Régime de négociations dans le secteur de la santé et des services sociaux - Un tribunal invalide la loi 30 adoptée en 2003
Soupir de soulagement dans le milieu syndical: un jugement de la Cour supérieure rendu hier a invalidé la loi 30 qui régissait les négociations et restructurait les pratiques et les unités syndicales dans le secteur de la santé et des services sociaux. Déposée en novembre 2003, la loi 30, qui faisait partie comme d'autres du plan de réingénierie de l'État du gouvernement libéral, était en fait la modification de la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic.
Par cette loi, le gouvernement souhaitait, par exemple, limiter à cinq le nombre d'accréditations syndicales dans un établissement de santé donné et apporter des changements en imposant 26 matières devant être négociées sur le plan local, sans que les travailleurs puissent avoir recours à la grève et à un mécanisme de médiation arbitrale. Les principales associations syndicales avaient aussitôt contesté cette loi devant les tribunaux, alléguant qu'elle violait la liberté d'association, la liberté d'expression, le droit à l'égalité et le droit à des conditions de travail justes et raisonnables.Dans sa décision rendue hier, la cour reconnaît l'objectif du gouvernement du Québec, qui souhaitait simplifier et décentraliser la négociation des conventions collectives, mais elle juge qu'il a ainsi affecté le droit d'association des travailleurs.
Devant cette inconstitutionnalité nouvellement déclarée, la présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) peine à contenir sa joie. «C'est une grande victoire pour la liberté syndicale. Depuis 2003, le gouvernement libéral donnait de grands coups de pied à la démocratie, surtout pendant le temps des Fêtes, à coups de bâillons. C'est réjouissant de voir que la Cour supérieure rappelle que la démocratie passe aussi par le rétablissement des deux droits fondamentaux: celui de l'association et celui de négocier», a souligné Claudette Carbonneau. «J'espère que la leçon sera retenue et que ce sera la fin de l'arrogance du gouvernement à l'égard des salariés de l'État», dit-elle, ajoutant que la motivation et le climat de confiance dans les milieux de travail avaient été grandement affectés. Elle déplore que le gouvernement ait accordé des fins de non-recevoir au Bureau international du travail, qui souhaitait que Québec amende la loi.
Au ministère de la Santé, l'attachée de presse du ministre Philippe Couillard, Isabelle Merizzi, a indiqué que le contentieux du gouvernement étudie la décision qui a été rendue. Québec dispose d'un délai de 30 jours pour déterminer s'il va en appel du jugement.
Si le gouvernement ne portait pas le jugement en appel, il aurait l'obligation de présenter une nouvelle loi dans un délai de 18 mois.
La présidente de la CSN se dit toutefois ouverte à renégocier avec le gouvernement, notamment concernant les 26 matières. «Il y a urgence de créer de l'espoir. Les pots cassés sont énormes et j'invite le gouvernement à réfléchir longuement. Ce sera une belle occasion de redorer le climat de travail», a conclu Mme Carbonneau.
Avec La Presse canadienne