Conseillère en immigration victime de ses clients et de la police?
Acquittée d'accusations de fraude et d'escroquerie à l'issue d'un procès acrimonieux, la conseillère en immigration Marie-Claude Montpetit se dit victime d'une enquête «bâclée et biaisée» qui a ruiné sa carrière et sa réputation. Elle a déposé des plaintes en déontologie contre trois policiers de Montréal et elle songe même à déposer une poursuite contre le ministère public.
La Couronne reprochait à Mme Montpetit de s'être fait passer faussement pour une avocate et d'avoir soutiré des sommes d'argent sans rendre de services en retour à Karol Lukacs, un immigrant qui voulait obtenir le statut de résident permanent au Canada, et à sa conjointe canadienne, Maria Stergiou.À l'issue du procès, le juge de la Cour supérieure Robert Marchi a accordé le doute raisonnable à Mme Montpetit, qui assumait seule sa défense. Il n'y avait rien dans la preuve pour conclure que Mme Montpetit avait utilisé frauduleusement le titre d'avocate. Le seul document à cet effet émanait des plaignants, et il fut rédigé à une époque où les relations entre la conseillère en immigration et ses deux clients avaient tourné au vinaigre, un mois avant qu'ils ne portent plainte à la police. Le juge Marchi souligne dans sa décision que le procès s'est déroulé «dans une atmosphère difficile». «Dire que les parties ont développé une inimité mutuelle serait un euphémisme. On devrait plutôt parler d'un incroyable antagonisme mutuel», écrit-il.
Mme Montpetit a témoigné de façon «claire, directe et précise» sur sa relation d'affaires avec Lukacs et Stergiou, a estimé le juge Marchi. Ce ne fut pas le cas de la plaignante. Quant à Lukacs, il n'a pas été entendu. Mme Montpetit a bel et bien effectué du travail préliminaire pour aider Lukacs à obtenir une demande de résidence permanente au Canada, en 2002 et 2003. Elle n'a cependant pas présenté de demande formelle à Immigration Canada, car elle a réalisé durant ses recherches que Lukacs et Stergiou lui avaient transmis des fausses informations sur leur état matrimonial. Mme Montpetit a déposé une plainte auprès du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration du Canada contre Lukacs, plainte qui est restée lettre morte.
Outre les déclarations de Lukacs et Stergiou, la preuve reposait sur des factures de Mme Montpetit que les plaignants ont acheminé aux policiers de Montréal. Or, l'ensemble de ces factures laissent «à tout le moins perplexe», a souligné le juge Marchi. Il y avait en effet 12 modèles pour 15 factures différentes attribuées au bureau de Mme Montpetit. Au surplus, quatre factures, toutes de formats complètement différents, portaient la même date. Lors de son témoignage, l'enquêteur au dossier, Ronald Laferrière, a découvert dans son dossier des documents dont il ignorait la provenance. Aucune perquisition n'a été effectuée au bureau de Mme Montpetit, qui a prétendu en cour qu'elle avait même offert son ordinateur aux policiers pour les fins d'une analyse.
Mme Montpetit a perdu toute sa clientèle en raison de cette affaire, et elle se retrouve aujourd'hui sans emploi. Dans ses plaintes en déontologie, elle affirme que les policiers ont porté des accusations sans fondement contre elle. Mme Montpetit reproche également aux enquêteurs d'avoir gardé pour eux des documents qui l'auraient exonérée de tout blâme. Pour le moment, ces plaintes sont encore à l'étude par le Commissaire à la déontologie policière et restent à l'état d'allégations non prouvées.