Irrégularités à la SHDM - Le vérificateur recommande une enquête policière

Un terrain acheté par la Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM) au coût de 733 000 $ en novembre 2007 a été revendu cinq jours plus tard au promoteur Louisbourg pour la somme d'un dollar. Il s'agit là d'une des transactions examinées par le vérificateur général de la Ville de Montréal dans le cadre de son enquête sur la SHDM. Dans son rapport déposé hier soir au conseil municipal, Michel Doyon recommande que la police soit saisie de l'ensemble du dossier.

À la demande de l'administration Tremblay, le vérificateur a épluché les 20 transactions immobilières réalisées par la SHDM entre le 1er janvier 2007 et le 24 novembre 2008. Cette requête faisait suite au déclenchement, en octobre dernier, d'une enquête interne de la SHDM sur la vente du site Contrecoeur à Construction Frank Catania et à la suspension avec solde de l'ex-directeur général, Martial Fillion.

Le projet immobilier de Contrecoeur a déjà été examiné par la firme KPMG et dans son rapport rendu public en décembre, celle-ci avait relevé de nombreuses irrégularités commises par Martial Fillion. Ce dernier a finalement été congédié. Michel Doyon a tenu compte des conclusions de KPMG et les a incluses dans son rapport. Quant au rapport de Samson Bélair Deloitte & Touche, il sera dévoilé aujourd'hui.

Après cinq mois de travail, Michel Doyon constate que dans plusieurs cas, des immeubles ont été vendus à un prix inférieur à la valeur marchande, que la SHDM a omis de recourir à un processus d'appel d'offres dans le but d'obtenir un meilleur prix et que des transactions ont été conclues sans les autorisations requises.

Certaines transactions paraissent étonnantes. Pour le projet Le Phoenix, la SHDM a acheté de la Ville un terrain situé à l'angle des boulevards Henri-Bourassa et Marcel-Laurin, dans Saint-Laurent, pour 733 000 $ le 30 novembre 2007. Sa première offre, fixée à un dollar, avait d'abord été refusée, note le vérificateur. Le 5 décembre suivant, la SHDM a vendu ce terrain à Constructions Louisbourg, une entreprise co-détenue par Tony Accurso, pour la somme d'un dollar «plus autres bonnes et valables contreparties incluant, entre autres une somme de 33 000 $».

Selon le vérificateur, la transaction «n'a pas été approuvée par un niveau adéquat d'autorité». Les élus l'ont entérinée en basant leur décision sur un document qui omettait de préciser que le terrain serait ensuite vendu au promoteur pour un dollar. De plus, signale M. Doyon, le prix de vente a été déterminé selon une évaluation réalisée deux ans avant la transaction.

Dans le cas de l'immeuble situé au 730 et 780, Brewster, le vérificateur conclut que la vente aurait été faite pour un montant moindre que la «juste valeur marchande» et qu'elle n'a pas été autorisée par le conseil d'administration de la SHDM ni par le comité exécutif de la Ville. D'autres transactions ont été effectuées sans appel d'offres, comme celle concernant l'immeuble du 1401 et 1501, rue Saint-Patrick. Pour le 10, rue King, un prêt de 450 000 $ a été accordé à l'acheteur sans l'autorisation du conseil d'administration de la SHDM, indique le vérificateur.

Tremblay ne commente pas

Michel Doyon formule plusieurs recommandations pour mieux encadrer le processus de vente d'immeubles. Il conclut son rapport en souhaitant que la police se saisisse du dossier afin qu'une enquête plus approfondie soit faite.

Pressé de questions par l'opposition lors de la séance du conseil municipal hier soir, le maire Gérald Tremblay a refusé de se prononcer sur le rapport, disant ne pas avoir pu en prendre connaissance. En marge de l'assemblée, le chef de l'opposition, Benoit Labonté, a signalé que la demande du vérificateur pour une enquête policière constituait une première dans les annales municipales. «D'après ce que le rapport nous laisse entendre, toutes les transactions ont fait perdre de l'argent, soit à la SHDM ou à la Ville de Montréal. Des actions doivent être prises par la Ville pour tenter de récupérer les sommes perdues. Pas besoin d'attendre l'enquête policière pour ça», a-t-il dit.

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