Coalition des tables régionales - Des états généraux pour les 4140 organismes communautaires

Réginald Harvey Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial Action communautaire

Les groupes communautaires se sont multipliés au Québec au fur et à mesure qu’il leur incombait de répondre à des mandats plus nombreux et plus spécifiques. Au fil des cinq dernières décennies, l’État a graduellement pratiqué des coupes dans plusieurs services publics, dont ces organismes ont hérité sans nécessairement avoir les moyens financiers et disposer des ressources appropriées pour les dispenser. Le temps est venu de tenir des états généraux pour trouver des pistes de solution aux impasses auxquelles est confronté le monde communautaire.

 

La Coalition des Tables régionales (14 régions) d’organismes communautaires (CTROC) pilote le projet d’une consultation élargie, qui a été lancée le 23 septembre dernier et qui s’échelonnera sur environ un an. Une pareille démarche englobe, selon des données gouvernementales, les 4140 organismes communautaires actifs au Québec en 2011-2012, auxquels 19 ministères ou organisations de l’appareil d’État ont versé la somme de 478 188 199 $ au titre du financement ; le ministère de la Santé et des Services sociaux a été de loin le plus important bailleur de fonds, leur ayant alloué un montant de 400 118 492 $.

 

Patricia Chartier, coordonnatrice à l’interne de la Coalition, dresse un inventaire-synthèse des groupes visés par les états généraux : « Il est certain que la majorité de nos membres interviennent dans le secteur de la santé et des services sociaux, tout comme la plupart des organismes communautaires. De notre côté, on travaille beaucoup en fonction de la participation des membres de nos regroupements (environ 2000), mais on a élargi la démarche en demandant à plus de 4000 groupes de participer. On sait que ces gens sont très occupés, que c’est très diversifié, mais on ne voulait pas être restrictif dans l’approche de départ. Au final, notre objectif, pour le gros événement que sera la rencontre nationale, serait d’obtenir 25 % de nos membres, donc autour de 500 organismes participants, ce qui serait assez représentatif de tout ce qui se passe. »

 

Et qu’en est-il des éléments déclencheurs mobilisant autant de monde autour d’états généraux ? « Ce sont tous les changements qui ont lieu, entre autres, dans les politiques sociales, mais aussi dans les pratiques ; ils font en sorte qu’il y a de plus en plus de groupes qui répondent à de plus en plus de besoins, mais en même temps il y a de moins en moins de financement. »

 

Patricia Chartier soulève un autre aspect de la question moins bien connu, soit la fracture entre bénévolat et professionnalisme : « Quand on parle de sous-traitance, de délestage des responsabilités de l’État, il faut tenir compte du fait que, de prime abord, les groupes communautaires étaient bénévoles, mais ils se sont tranquillement professionnalisés. Il n’en reste pas moins que les conseils d’administration, qui gèrent cela, sont demeurés bénévoles et qu’il y a une vie associative qui est importante. »

 

Elle enchaîne dans la même veine : « Il y a des enjeux qui en découlent, notamment sur la qualité des services, au moment où on délègue à ces organisations des responsabilités de plus en plus importantes : on veut que des bénévoles aillent donner des bains à la maison ou des soins de première instance aux personnes âgées et on entre à ce moment-là dans un autre domaine, qui relève davantage des soins professionnels. »

 

Il en résulte que « le mouvement communautaire a toujours fourni des services, mais on lui en demande de plus en plus et avec davantage de spécialisation. Il y a donc une sorte de glissement vers la professionnalisation et, en même temps, tous les groupes sont encore obligés de façon bénévole d’avoir des conseils d’administration, d’avoir une vie associative, de tenir des assemblées générales », précise encore la coordonnatrice. Il y a là comme un mélange des genres sur le plan du service public.

 

Et le secteur privé entre dans la mêlée pour ajouter à la confusion, comme elle le mentionne : « Il y a aussi les fondations comme la Fondation Chagnon, qui est une des plus importantes et qui travaille en partenariat avec l’État ; de leur côté, ils arrivent avec de l’argent pour les groupes communautaires, mais avec des demandes très spécifiques d’activités. » Et toutes les interventions communautaires se complexifient sur le plan de la bureaucratie administrative : « Il y a des pratiques gestionnaires de plus en plus complexes et des offres de financement qui émanent de sources plus nombreuses, avec des demandes spécifiques qui ne correspondent pas à la mission initiale des organismes. »

 

Thématique retenue

 

Les groupes sont invités à prendre position et à faire valoir leurs points de vue à partir des trois thèmes qui ont été retenus par la Coalition, en fonction des problèmes les plus courants qui se posent dans l’action. Patricia Chartier en fait le tour : « Il y a tout d’abord le volet des mobilisations et des revendications : les groupes, qu’on le veuille ou non, font souvent face à des populations qui sont démunies, pour lesquelles ils vont revendiquer des droits. »

 

En deuxième lieu figure le sujet de la reconnaissance de l’autonomie des organismes : « Il y a eu une politique du gouvernement dans ce sens-là, mais elle est plus ou moins appliquée ; on veut que soit reconnue notre spécificité. » Et, troisièmement, les participants auront à se pencher sur tout l’aspect des partenariats et du développement social : « Pour ces trois thèmes-là, on veut sortir les propositions prioritaires ; on souhaite que les groupes arrivent avec des solutions qui peuvent nous orienter, parce que, finalement, on navigue quelque peu à vue à l’heure actuelle ; on est dans notre cour et on prend une décision, bien qu’on échange des informations et qu’on tisse des réseaux entre nous. »

 

Pour atteindre cet objectif, il y a évidemment des étapes à suivre dans la tenue des états généraux : il y aura donc une première consultation auprès des organismes durant l’automne ; par la suite, chaque région tiendra des rencontres de préparation au cours du printemps prochain, afin de dégager des pistes de solution en vue de l’événement national prévu à l’automne 2014.

 

Entretemps, la Coalition a pris soin de préparer tout un coffre d’outils à l’intention des participants, disponible dans son site Internet : « Le principal élément, c’est le cahier de participation : il est vraiment important parce qu’il retrace l’historique, pose des questions ouvertes et apporte des débuts de propositions. On y retrouve aussi un guide afin de savoir comment participer à cette démarche. »

 

 

Collaborateur

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