Plusieurs milliers de personnes ont manifesté à Montréal pour un «printemps québécois»

Plutôt rouge, comme couleur printanière. Des dizaines de milliers de personnes ont répondu aujourd'hui à l'appel lancé par le mouvement étudiant et divers groupes sociaux à venir manifester dans les rues de Montréal pour réclamer un «printemps québécois» et souligner les neuf années qui se sont écoulées jour pour jour depuis l’élection du Parti libéral du Québec.
La Coalition large de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE) avait lancé une invitation «à la mobilisation citoyenne contre les gouvernements de Québec et d'Ottawa». Ses représentants estiment qu'ils étaient environ 30 000 au plus fort de la marche qui se terminait au square Victoria.La manifestation s'est déroulée dans une ambiance bon enfant, même si elle a donné lieu à des rencontres inopinées entre manifestants et automobilistes, notamment sur la rue Saint-Denis. Sur une portion de l'artère, les marcheurs se sont faufilés entre les voitures immobilisées, provoquant un concert de klaxons. Dans la plupart des cas, ils étaient actionnés par des automobilistes qui affichaient des sourires - parfois résignés, d'autres fois franchement engageants.
Vers 16h30, alors que le square Victoria se remplissait de rouge, aucun méfait n'étaient à signaler, a confirmé Simon Delorme, porte-parole du Service de police de Montréal (SPVM).
À l'occasion de la marche, baptisée «Pour un Printemps québécois», la CLASSE avait tendu la main à l'ensemble des groupes sociaux.
Avant le départ, quelques personnes ont d'ailleurs tenus des discours enjoignant à élargir la lutte des étudiants contre la hausse des droits de scolarité, qui en est à sa 10e semaine de grève. «Aujourd'hui le mouvement étudiant interpelle chacun et chacune d'entre nous», a scandé la porte-parole de la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics, Marie-Ève Rancourt.
C'est tout de même la cause étudiante qui a monopolisé l'attention, comme en témoignaient les affiches, les slogans et les chants.
Des enseignants opposés à la hausse des droits de scolarité étaient notamment de la partie. La veille, un groupe disant représenter un millier de leurs collègues de tous les niveaux d'enseignement avait publiquement réclamé la démission de la ministre de l'Éducation, Line Beauchamp.
D'après le député Amir Khadir, de Québec solidaire, ils se trompent de cible.
«Sur le plan politique, Mme Beauchamp s'est tellement peinturée dans un coin qu'elle n'a pas de crédibilité. Alors, pour qu'un dialogue s'engage, ce serait le geste à faire, a-t-il suggéré. Mais je la plains, parce qu'elle est victime de l'entêtement de M. Charest.»
La semaine dernière, les leaders du mouvement disaient souhaiter que la manifestation déborde largement le thème des frais de scolarité pour toucher les questions d'inégalité sociale, de corruption et d'autres revendications d'ordre social.
«Il fallait trouver un élément pour aller encore plus loin, et pour nous, la manière d'aller plus loin, c'était d'élargir la lutte, d'élargir politiquement nos revendications», avait expliqué Gabriel Nadeau-Dubois, de la CLASSE.
Les étudiants espèrent être les précurseurs de ce qu'ils appellent «un printemps québécois», dans la mouvance du printemps arabe qui a notamment fait tomber les régimes autoritaires en Égypte, en Libye et en Tunisie, et provoqué une guerre civile qui perdure en Syrie.
«C'est un gouvernement qui ne sert pas la population, que ce soit en augmentant les frais de scolarité, en imposant une taxe santé, en augmentant les tarifs d'Hydro-Québec», avait indiqué M. Nadeau-Dubois.
«Il y a eu le scandale sur les gaz de schiste, les scandales sur la corruption, un taux d'insatisfaction qui ne dérougit pas envers le gouvernement libéral de Jean Charest, et ça va être l'occasion pour l'ensemble de la population de dire non seulement qu'elle est en appui aux étudiants, mais qu'il est temps de contester de manière plus générale la direction que prend le Québec.»
Avec La Presse canadienne