Québec - Les archéologues sont rassurés par le maire Labeaume
Le groupe d'archéologues qui avait sonné l'alarme concernant l'état du site archéologique de l'îlot des Palais est rassuré. Dans une lettre envoyée cette semaine, le maire Régis Labeaume a promis que la Ville ferait le nécessaire pour préserver le chantier.
Québec — Dans une lettre datée du 22 février, le maire, qui est actuellement en vacances, explique «qu'il n'est aucunement question pour la Ville de laisser les vestiges archéologiques se détériorer» et que les «mesures de protection appropriées» seront prises. La pose d'une membrane perméable, écrit-il, a permis dernièrement de «réduire au minimum» les infiltrations d'eau et des «mesures plus permanentes» sont prévues pour le printemps.Lancée à l'époque de la mairesse Boucher, la construction du Centre d'interprétation de l'îlot des Palais — et le site archéologique qu'il abrite — a été abandonnée par le maire Labeaume à son arrivée au pouvoir parce qu'il la jugeait trop coûteuse.
Dans une lettre aux médias, les archéologues Réginald Auger, Allison Bain, Marcel Moussette et James Woollet s'indignaient récemment de «la désinvolture avec laquelle on a procédé à cet abandon "temporaire du site" en plein hiver, à un moment où les effets des éléments et des conditions climatiques atteignent leur point culminant».
Or il appert que la lettre du maire a suffi à les rassurer. «C'est une lettre très, très positive. Ça montre que la Ville est sensible à la gestion du site en ce moment, a expliqué au Devoir Allison Bain, l'archéologue qui supervise les fouilles pour l'Université Laval. À mon avis, le site est en assez bon état actuellement.»
Un grand moment pour l'archéologie au Québec
Indépendamment du projet de centre d'interprétation, l'université fait des fouilles sur le site depuis 1982. Encore cet été, une vingtaine d'étudiants creuseront le sol à la recherche d'artefacts. L'îlot des Palais regroupe les sites des deux palais de l'intendant, véritables centres administratifs de la colonie à partir de 1668.
Le projet d'en faire un lieu patrimonial était dans les cartons de la Ville depuis belle lurette quand la mairesse Boucher a décidé de se l'approprier et d'en faire le legs de la Ville à elle-même pour le 400e. À l'origine, 40 millions de dollars devaient être investis dans la construction d'un centre d'interprétation sur le site archéologique du premier palais et dans la reconstitution — beaucoup plus ambitieuse — du second palais.
Confrontée à la menace d'un dépassement des coûts, la mairesse avait déjà abandonné la deuxième phase du projet quand M. Labeaume a pris le pouvoir. On parlait dès lors d'investissements de 18 millions de dollars.
Dans sa lettre aux archéologues, le nouveau maire signale que «le projet n'est pas abandonné» mais que la Ville «est à la recherche d'un financement par les gouvernements supérieurs et le secteur privé pour les poursuivre».
Mme Bain souhaite ardemment que cela se réalise. «Nous avons trouvé énormément de choses. Les gens ne le savent pas? C'est justement ce qui arrive quand ce n'est pas mis en valeur.» On aurait découvert notamment dans les latrines attenantes au palais de nombreux morceaux de céramique, des faïences. «Nous avons aussi trouvé les traces d'une palissade qui faisait partie des anciennes fortifications en bois de la ville.»
Allison Bain signale par ailleurs qu'avec les fouilles du site Cartier-Roberval et celles du fort Saint-Louis, près du Château Frontenac, la ville est le siège «d'un moment important dans l'archéologie au Québec».
En effet, les archéologues exhumeront cet été les ruines du fort Saint-Louis qu'avait fait construire Champlain près de l'emplacement actuel du Château Frontenac. Ce lieu qui allait servir de résidence au chef politique de la Nouvelle-France, le gouverneur, était ainsi juste en haut de la côte qui voisinait avec le palais du numéro deux de la colonie, l'intendant. À partir de mai, le public pourra d'ailleurs visiter le site du fort, où on a déjà découvert de nombreux artefacts.
Et, comme si ce n'était pas assez, les archéologues retourneront cet été fouiller les sols de Cap-Rouge, à l'emplacement des forts construits par Cartier et Roberval dès le XVIe siècle. On peut d'ailleurs déjà suivre l'état des fouilles sur le Web à cette adresse: http://www.cartier-roberval.gouv.qc.ca/. Bref, résume Mme Bain, «en ce moment, il y a des projets sur les trois sites les plus importants de la Nouvelle-France; on ne peut pas demander mieux que ça»!