«Dans les traces de René Lévesque»

Louis Bernard, collaborateur de la première heure de feu René Lévesque, a officiellement lancé hier sa campagne à la direction du PQ. Son slogan: «Un homme solide, un Québec solidaire.»
Photo: Louis Bernard, collaborateur de la première heure de feu René Lévesque, a officiellement lancé hier sa campagne à la direction du PQ. Son slogan: «Un homme solide, un Québec solidaire.»

Louis Bernard marchera sur les pas de René Lévesque, dont il veut terminer l'oeuvre en conviant les Québécois à un référendum sur l'indépendance dans les plus brefs délais.

M. Bernard a donné le coup d'envoi officiel de sa campagne à la direction du Parti québécois (PQ) hier devant 125 partisans réunis au théâtre Corona. L'ancien chef de cabinet de M. Lévesque a révélé en primeur la question qu'il posera à la population s'il est élu premier ministre. «Acceptez-vous que le Québec devienne un pays indépendant et souverain? Oui ou non.»

«L'heure de la grande décision approche. Avec moi, l'indépendance, ce ne sera pas une aventure. Ça va être une entreprise bien préparée, bien planifiée.

Il n'y aura pas de surprise», a lancé M. Bernard sous les applaudissements.

«Il suffit de dire "René Lévesque" pour se remettre, tout le monde, à espérer», a dit M. Bernard, qui a collaboré avec le fondateur du PQ pendant une vingtaine d'années. «J'ai vu son authenticité, son amour des petits, son aisance avec les grands. J'ai vu sa ferveur, sa passion pour le Québec. Pour moi, René Lévesque, c'est un modèle, c'est une inspiration», a-t-il confié.

«Mon seul espoir, c'est de marcher dans les traces de René Lévesque et de terminer son oeuvre», a-t-il ajouté en présence de Robert Burns, Michel Carpentier, Richard Guay, Jean-Guy Rodrigue et Jean-Roch Boivin, tous des vétérans de cette époque révolue, venus appuyer M. Bernard.

Louis Bernard a exprimé l'intention de faire de l'indépendance un enjeu central de la prochaine campagne électorale et d'organiser un référendum dès le premier mandat du PQ. Une majorité de 50 % plus une voix lui suffirait pour introduire le Québec au concert des nations. «Notre objectif politique, c'est d'avoir la majorité la plus haute possible», a-t-il précisé.

Solide et solidaire

M. Bernard a reproché au gouvernement Charest de «gaspiller» l'héritage progressiste de la Révolution tranquille «en essayant de revenir en arrière». Il mène sa course à la direction du PQ avec un slogan accrocheur, «Un homme solide, un Québec solidaire».

M. Bernard a fait de la solidarité et de la lutte contre la pauvreté et le décrochage scolaire des thèmes privilégiés, ce qui lui a valu l'appui du député Camil Bouchard, identifié à l'aile progressiste du Parti québécois. «La richesse, c'est une oeuvre collective. Il n'y aurait pas de patrons s'il n'y avait pas d'ouvriers. Par conséquent, il faut que le fruit de ce travail collectif soit réparti équitablement», a expliqué M. Bernard. Il rêve d'une société qui se préoccupera du sort des démunis et de l'égalité des chances.

Selon Camil Bouchard, Louis Bernard se démarque des autres candidats à la succession de Bernard Landry. «La qualité de la candidature nécessitait un appui immédiat, a dit M. Bouchard hier. C'est un homme clair, limpide, simple, honnête, authentique.» Autant de qualités qu'il recherche dans un chef d'État.

À l'exception de Camil Bouchard, aucun député péquiste ne s'est rangé derrière Louis Bernard. «Très franchement, les réactions que j'ai de mes collègues au caucus sont toutes très sympathiques. Les gens m'ont dit: "C'est une candidature extrêmement intéressante"», a toutefois affirmé le député de Vachon.

Cinq députés du Bloc québécois ont aussi appuyé M. Bernard, dont Yvan Loubier. Celui-ci a croisé M. Bernard au comité du NON lors du référendum de Charlottetown et a aussi fait appel à son expertise en matière de revendications autochtones. «J'ai vu comment cet homme-là opérait. C'est un gars solide. Il n'y a personne qui connaît autant et aussi bien la machine gouvernementale à Québec. Il ne parle pas avec une langue de bois, il est très simple, et je le crois capable de rassembler toutes les générations», a dit M. Loubier.

Louis Bernard est entré dans la fonction publique en 1964. À titre de grand commis de l'État et ensuite comme chef de cabinet de M. Lévesque, il a participé à tous les débats et toutes les décisions importantes au Québec, notamment en ce qui a trait à la réforme électorale et le financement des partis. Après 23 années au service de l'État, il s'est joint à la haute direction de la Banque Laurentienne de 1987 à 1998. Lors de sa retraite, le gouvernement a fait appel à son expertise pour les négociations avec les autochtones, les fusions municipales dans l'île de Montréal et le financement des transports en commun. Malgré son parcours relativement anonyme dans l'oeil public, il va vite gagner en popularité, prévoit M. Loubier. «On va reconnaître quelqu'un de solide, franc et social-démocrate.»

Louis Bernard a recueilli environ le tiers des 1000 signatures nécessaires pour être admis dans la course qui culminera avec l'élection d'un nouveau chef le 15 novembre. Seul Richard Legendre s'est acquitté de ce devoir pour le moment. M. Bernard espère y parvenir «d'ici quelques semaines».

La course à la direction du PQ compte sept autres candidats: Pauline Marois, André Boisclair, Jean Ouimet, Jean-Claude St-André, Ghislain Lebel, Hugues Cormier et Gilles Hébert. De sourdes mais persistantes rumeurs envoient dans la mêlée le chef sortant, Bernard Landry.

M. Landry se laisse tenter par les appels nombreux et pressants en faveur de son retour. Il a même consulté deux vieux routiers du parti, les anciens ministres Denis Lazure et Yves Michaud, qui l'ont incité à reprendre du service. Bernard Landry a claqué la porte du PQ lors du congrès du 4 juin après avoir obtenu un vote de confiance de 76,2 % des délégués.

Louis Bernard n'a pas voulu commenter ce revirement inattendu. Yvan Loubier presse cependant l'ex-premier ministre de clarifier sa position. «Ça brouille pas mal les cartes et ça dessert cette course au leadership. Au plus vite, qu'on se branche dans le camp Landry.»

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