Confusion au sujet de l'aide aux mal-logés

Les ménages qui ont bénéficié d'une aide d'urgence pour se reloger au moment de la crise du logement pourraient devoir payer le plein prix pour leur loyer le 1er juillet prochain. La Ville de Montréal s'inquiète de ce qui adviendra aux 2400 ménages à faible revenu qui bénéficient du programme de supplément au loyer d'urgence et presse la ministre de reconduire temporairement le programme.

La Société d'habitation du Québec (SHQ) a demandé cet automne aux offices municipaux d'habitation (OMH) d'informer les bénéficiaires du programme de supplément au loyer d'urgence que l'aide gouvernementale prendra fin à l'expiration de leur bail. La lettre transmise par la SHQ précisait par ailleurs que les règles pour demander un HLM avaient été modifiées pour faciliter l'accès des mal-logés du 1er juillet.

Le Devoir a appris que l'Office d'habitation de Montréal, qui compte près de 2500 ménages bénéficiant du programme, a cependant refusé de transmettre la lettre, exigeant davantage d'information sur ce qui adviendra aux locataires au-delà du 1er juillet.

Quelque 4100 ménages bénéficient actuellement du programme, renouvelé année après année depuis 2001, qui fait en sorte qu'ils ne paient pas plus de 25 % de leur revenu pour se loger. C'est le gouvernement qui assume la différence, pour une facture de près de 20 millions.

Le responsable du Logement à la Ville de Montréal, Cosmo Maciocia, a écrit récemment à la ministre des Affaires municipales pour la convaincre de reconduire le programme. «Il y a près de 2500 ménages qui bénéficient du supplément au loyer à Montréal; s'ils doivent payer le plein montant à l'expiration du bail, on va se retrouver avec une situation délicate. Cela nous prendrait au moins trois ans pour reloger ces gens dans les HLM», fait valoir M. Maciocia, soulignant que l'intégration de ces 2500 ménages viendra retarder l'entrée des 23 000 ménages déjà sur la liste d'attente pour des logements sociaux.

L'Office municipal d'habitation de Sherbrooke s'est lui aussi abstenu de transmettre la lettre. «On ne voulait pas créer une panique autour de cela», explique le porte-parole de l'Office, Léon Deschamps.

À la SHQ, on prétend que l'envoi d'une telle lettre constitue une opération de routine. «Ce n'est jamais reconduit de façon automatique. Chaque année, les gens sont informés que le programme d'aide d'urgence prend fin avec le bail. Ce qui ne veut pas dire qu'il ne peut pas être reconduit», explique le porte-parole de la société d'État, François Gaumond.

La porte-parole de l'OMH de Montréal, Louise Hébert, nuance cependant ses propos, soulignant que par le passé on envoyait une lettre plus tard dans l'année pour informer les ménages qu'ils pouvaient renouveler leur demande d'aide.

Le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques et porte-parole péquiste en matière d'habitation, Martin Lemay, juge la façon de faire de la SHQ plutôt «cavalière». «Il n'y a aucune mesure de transition prévue pour aider les gens à se reloger. Ils se retrouvent devant rien. Peut-être que le taux d'occupation des logements a baissé, mais les logements ne sont pas plus abordables», déplore M. Lemay.

C'est aussi l'avis de François Saillant, du Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU). «Si on coupait les vivres tout de suite, ce serait le désastre. Les gens ne peuvent pas se permettre d'attendre deux ou trois ans dans un logement à plus de 700 $ avant d'avoir accès à un HLM», plaide M. Saillant.

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