Transport en commun - À 82 municipalités de s'entendre pour financer un réseau en nécessaire expansion

Ce texte fait partie du cahier spécial Transport - Grand Montréal
Le transport collectif dans la région métropolitaine de Montréal souffre d'un manque de financement. Tour de piste des solutions envisagées pour dégager de nouvelles sommes.
Péage, augmentation des taxes sur l'immatriculation et sur l'essence, redistribution des sommes dédiées aux routes et au transport collectif, augmentation des tarifs payés par les usagers, taxe salariale: plusieurs formules peuvent être adoptées pour financer le transport en commun. La solution se trouvera probablement dans un cocktail de mesures pour assurer une répartition du fardeau.Pour maintenir les acquis et développer les services en matière de transport en commun, la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) estime que 23 milliards de dollars doivent être investis d'ici 2020.
«Ce montant comprend 10,3 milliards pour la remise en état des infrastructures et le renouvellement des flottes, puis 4 milliards pour terminer les projets entamés, comme le train de l'est. Il reste ensuite 8,9 milliards destinés aux nouveaux projets, pour atteindre l'augmentation de 40 % de l'achalandage visée par le gouvernement», explique Florence Junca-Adenot, directrice du Forum Urba 2015 au Département d'études urbaines et touristiques de l'UQAM.
Le récent budget Bachand précise que, pour la période 2012-2016, les investissements du gouvernement dans les infrastructures de transport en commun seront de 2,9 milliards.
«C'est le montant pour tout le Québec, précise Mme Junca-Adenot. Là-dedans, environ 2,3 milliards iront à la région de Montréal. On est loin des 23 milliards, et ça ne va pas mieux du côté des villes. Toutefois, pour le réseau routier, on parle d'investissements du gouvernement de 16,5 milliards pour la même période.»
On verra en 2015 l'arrivée du marché du carbone dans le secteur des transports. «Des sommes additionnelles pourront être générées, dont une partie irait au financement du transport en commun si tout fonctionne comme prévu. Toutefois, on est dans les hypothèses, et c'est à très court terme qu'on a besoin de sommes à investir», indique Mme Junca-Adenot.
Taxes et péage sur le territoire de la CMM
La commission du transport de la CMM, créée pour trouver des sources de financement additionnelles, évalue différentes avenues en ce moment. La possibilité de demander une augmentation de la taxe d'immatriculation est notamment étudiée.
«Déjà, les résidants de l'île de Montréal payent 45 $ de plus en immatriculation que les autres résidants de la CMM pour financer le transport en commun. Nous pourrions demander que cela soit étendu à l'ensemble des résidants de la CMM, ce qui nous donnerait 83 millions de plus par année», affirme Gérald Tremblay, président de la CMM et maire de Montréal.
La CMM souhaite aussi que le gouvernement du Québec lui donne le droit de percevoir cinq cents supplémentaires en taxes sur l'essence. «Cela nous donnerait 160 millions de dollars chaque année», précise M. Tremblay.
La commission du transport de la CMM se penche aussi sur le péage régional. «Nous trouvons cela inéquitable qu'on y aille à la pièce avec les péages: le pont de la 25, le futur pont Champlain, etc. Nous évaluons la possibilité de créer un péage régional pour les gens qui circulent sur le territoire de la CMM. Le tarif pourrait être modulé en fonction du nombre de personnes dans la voiture, de la distance parcourue, etc. On investirait les sommes dans le maintien des infrastructures et dans le transport en commun. Cela servirait d'incitatif pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et augmenter l'utilisation du transport en commun», explique Gérald Tremblay.
Les choix du gouvernement du Québec
Florence Junca-Adenot indique, pour sa part, que c'est bien beau d'augmenter les sources de financement dans la région de Montréal, mais qu'il ne faut pas oublier que c'est le gouvernement du Québec qui est le principal investisseur.
«Dans les grands projets comme le prolongement du métro et le tramway, c'est Québec qui ramasse 100 % de la facture. Pour le renouvellement des flottes, Québec paye 75 % et les municipalités, 25 %. Aucun projet ne se fera si le gouvernement du Québec ne trouve pas de solutions», affirme la spécialiste.
Elle croit d'abord que le gouvernement du Québec devrait revoir le partage des sommes récoltées dans son Fonds des infrastructures et du transport en commun (FORT). «Dans le FORT, on met toutes les sommes recueillies par les taxes sur l'essence, l'immatriculation et le permis de conduire et on finance les infrastructures routières et le transport en commun. Bien sûr, il faut entretenir les infrastructures routières, mais il y a aussi du développement qui se fait. Il faut repenser le partage en fonction de nos priorités. Aussi, il faut optimiser les investissements. Par exemple, tant qu'à réparer une route, pourquoi ne pas mettre en même temps une voie réservée aux autobus? Ça ne coûte pas plus cher», explique-t-elle.
Florence Junca-Adenot croit aussi que le gouvernement pourrait aller chercher davantage de sommes pour investir dans le FORT.
«Il pourrait choisir d'augmenter la taxe sur l'essence. C'est une taxe juste, car elle est à l'usage. De plus, le prix du pétrole augmente tout le temps et ça ira toujours en augmentant, alors, aussi bien se doter d'infrastructures de transport collectif qui permettront à tous d'économiser. La congestion coûte très cher», affirme la professeure.
Si elle est contre le péage sur les ponts de Montréal, puisqu'elle craint un affaiblissement du centre-ville, elle serait en faveur d'un péage sur le réseau supérieur à la grandeur du Québec. «On pourrait mettre des péages sur les autoroutes partout où les automobilistes ont une solution de rechange. Cela servirait à financer l'entretien des infrastructures routières et le transport en commun», affirme-t-elle.
La spécialiste mentionne aussi toutes sortes de mesures utilisées à l'étranger, comme les taxes sur les stationnements fournis par les employeurs, la taxe salariale ou encore la contribution payée par les promoteurs immobiliers qui développent des projets près des pôles de transport en commun.
L'analyse des possibilités suggérées par les experts, les élus, les organismes et les citoyens qui participeront à la consultation publique de la commission du transport de la CMM constituera certainement une lourde tâche.
«Toutefois, indique Gérald Tremblay, j'ai bon espoir que, à la fin de ce processus démocratique, les 82 municipalités de la CMM arriveront à s'entendre sur des recommandations unanimes et que, par la suite, le gouvernement du Québec y donnera suite.»
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Collaborateur du Devoir
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