Abattu avant l’arrivée du pistolet Taser

Une autopatrouille munie d’un pistolet électrique Taser était en route vers le terminus d’autocars de la rue Berri le 3 février 2014 lorsqu’Alain Magloire, en pleine crise et armé d’un marteau, a affronté des policiers. Mais avant que l’appareil ait pu être utilisé, un policier a tiré sur l’homme sans-abri de 41 ans qui a succombé à ses blessures.
C’est ce qu’ont confirmé les conversations captées sur les ondes radio de police et présentées lundi, à l’ouverture de l’enquête publique présidée par le coroner Luc Malouin sur le décès d’Alain Magloire.
En matinée mardi, Jennifer Chez, enquêteuse à la section des crimes contre la personne à la Sûreté du Québec (SQ), a décrit la chronologie des événements du 3 février 2014, faisant notamment écouter les enregistrements des appels faits au 911 et présentant des images tournées par des caméras de surveillance aux abords du terminus d’autocars de la rue Berri et dans un hôtel de la rue Saint-Hubert où Alain Magloire séjournait depuis trois jours.
Alain Magloire s’est d’abord fait remarquer lorsqu’il a frappé avec son marteau la porte d’une salle de bain de l’hôtel. Un peu plus tard, vers 10 h 10, une altercation verbale est survenue dans la cuisine de l’établissement. La situation a dégénéré par la suite.
Appels au 911
Lors de son témoignage, Alex Witter, employé de l’hôtel, a relaté que M. Magloire avait déjà été un client de l’hôtel auparavant, mais que c’était la première fois qu’il se comportait de façon menaçante. À 10 h 41, M. Witter a d’ailleurs communiqué avec le 911 pour signaler la présence de ce client agressif qui portait un marteau sur lui.
M. Witter a demandé à Alain Magloire de quitter l’établissement, mais a refusé de lui remettre son dépôt de 50 $. Mécontent, M. Magloire a fait voler en éclats la vitre du comptoir de la réception d’un coup de marteau, puis a fracassé une autre vitre, avant de sortir de l’hôtel. Une autre employée a appelé le 911 pour relater l’incident.
Alex Witter a raconté avoir suivi Alain Magloire sur le boulevard De Maisonneuve, puis sur la rue Saint-Denis, tout en communiquant avec le 911.
Des policiers ont finalement rejoint Alain Magloire. À 10 h 55, la policière Jeanne Bruneau a dit, lors d’échanges sur les ondes radio, que l’individu refusait de lâcher son marteau. Deux minutes plus tard, un policier fait savoir qu’un véhicule s’approchait des lieux avec un Taser. « Dépêchez-vous ! », a lancé la policière Bruneau.
Une séquence vidéo captée par une caméra de surveillance devant le terminus d’autocars montre Alain Magloire sur le trottoir et quatre policiers en demi-cercle autour de lui. Deux autopatrouilles arrivent en trombe et l’une d’elles renverse Alain Magloire qui menace ensuite un policier avec son marteau. Un autre policier tire des coups de feu et l’homme tombe au sol. Il est 10 h 58.
En après-midi, deux citoyens ont également témoigné pour raconter ce qu’ils avaient vu alors qu’ils circulaient en voiture non loin de la scène du drame.
Témoignages attendus
Les audiences se poursuivront mardi et les quatre policiers impliqués dans l’intervention, dont celui qui a abattu Alain Magloire, viendront témoigner. Mercredi, ce sera au tour du policier qui conduisait l’autopatrouille ayant heurté Alain Magloire qui donnera sa version des faits.
La semaine prochaine, l’enquête publique s’attardera au profil médical et psychologique d’Alain Magloire, mais le coroner Luc Malouin prévoit déjà que ces quatre jours ne suffiront pas.
Père de deux filles, Alain Magloire est un ancien chercheur en biochimie qui aurait commencé à souffrir de troubles de santé mentale après avoir consommé de l’ecstasy lors d’une fête en 2006, selon ses proches.
Radio-Canada révélait la semaine dernière qu’il avait sollicité de l’aide à plusieurs reprises dans les mois précédant sa mort, mais en vain.
Son frère, Pierre Magloire, a assisté à l’audience, tout comme son père et sa soeur. S’il n’a pas voulu commenter les témoignages entendus dans la journée, il a dit souhaiter obtenir des réponses aux questions troublantes soulevées par l’intervention policière et par le manque de soins prodigués à son frère malgré plusieurs appels à l’aide. « Il faut que les choses changent », a-t-il dit.