son apparition, le nouveau système de chiffrement d’Apple est régulièrement remis en question par les autorités américaines qui y voient une menace pour la sécurité nationale.

Pour en savoir plus

Consulter la requête du FBI


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