Montréal est ralenti dans sa volonté de réduire la vitesse sur l'île

En décembre dernier, le responsable du transport collectif et de l'aménagement urbain à la Ville de Montréal, André Lavallée, croyait bien qu'il pourrait, rapidement et simplement, réduire les limites de vitesse sur toute l'île de Montréal. Dans le cadre des consultations sur le projet de loi sur la sécurité routière, la ministre des Transports, Julie Boulet, avait alors indiqué qu'elle accédait à la demande de la Ville. Mais Montréal avait crié victoire un peu trop vite.

Réduire la vitesse de la circulation à 40 kilomètres à l'heure dans les zones résidentielles sur l'île de Montréal s'avère une tâche plus complexe que prévu pour la ville centrale. L'administration Tremblay-Zampino n'a pas obtenu du gouvernement du Québec l'amendement législatif qu'elle souhaitait pour appliquer ce principe. Elle doit, de plus, composer avec l'indignation du maire de Côte-Saint-Luc, Anthony Housefather, qui estime que Montréal n'aurait pas dû se faire le porte-parole de l'agglomération auprès de la ministre des Transports.

En décembre, lors de la commission parlementaire, la ministre Boulet avait dit être tout à fait d'accord avec la demande de la Ville de Montréal qui voulait appliquer à l'ensemble du territoire de l'agglomération une limite de vitesse par défaut de 40 km/h dans les zones résidentielles, relate M. Lavallée. Il était également établi que la limite dans les zones scolaires serait maintenue à 30 km/h et que celle sur les grandes artères demeurerait à 50 km/h. Telle était «l'entente de principe» convenue avec la ministre, ajoute M. Lavallée.

«Quand on a pris connaissance des modifications à la loi à la fin janvier, on a découvert que le gouvernement avait apporté une modification technique, qui facilite les choses aux villes du Québec en général, mais qui ne règle pas la situation pour l'agglomération, de façon simple», déplore M. Lavallée. La Loi sur la sécurité routière adoptée en décembre à Québec prévoit que les municipalités peuvent, à leur guise, déterminer les limites de vitesse sur leurs territoires sans devoir demander l'approbation préalable du gouvernement, mais elle ne prévoit rien qui puisse satisfaire la Ville de Montréal. «Ça nous renvoie à des décisions et à des démarches relevant de chacune des villes et de chacun des arrondissements de l'île. C'est une approche qui est beaucoup plus compliquée», indique M. Lavallée.

Une approche globale pour le territoire de l'île éviterait l'ajout de 11 000 panneaux dans la métropole, précise M. Lavallée, qui croit aussi qu'il s'agit d'une question de sécurité.

André Lavallée soutient que, la semaine dernière, la ministre maintenait toujours son accord de principe, mais qu'une ville liée avait signifié son objection, soit Côte-Saint-Luc. Cette contestation l'a étonné puisque la réduction des vitesses sur l'île avait fait l'unanimité au sein des commissions permanentes sur les transports de la Ville de Montréal et de l'agglomération. «C'est un difficulté imprévue qu'on essaie de régler le plus rapidement possible», a-t-il dit hier.

Frustration

D'entrée de jeu, le maire de Côte-Saint-Luc affirme ne pas être opposé à l'idée de réduire à 40 km/h la vitesse dans les rues résidentielles de sa ville, mais ce qui le dérange, c'est l'attitude d'André Lavallée. Il lui reproche d'avoir adressé sa demande à la ministre comme s'il parlait au nom des villes liées. «Il n'a aucun droit de parler au nom de l'île de Montréal sans nous consulter, soutient M. Housefather. S'il veut avoir l'approbation des autres villes pour qu'on fasse une proposition conjointe à la ministre, il devrait nous parler. Nous serons certainement très ouverts à l'égard d'une proposition visant à abaisser la vitesse à 40 km/heure de façon générale.»

M. Housefather insiste: ce sont les villes elles-mêmes qui doivent déterminer quelle limite doit être appliquée à chaque rue, que ce soit 30, 40 ou 50 km/h, car ce sont elles qui connaissent le mieux leur réseau routier. «Ce que la mairesse Karin Marks [Westmount] et moi lui avons dit la semaine dernière, c'est de rédiger une lettre conjointe avec les villes liées en établissant les règles pour que ce ne soit pas un pouvoir de l'agglomération.»

Simple incident diplomatique? M. Lavallée évoque une certaine «incompréhension» qu'il dit vouloir dissiper. Mais M. Housefather croit que cet événement illustre bien les difficiles relations entre Montréal et les villes liées au sein de l'agglomération: «Je trouve ça malheureux parce que nous sommes supposés être des partenaires.»

Reste que de nombreuses villes défusionnées, tout comme deux arrondissements montréalais, soit Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce et LaSalle, ont déjà réduit les limites de vitesse sur leurs territoires, qu'il s'agisse de Westmount, de Mont-Royal, de Beaconsfield ou de Pointe-Claire. La Ville de Dorval est également en voie de les imiter et, à Côte-saint-Luc, la question sera discutée au sein des élus très prochainement. Pour sa part, André Lavallée soutient que son objectif est d'en arriver «à une solution simple le plus vite possible».

La question des limites de vitesse figure également dans le rapport de l'Office de consultation de Montréal sur le plan d'action famille de la Ville rendu public hier. On y fait écho aux préoccupations de divers participants aux consultations qui estiment que la vitesse, de façon générale à Montréal, devrait être réduite à 30 km/heure. La Direction de la santé publique de Montréal avait notamment fait valoir que la gravité des blessures et le nombre de décès chez les piétons chutaient de façon importante lorsque la vitesse d'impact était abaissée.

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