Le Devoir, c'est moi - «C'est la base de mon indépendance d'esprit»

Le colonel Paul Prévost dans un hélicoptère Chinook, à Kandahar.
Photo: Adjudant Roger Bibaud Le colonel Paul Prévost dans un hélicoptère Chinook, à Kandahar.

Faire partie du Devoir, c'est y travailler, l'appuyer, le lire assidûment. De cette communauté, qui s'est construite depuis 100 ans, nous avons retenu quelques portraits. Chaque lundi, nous vous présentons un lecteur, abonné récent ou fidèle parmi les fidèles, comme notre lecteur de cette semaine, que Le Devoir accompagne depuis longtemps... et jusqu'à Kandahar!

Le 12 novembre dernier, le colonel Paul Prévost se rend au Tim Hortons de la base militaire de Kandahar, en Afghanistan, pour cueillir un café avant d'aller faire un saut au gymnase pour s'entraîner. Il est près de 20 h. La journée a été longue, comme toutes les journées dans la poussière et la violence de la guerre afghane. «Ici, tous les jours sont des mercredis. On travaille 7 jours sur 7, et c'est toujours très occupé», explique-t-il par courriel.

Mais en cette soirée du début de l'hiver, un petit cadeau attendait le colonel Prévost, qui est commandant de l'Escadre aérienne de la force opérationnelle canadienne en Afghanistan, soit tout ce qui vole là-bas (hélicoptères, Hercules, drones, etc.). Un exemplaire papier du Devoir traînait sur le coin d'une table à l'extérieur, à côté du Tim Hortons. «C'était l'édition du 5 novembre. Quelqu'un avait dû l'apporter du Canada par un de nos vols», dit-il.

Le 5 novembre, en manchette, sous la plume de la journaliste Hélène Buzzetti, Le Devoir abordait la question des enfants-soldats, comme Omar Khadr. Tout un hasard qu'il se retrouve au coeur de Kandahar! «Avec mon café, je me suis assis et j'ai lu mon Devoir. Quel bonheur!» dit-il, heureux de retrouver le journal papier, une nouveauté depuis son arrivée en Afghanistan le 30 août.

Paul Prévost, 40 ans, a grandi avec Le Devoir à la maison. À la fin des années 70, lors des séjours en famille au chalet, dans les Cantons-de-l'Est, son père envoyait le jeune Paul au dépanneur pour acheter Le Devoir. «La fin de semaine, avant de partir en ski alpin, je devais me rendre à pied à l'auberge pas loin pour chercher les journaux de papa. Mon père me donnait un billet de 2 $, le billet rouge, et je gardais le change qui payait la gomme-balloune pour les pentes!», se souvient-il.

Le Devoir en Saskatchewan


Plus tard à l'adolescence, vers l'âge de 15 ans, le futur militaire se met lui aussi à lire Le Devoir. «Pour moi, c'est une référence. Je l'ai toujours apprécié pour sa pertinence, son format axé sur l'actualité nationale et internationale, avec moins de publicité. Et pour sa qualité, autant en ce qui a trait à la langue qu'au contenu.»

Au début des années 90, il passe d'ailleurs pour un illuminé auprès de ses amis, se faisant livrer Le Devoir jusqu'à Moose Jaw, en Saskatchewan! Paul Prévost suit alors sa formation de pilote d'avion de chasse CF-18. «Internet n'était pas à la mode, et les journaux ne couvraient pas ce que je cherchais, alors je me suis abonné au Devoir du samedi, qu'on me livrait en Saskatchewan en milieu de semaine! Je devais être le seul abonné dans les Prairies.»

Encore aujourd'hui, il cherche le «ton juste» du Devoir. «C'est un journal que je considère comme indépendant, sans programme politique. Certes, il est à mon avis "centre gauche", mais tout de même juste. En le lisant, je fronce rarement les sourcils. Le Devoir me donne son point de vue sans me forcer à y adhérer», dit-il.

Aujourd'hui, ses collègues ne rient plus de lui. Le Devoir a augmenté sa couverture militaire depuis quelques années, de sorte que la communauté de la défense s'y retrouve davantage. «Les gens avec qui je travaille suivent un peu tout ce qui se passe du point de vue géopolitique. Lorsque je prends l'avion, ils m'empruntent mon journal!»

À Kandahar, le colonel Prévost dirige des pilotes et des techniciens au sol. Son équipe est essentielle au fonctionnement de la mission, étant le principal conduit de ravitaillement pour les bases avancées. Vu le rythme de travail, il lit plus souvent Le Devoir dans les revues de presse fournies aux commandants, mais, quand il a le temps, il va sur le site Internet du journal «pour avoir des nouvelles du Québec, mais aussi pour suivre tout ce qui se passe sur les scènes nationale et internationale». Même au loin, un détour par le Québec l'aide à comprendre, dit-il. «C'est la base de mon indépendance d'esprit.»

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