Amphithéâtre de Québec - Contorsions dans un cadre financier

Le président de Quebecor, Pierre Karl Péladeau, et le maire de Québec, Régis Labeaume, ont tenu un point de presse impromptu, hier, à Québec.
Photo: Agence Reuters Mathieu Bélanger Le président de Quebecor, Pierre Karl Péladeau, et le maire de Québec, Régis Labeaume, ont tenu un point de presse impromptu, hier, à Québec.

Québec — Le maire de Québec Régis Labeaume jure qu'il pourra respecter le budget de 400 millions $ pour l'amphithéâtre. Mais pour cela, Quebecor a dû allonger au moins 30 millions $ de plus et Loto-Québec devra déménager un centre de jeu.

«400, c'est 400», a martelé le maire hier après-midi lors d'un point de presse impromptu auxquels participaient Pierre Karl Péladeau, la ministre responsable du Conseil du trésor, Michelle Courchesne, et le ministre responsable de la capitale, Sam Hamad.

Le maire et Quebecor s'étaient donné jusqu'au 31 mars pour s'entendre sur le détail de ce qu'il y aurait dans l'amphithéâtre, ce qu'on appelle dans le jargon des infrastructures le «programme fonctionnel et technique» (PFT).

Des changements notables ont été apportés pour respecter le cadre financier de 400 millions $ qui a été vendu à la population. D'abord, l'amphithéâtre sera plus petit et fera 64 000 m2, alors que la norme dans la Ligue nationale de hockey (LNH) oscille entre 68 000 et 70 000 m2.

L'espace manquant, la Ville le récupère en avalant son voisin immédiat, le centre de jeux de Loto-Québec, Ludoplex. Ces locaux abriteront notamment les bureaux du locataire Quebecor et de la future équipe.

On a aussi annoncé hier que Quebecor allait investir de 30 à 40 millions $ de plus dans le projet pour financer un studio de production et la régie qui l'accompagnera.

Enfin, le stationnement intérieur de 750 places prévu au départ en comptera plutôt 125, ce qui permettrait d'économiser 3 millions $ de plus.

L'ajout du Ludoplex est «le gros morceau» des modifications apportées au projet, a souligné le maire. En réduisant la taille de l'amphithéâtre, la Ville dit réaliser des économies de 15 à 17 millions $ auxquelles s'ajoutent de 10 à 15 millions $ de réductions des dépenses liés à l'incorporation du Ludoplex.

Reste maintenant à savoir quels seront les coûts de sa relocalisation ailleurs à Québec. Hier, la ministre Courchesne a dit avoir entrepris des «discussions» avec la Ville pour «favoriser» ce déménagement sans fournir davantage de détails sur ses coûts. En 2007, le bâtiment avait coûté 33 millions $ à construire.

Prié de dire si la Ville allait payer sa part du déménagement, le maire a rétorqué que ce n'était «même pas sûr» et lancé qu'en choisissant bien le lieu, Loto-Québec pourrait hausser ses revenus.

À la question de savoir si Loto-Québec devenait ainsi un nouveau «partenaire» de la Ville, la réponse ne s'est pas fait attendre. «Non. On va l'aider à relocaliser, et bonjour, Loto-Québec!»

La semaine dernière, M. Labeaume avait commencé à préparer le terrain du déplacement de Loto-Québec en déclarant dans les médias qu'il était «mal à l'aise» avec sa présence à proximité de l'amphithéâtre. «Il y a un problème social latent, là-dedans», disait-il. «Si le tournoi pee-wee est au nouvel amphithéâtre, ça m'embête un peu d'avoir des machines à sous à l'entrée.»

Ces dernières semaines, les rumeurs allaient bon train quant aux coûts du projet et aux difficultés de l'administration de faire rentrer toutes les dépenses du PFT dans 400 millions $. La nécessité de décontaminer le site initial ou son déménagement forcé avait notamment suscité des inquiétudes.

Pour convaincre les journalistes qu'il respectait le cadre du 400 millions $, le maire a lancé hier une série de chiffres sans fournir de documents à l'appui, tant et si bien qu'il était plutôt ardu de s'y retrouver.

Suivant ses explications, la Ville se serait donné une marge de manoeuvre supplémentaire de 109 millions $ grâce au changement de site vers l'hippodrome (42 M$), à un retour de TVQ (de 35 à 36 M$), l'incorporation du Ludoplex (de 10 à 15 M$), la réduction de la taille de l'amphithéâtre (de 15 à 17 M$) et du stationnement (3 M$).

En revanche, elle s'est imposé 73,5 millions de fonds de réserve pour pallier les imprévus, soit une contingence de construction de 7,5 M, une réserve pour inflation de 18,7 M$, une réserve pour risque de 22,3 M$ et une contingence pour imprévus de 25 M$. Au total, ces réserves correspondent à 18 % du projet total.

À une journaliste qui le pressait de donner le «vrai» coût de l'amphithéâtre et de «garantir le

400 millions», le maire s'est impatienté. «Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, je suis pas ingénieur, moi! Je m'engage à ce que ce soit 400 millions $ avec 73 [ndlr: en réserves], et ainsi va la vie. Écoutez, ça fait des mois qu'on prend des risques et ça marche.»

La façade de l'hippodrome sera détruite et reconstruite

Pour M. Labeaume, l'heure était aux bonnes nouvelles, pas au contraire. «Le rêve est enfin réalité», avait-il lancé dans son discours. Tout sourire, Pierre Karl Péladeau avait dit pour sa part que c'était une «belle journée malgré le mauvais temps» en soulignant, «qu'en plus» c'était la finale de Star académie hier soir.

Aucun des deux hommes n'a voulu faire de commentaires sur les plans de la LNH et l'arrivée d'une équipe. Mais le maire a quand même tenu à souligner que malgré la réduction de la taille de l'amphithéâtre, il serait conforme aux besoins de la Ligue et que Kansas City avait, elle aussi, un équipement de 64 000 m2.

M. Labeaume a également fait savoir que le l'incorporation de la façade de l'hippodrome avait son prix. «Il y a 3 millions $ pour conserver la façade. Les gens veulent qu'on garde la façade, mais elle ne résistera pas au compactage. Il faut la défaire et la reconstruire.»

Enfin, il s'est montré réticent à utiliser à tout prix du bois dans la construction de l'ensemble de l'amphithéâtre. «J'ai moins le goût un peu... Moi je ne ferais pas de spécial pour le bois. Nous, ce qui nous préoccupe, c'est le coût.»

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