400e anniversaire de Québec - Le golf de retour sur les Plaines

Québec — Au cours de la dernière semaine d'août 2008, les plaines d'Abraham redeviendront le terrain de golf qu'elles étaient au XIXe siècle. Avec costumes et bâtons d'époque. Ne manqueront que les vaches et les chèvres pour tondre la pelouse!
«Nous allons reconstituer les trous [les parcours] tels qu'ils étaient à l'époque, mais pas dans un contexte moderne. On veut recréer le terrain tel qu'il était alors», a lancé Richard Laflamme, le président de Golf Tradition Québec 2008, à propos de cet événement associé des Fêtes du 400e.Bien des gens l'ignorent, mais des golfeurs ont frappé des balles sur les Plaines pendant des dizaines d'années jusqu'à ce qu'on transforme le site en parc public à l'occasion... des célébrations du 300e anniversaire de Québec.
Avocat de profession, M. Laflamme est un ancien président du club Royal Québec, qui avait commencé ses activités sur les Plaines en 1874 avant de s'installer dans la banlieue de Boischatel en 1922. Il n'est pas peu fier de dire que son club est «le deuxième plus vieux en Amérique du Nord» et qu'il a le sens de la tradition. «Les parcours sont encore là, ils sont faciles à reconnaître. Le relief des Plaines n'a pratiquement pas changé. On le sait aussi parce que le Royal Québec avait conservé les plans.»
Pendant la semaine du 26 août, les organisateurs ont prévu une série de grands tournois ainsi qu'un concours ouvert au grand public. Lors de ces tournois, les joueurs devront s'exécuter sur un parcours de neuf trous situé entre le musée et la citadelle alors que le grand public sera invité à tenter sa chance sur un petit parcours de trois coups situé à côté du Concorde.
Un des tournois clés de la semaine sera sans contredit cette compétition en costumes opposant «les deux plus vieux golfs en Amérique du Nord», soit le Royal Québec et le Royal Montréal, qui ont respectivement été fondés en 1874 et en 1873. Eh oui, la métropole aura coiffé la capitale d'une petite année. Depuis, les deux clubs s'affrontent tous les ans dans une des deux villes.
On peut donc présumer de la soif de revanche de Québec en cette année de 400e anniversaire... M. Laflamme ne manque pas d'enthousiasme à propos de la rivalité entre les deux clubs: «Écoutez, c'est la plus vieille compétition entre deux clubs sans interruption dans le monde!»
Costumes et tirages
Pour y participer, les joueurs devront participer à un grand tirage. Des coupons seront affichés dans les revues d'amateurs et on en distribuera au sein des clubs à compter du début de la saison, en avril. M. Laflamme prévoit en outre que deux groupes de 72 joueurs pourront s'exécuter chaque jour.
Apparemment, cette manifestation suscite déjà de l'intérêt chez les maniaques de golf à l'étranger. «On a des gens qui appellent des États-Unis et d'Europe. On n'a pas encore fait de publicité, mais il a déjà été question de notre projet dans la revue [spécialisée canadienne] ScoreGolf.»
Les gens devront se costumer et on leur permettra de louer des bâtons d'époque. On a même cherché à retrouver les anciennes balles. «Ce n'était pas possible parce qu'ils utilisaient des balles cousues remplies de plumes d'oie et ça aurait coûté une petite fortune. Mais on a trouvé un producteur californien qui était capable de nous faire des balles dures de la première génération.»
Ceux qui n'auront pas choisi de billet gagnant pourront quant à eux tenter leur chance sur un petit parcours spécial de 110 verges. Avec les bâtons et les balles d'époque, ils devront tenter de le compléter en trois coups, moyennant une dizaine de dollars. Ceux qui y parviendront pourront participer au tirage d'un sac de bâtons à l'ancienne. «Mais s'il y en a qui réussissent le trou d'un coup, pour eux, ce sera un sac automatique!», a assuré M. Laflamme.
Un sport d'anglos
Même si on fait remonter les débuts du golf sur les Plaines à 1874, la légende raconte que tout aurait commencé dès la Conquête, quand des soldats écossais du général Wolfe y auraient frappé quelques balles. Une chose est certaine, cette tradition nous vient de la communauté anglophone. «Il faudra attendre presque la deuxième moitié du XXe siècle pour que les Canadiens français s'intéressent véritablement à la pratique de ce sport», rapporte-t-on sur le site Web du Royal Québec. Et encore! Le club souligne que ses procès-verbaux ont été rédigés en anglais jusqu'au début des années 1970!
Mais en 2008, ce sens des traditions ne justifie pas l'exclusion des femmes, nous dit-on. «Il y aura un après-midi juste pour les femmes. Sinon, ce sera complètement mixte», a souligné l'organisateur, soutenant que l'esprit du «gentlemen only, ladies forbidden» est un phénomène surtout européen. «Ce n'était pas comme ça ici, les femmes jouaient presque dès les débuts.»
Quant à l'entretien des terrains, ces messieurs dames de la bonne société le confiaient aux plus modestes des domestiques... M. Laflamme a rappelé avec amusement que jusqu'à l'apparition, en 1902, du moulin à gazon (l'ancêtre mécanique de la tondeuse), on confiait à des troupeaux de vaches le soin de tondre les parcours. Quant aux verts, ils requéraient encore plus d'attention; ainsi, on attachait des chèvres à proximité afin qu'elles y veillent.
Une preuve de plus du rôle fondateur joué par les animaux dans l'histoire de ce grand parc puisque l'«Abraham» des plaines d'Abraham n'est pas le premier résidant de ce site mais plutôt le premier à avoir eu l'idée d'y faire paître ses bêtes!
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Collaboratrice du Devoir