Le Manitoba présente ses excuses

Le Manitoba est devenu jeudi la première province à présenter des excuses officielles aux autochtones qui avaient été arrachés de chez eux et confiés en adoption à des familles non autochtones, il y a 50 ans.

Le premier ministre néodémocrate, Greg Selinger, a prononcé les excuses solennelles du Manitoba à l’Assemblée législative jeudi après une cérémonie à laquelle étaient conviées des victimes de ce programme social appelé aujourd’hui « la rafle des années 1960 ».

Des milliers d’enfants autochtones canadiens — Amérindiens, Métis ou Inuits — ont alors été « enlevés » par des fonctionnaires des services sociaux et offerts en adoption à des familles non autochtones — parfois même jusqu’aux États-Unis.

M. Selinger a reconnu que cette pratique avait contribué à priver les enfants de tout lien avec leur langue, leur culture et leurs traditions — des impacts similaires à ceux vécus par les autochtones qui ont été arrachés à leur famille pour être placés dans des pensionnats fédéraux tenus par des communautés religieuses, afin d’y être « civilisés ».

Le premier ministre manitobain a rappelé que ces impacts sont toujours ressentis aujourd’hui par les victimes, 50 ans plus tard. Il a aussi promis de soulever la question lors de la prochaine table ronde sur les femmes autochtones assassinées ou disparues, et a indiqué que le sujet ferait dorénavant partie du curriculum de toutes les écoles manitobaines.

Certains de ces enfants adoptés estiment cependant que des excuses ne suffisent pas : ils demandent une commission d’enquête nationale et une reconnaissance des souffrances subies, comme ont eu droit les victimes des pensionnats fédéraux pour Amérindiens.

150 000 enfants

Ces pensionnats administrés par l’Église ont accueilli, des années 1870 jusqu’aux années 1990, environ 150 000 enfants amérindiens. Or, les Métis ont été exclus de l’entente sur les pensionnats fédéraux pour amérindiens, conclue en 2005, qui prévoyait notamment le versement de compensations totalisant 1,9 milliard de dollars aux survivants, et la mise sur pied de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, qui a déposé son rapport au début du mois.

Dans le cas des victimes de la « rafle des années 1960 », les enfants n’étaient pas confiés à des pensionnats fédéraux mais à des familles adoptives, toujours non autochtones. Des demandes en actions collectives ont été déposées en Ontario, au Manitoba, en Alberta et en Saskatchewan.

Le grand chef David Harper, qui représente les Premières Nations du nord du Manitoba, estime que la province doit contribuer davantage à la réunification des familles et au soutien des victimes.

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