Moisson Montréal: la demande d'aide augmente tandis que l'offre de soutien diminue

Les Montréalais ont de plus en plus faim, mais l'un des organismes qui leur viennent le plus en aide a de moins en moins les moyens de le faire.
C'est l'inquiétant constat qu'a fait hier la directrice générale de Moisson Montréal, Johanne Théroux, en précisant que, pour de nombreuses personnes, le recours à l'aide alimentaire est passé d'une solution de dépannage à une solution permanente.
Plus de 115 000 personnes reçoivent mensuellement l'aide des comptoirs desservis par Moisson Montréal, une augmentation de 2,8 % par rapport à 2008. Près de 40 000 enfants sont de ce nombre; c'est plus du tiers.
De plus, la proportion de travailleurs parmi ceux qui viennent chercher du secours est passée de 10,2 % en 2008 à 15,4 %, soit plus de 5000 personnes cette année.
Alors que la situation économique difficile propulse la demande de manière constante, Moisson Montréal a de plus en plus de mal à trouver des commanditaires. Ses administrateurs se sont rendu compte au fil des derniers mois qu'environ 300 000 $ de contributions attendues ne se matérialiseront pas.
Ils ont lancé un mot d'ordre d'austérité, mais Moisson Montréal n'a jamais été reconnu pour ses dépenses extravagantes.
«C'est la première fois qu'on vit une conjoncture comme celle-là avec une augmentation si importante de la demande conjuguée à une diminution aussi importante de l'offre», a indiqué Mme Théroux lors d'une conférence de presse tenue dans les locaux du Comité social Centre-Sud, qui s'approvisionne chez Moisson Montréal.
«On comprend cette diminution, on la voyait venir, on l'anticipait. Présentement, on doit y faire face, a-t-elle poursuivi. Et malheureusement, il n'y a aucun mécanisme d'ajustement pour nous soutenir dans cette période. Il n'y a pas de plan de sauvetage pour les gens qui sont touchés par la crise économique. Et non plus pour les groupes, dont nous, qui subissons la pression sur le terrain.»
Mme Théroux a précisé que le seul soutien gouvernemental récurrent que reçoit sa banque alimentaire se limite à 75 000 $ par année, un montant qui vient de l'Agence de la santé et des services sociaux de Montréal.
Le budget total de Moisson Montréal est pourtant d'environ 3 millions. Il doit surtout compter sur la générosité ponctuelle d'entreprises, de fondations et d'élus qui puisent dans leurs fonds discrétionnaires.
La plus importante banque alimentaire au pays demande aussi la création d'incitatifs fiscaux pour encourager des donations alimentaires régulières et de qualité en complémentarité à la récupération de denrées, ainsi que la mise sur pied d'un programme de don d'une heure de production de la part de fabricants alimentaires.
C'est donc «un cri d'alarme» et «un cri du coeur» que Mme Théroux a lancé à l'approche de la période des Fêtes «à tous ceux qui sont capables de l'entendre».
Lucien Landry, qui vient quotidiennement manger à la table du Comité social Centre-Sud et qui y est aussi bénévole, a voulu se faire le porte-parole des bénéficiaires de Moisson Montréal en faisant siennes les constatations et revendications de Mme Théroux.
«Les gens viennent plus nombreux, a-t-il lui aussi remarqué au cours des derniers mois. Puis surtout la période difficile financièrement, les pertes d'emplois, les gens viennent et reçoivent ces services-là.»