Accès à l'école anglaise - La loi 104 devant la Cour suprême

La constitutionnalité de la loi 104 sera finalement mise à l'épreuve par la Cour suprême. Le tribunal a indiqué hier qu'il acceptait de se pencher sur le dossier de la controversée disposition qui vise à colmater une brèche de la loi 101.

Adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale en 2002, la loi 104 venait bloquer l'accès à un chemin de traverse permettant à des enfants francophones de fréquenter l'école anglaise. Il suffisait pour les parents d'envoyer leur enfant un an dans une école privée anglaise non subventionnée. Dès la deuxième année, l'enfant pouvait alors intégrer une école anglaise publique, puisqu'il avait fait la majorité de sa scolarité en anglais...

Ce détour astucieux permettait aussi aux frères et aux soeurs du premier rejeton (ainsi qu'à leurs descendants) d'avoir accès à l'école anglaise subventionnée. Quelque 4000 enfants auraient profité de ce trou dans la loi 101 entre 1997 et 2002.

En août dernier, à la suite d'un recours intenté par 26 familles, la Cour d'appel a jugé que la loi 104 contrevenait à la Charte canadienne des droits et libertés. La Cour supérieure et le Tribunal administratif avaient rejeté ce même argument dans le passé.

À la demande du Procureur général du Québec, le jugement de la Cour d'appel a toutefois été suspendu peu après par le juge André Rochon. La cour désirait ainsi permettre à l'État d'aller au bout de ses recours sans que des enfants subissent les contrecoups d'une décision qui aurait pu les obliger à changer d'école.

Soutenu par les deux partis d'opposition, le gouvernement Charest a à ce moment demandé à la Cour suprême de trancher au sujet du dossier. L'acceptation de la requête fait en sorte que le dossier est maintenant officiellement ouvert.

Hier, l'avocat Brent Tyler, qui représente les 26 familles, a indiqué au Devoir qu'il s'attend à ce que le processus total prenne environ deux ans à partir de maintenant. «Nous ne sommes pas surpris, même si mes clients sont un peu déçus. Nous savions que c'était une cause d'importance nationale. Elle pourrait d'ailleurs s'appliquer aux enfants francophones du reste du Canada, puisqu'on parle d'une disposition de la Charte qui s'applique à toutes les minorités de langues officielles.»

M. Tyler déposera dans les prochains jours un appel devant la Cour suprême pour demander la suspension rapide du jugement Rochon, de façon à permettre aux familles concernées d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise dès maintenant.

La ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, a mentionné que le gouvernement était satisfait de la décision de la Cour suprême d'entendre la cause. Aucun autre commentaire ne sera fait tant que le dossier demeure actif devant les tribunaux.

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