Groupes écologistes - L’environnement a perdu plus d’un défenseur

Ce texte fait partie du cahier spécial Action communautaire
En 2001, le gouvernement du Québec a énoncé une politique d’action communautaire visant à garantir la reconnaissance et le financement des organismes communautaires. De l’avis de plusieurs, cette politique a donné de bons résultats… sauf pour les groupes écologistes. De fait, ceux-ci disparaissent comme neige au soleil, surtout depuis 2006.
« Lorsque les 10 ans de cette politique [d’action communautaire] ont été célébrés en 2011, le constat fait par l’ensemble du mouvement communautaire a été que tous les secteurs ont fait des progrès ou, du moins, n’ont rien perdu, raconte Bruno Massé, coordonnateur général du Réseau québécois des groupes écologistes (RQGE). En fait, un seul a reculé : le secteur communautaire environnemental. La politique a donc été favorable à tous… sauf à nous ! »
Le RQGE regroupe les organismes communautaires qui oeuvrent dans le domaine de l’environnement au Québec. « Ça fait 30 ans que nous existons, indique-t-il. Nous sommes là pour renforcer les groupes du mouvement écologiste en leur donnant des outils. » Le Réseau favorise en outre l’échange d’information entre les 88 groupes qui le composent et fait des représentations auprès du gouvernement et des différentes instances de l’appareil gouvernemental.
M. Massé déplore donc que, dans la politique d’action communautaire qui devait garantir le financement des organismes communautaires, le secteur écologique a été le grand laissé-pour-compte.
« Pire, poursuit Bruno Massé, après des coupes massives dans les rares programmes qui existaient en 2006, le sous-financement a atteint un stade critique. » Résultat : des centaines de groupes écologistes se sont éteints faute de financement, de sorte qu’actuellement, de la centaine qui existent encore, seuls une douzaine d’entre eux disposent d’un financement leur permettant de réaliser leur mission. « Nous estimons qu’il y avait 300 groupes écologistes au Québec au lendemain des coupes de 2006, alors qu’à présent il en reste une centaine », précise le coordonnateur du réseau.
« Nous aussi, comme regroupement, nous avons passé au hachoir, poursuit-il, puisqu’en 2005-2006 le gouvernement a aboli trois programmes qui finançaient les organismes comme le nôtre. » Ces programmes assuraient un financement modeste, note-t-il, mais qui permettait néanmoins au Réseau de survivre. « Nous avons alors été branchés au respirateur artificiel durant deux ans, explique-t-il, avant de bénéficier d’un autre programme, un programme de défense collective des droits. »
Par contre, il concède que les actions menées par les groupes écologistes n’ont guère plu au gouvernement de Jean Charest. « Dans notre cas, c’était probablement parce que les groupes écologistes brassent beaucoup la cage, admet-il, de sorte que le gouvernement libéral ne nous aimait vraiment pas ! Non seulement a-t-on coupé notre financement mais également toute communication, puisque nous étions incapables de nous entretenir avec notre ministère vis-à-vis. Même au téléphone, c’était vraiment très hostile à notre égard ! »
Il comprend en outre que, pour une économie axée sur les industries extractives - en particulier sur les gaz de schiste et le développement du Grand Nord - « c’est sûr que ça dérange énormément lorsque des groupes bien organisés s’y opposent ».
Le gouvernement libéral a par conséquent souvent entretenu des relations difficiles avec le secteur communautaire écologiste. « Mais, pour nous, la qualité de l’environnement et le respect des droits humains sont fondamentaux, puisqu’après tout tout le monde a le droit de vivre dans un environnement sain ! », d’insister l’écologiste.
Bruno Massé affirme même : « Notre analyse est donc que les coupes qu’on nous a infligées ont été de nature politique : on désirait nous faire taire ! »
Espoirs?
Heureusement, le coordonnateur du Réseau québécois des groupes écologistes observe que, à la suite de l’élection du Parti québécois, il y a un an, le secteur communautaire écologiste a une bien meilleure écoute. « Ça, c’est certain, certain, dit-il avec soulagement, mais on attend encore les résultats. »
Il évoque toutefois l’urgence d’obtenir rapidement du financement, « puisque, chaque mois, des groupes ferment leurs portes et ce sont toute une expertise et tout un savoir qui se perdent chaque fois. C’est même vraiment tragique ! », dit-il.
Le Réseau a par conséquent fait des démarches auprès du ministre de l’Environnement et proposé la mise en oeuvre d’un plan de redressement. « Le printemps dernier, indique M. Massé, nous sommes parvenus à rencontrer le ministre Blanchet. Nous lui avons présenté un plan de travail… »
« Notre objectif, poursuit-il, était de créer un comité mixte - formé de représentants du secteur écologiste et du gouvernement - afin de développer des programmes… Voilà la bonne façon de faire avancer les choses, de faire avancer correctement un tel dossier. »
Il rapporte que le Réseau a même reçu une réponse favorable. « Le comité était censé se rencontrer à cinq reprises, ce printemps et durant l’été, afin d’élaborer un plan qui serait présenté au ministre dès cet automne, précise M. Massé. Toutefois, ce comité n’a jamais amorcé ses travaux ! »
Tout porte à croire que le gouvernement chercherait à se défiler, estime-t-il. « Bien sûr, il s’est passé toutes sortes d’événements entretemps, dont la tragédie de Lac-Mégantic, rappelle-t-il. Mais, à un moment donné, nous n’étions même plus capables d’obtenir la moindre réponse… »
Heureusement, il est actuellement prévu que le Réseau des groupes écologistes rencontrera le ministre le 21 octobre, afin de mettre au point un nouvel échéancier. « Mais là, vous comprendrez que, dans le contexte politique actuel, on craint de passer sous le tapis… », lance un Bruno Massé un peu désenchanté.
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