Aux États-Unis - L'affaire des options fait tomber de plus en plus de têtes
New York — L'affaire de l'attribution irrégulière de stock-options aux États-Unis a fait tomber deux nouveaux patrons hier, George Samenuk, p.-d.g. de McAfee, numéro deux mondial des antivirus, et Shelby Bonnie, patron du groupe de médias sur l'Internet CNET, qui suivent ainsi l'exemple d'une trentaine de leurs pairs.
Les autorités américaines ont lancé depuis 2005 une vaste série d'enquêtes auprès de plus de 100 entreprises, surtout dans le secteur de la high-tech, pour sanctionner des fraudes dans la comptabilité des stock-options (options sur actions) commises depuis les années 1990.La Securities and Exchange Commission (SEC), le régulateur boursier, veut s'attaquer à la pratique de l'antidatage, qui consiste à faire coïncider la date de la distribution des options sur achat avec le moment où le cours est le plus bas, pour que les bénéficiaires engrangent un profit maximum.
Une pratique légale, sauf si elle est cachée aux actionnaires ou au fisc, et n'est pas évaluée dans les comptes.
Quelque 140 entreprises ont annoncé publiquement être visées par la SEC ou avoir mis en place des commissions d'enquête internes, dans la plus vaste opération «mains propres» des entreprises américaines depuis des années. Les enquêtes internes des entreprises révèlent que ces pratiques d'antidatage sont très répandues.
Sous la pression, le p.-d.g. et fondateur du plus grand site mondial de recherche d'emplois, Monster, Andrew McKelvey, a démissionné lundi, expliquant ne pas pouvoir consacrer le temps nécessaire à la réévaluation des options sur achat..
Les plus grands groupes et leurs patrons sont mis en cause: l'emblématique patron du groupe Apple, Steve Jobs, a dû s'excuser publiquement début octobre, reconnaissant avoir été au courant de telles pratiques mais sans en avoir profité.
Apple devra revoir ses comptes des années passées et annoncé le départ de son ancien directeur financier.
Autres inculpations
Jusqu'ici l'affaire n'a débouché que sur quelques enquêtes pénales, qui ont frappé l'ancien p.-d.g. du fabricant de logiciels Comverse, Jacob Alexander, récemment arrêté en Namibie, et l'ex-p.-d.g. de Brocade (matériel de télécommunications), Gregory Reyes, ainsi que l'ex-vice-présidente Stéphanie Jensen. Mais de nombreux experts craignent que le scandale n'entraîne d'autres inculpations.
L'affaire ne fait qu'accélérer la valse des dirigeants dans les sociétés américaines, qui devrait atteindre un niveau record cette année ce qui «montre que la pression sur les dirigeants est à son comble», selon le cabinet de ressources humaines Challenger, Gray & Christmas
La SEC a durci les règles sur la comptabilité des options sur achat en 2005, une conséquence de leur place croissante dans les rémunérations des dirigeants.
Selon une récente étude de l'institut The Corporate Library, les p.-d.g. américains de groupes cotés ont vu leur rémunération augmenter de 16 % en 2005 largement à cause d'une inflation des options sur achat.
Elles représentent ainsi plus des trois quarts des rémunérations des dix p.-d.g. les mieux payés. En 2005, 686 p.-d.g. ont exercé des options sur achat contre 659 en 2004.
L'attribution d'options sur achat consiste à donner à une personne des «bons d'achat» d'actions de la société, à un cours fixé à l'avance généralement très inférieur aux cours de Bourse, de sorte qu'en exerçant ces bons d'achat, le bénéficiaire est propriétaire d'actions achetées à très faible prix qu'il peut revendre en Bourse, avec des profits substantiels. L'investisseur milliardaire Warren Buffett, pourfendeur des options sur achat depuis longtemps, a récemment appelé les dirigeants à «résister à la tentation» et prédit qu'un nombre croissant d'entreprises seraient mises en cause.