Québec serre la vis aux psychothérapeutes

Ne s’improvisera plus psychothérapeute qui veut. À partir de jeudi prochain, il faudra détenir un permis de l’Ordre des psychologues du Québec pour pratiquer la psychothérapie. De plus, ce permis ne pourra être délivré qu’aux membres d’ordres professionnels préétablis, dont les médecins, les psychologues, les travailleurs sociaux et les thérapeutes conjugaux et familiaux, les conseillers en orientation, les infirmières, les ergothérapeutes, et les psychoéducateurs.
Tous, hormis les médecins et les psychologues, devront par ailleurs avoir fait une maîtrise dans le domaine de la santé mentale, suivre une formation de 576 heures, et effectuer un stage de 600 heures en psychothérapie. En fait, le titre de psychothérapeute seul n’existera plus, il sera accolé à un autre titre : ergothérapeute, conseiller en orientation, etc.
La loi, qui a été annoncée par le ministre de la Justice, Jean-Marc Fournier, hier à Montréal, vise à contrôler la prolifération de pseudo-psychothérapeutes utilisant les techniques les plus diverses, de celle des chakras à la mort en conscience. On sait qu’encore récemment, une femme est morte « cuite » par sudation dans le cadre de l’une de ces séances de thérapie douteuse, visant à lui faire vivre « une mort en conscience », à Durham-Sud.
« Récemment, l’Ordre des psychologues a mené un sondage qui indiquait que 85 % des gens croyaient qu’un psychothérapeute était un psychologue », rappelle Rose-Marie Charest, présidente de l’Ordre des psychologues du Québec. Or, comme les psychothérapeutes n’étaient pas membres de l’Ordre des psychologues, ce dernier ne pouvait entamer de représailles contre les charlatans.
Cette loi est une première au Canada, expliquait hier le ministre Fournier. C’est ce qui explique le temps qu’on a dû mettre pour la concocter. « Cela fait 20 ans que l’on demande cette réglementation », ajoute Rose-Marie Charest. Déjà, il y a une dizaine d’années, un reportage de Radio-Canada dénonçait le fait que tout un chacun pouvait s’improviser psychothérapeute sans garantir la qualité des services.
Le ménage
Et au quotidien, l’Ordre recevait des plaintes de psychologues dont les clients avaient suivi des thérapies par lesquelles on promettait de rétablir le lien avec la mère ou de guérir de sévices sexuels en trois fins de semaine.
« On a voulu faire le ménage dans les approches, dans la mesure du possible », dit Rose-Marie Charest.
Désormais, les psychothérapeutes attitrés devront s’être spécialisés dans l’une des quatre approches reconnues : soit l’approche cognitive comportementale, l’approche psychodynamique, l’approche humaniste ou l’approche systémique-interactionnelle. La loi comporte également une clause de droits acquis, qui permettra à des psychothérapeutes qui utilisent déjà l’une de ces approches et qui ont un baccalauréat en santé mentale de continuer de pratiquer. L’Ordre donnera deux ans aux psychothérapeutes pour faire leur demande de permis.
« Nous croyons recevoir de 1000 à 2000 demandes de permis au cours des deux prochaines années », estime Rose-Marie Charest.
Mme Charest estime aussi que la loi permettra de rendre la psychothérapie plus accessible, notamment dans les services publics où elle est demandée. Ceux-ci pourront en effet engager des gens pratiquant la psychothérapie en étant assurés de la qualité des services offerts, dit-elle.