Le PQ rejette l’absolution donnée à Fitzgibbon pour sa partie de chasse au faisan

Le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, à l’Assemblée nationale, le 26 avril dernier
Jacques Boissinot La Presse canadienne Le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, à l’Assemblée nationale, le 26 avril dernier

Le Parti québécois a rejeté jeudi les conclusions d’un rapport éthique qui accorde une absolution au ministre de l’Économie et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, à la suite d’une partie de chasse au faisan controversée dans un club privé appartenant à des gens d’affaires fortunés.

Tout comme le Parti libéral et Québec solidaire, le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, a du même souffle réclamé une réouverture du code d’éthique afin d’en préciser plusieurs aspects, concernant notamment les cadeaux reçus par les élus dans le cadre d’une relation privée.

M. St-Pierre Plamondon a exprimé sa surprise quant aux conclusions de la commissaire à l’éthique, Ariane Mignolet, dont le rapport d’enquête déposé mercredi conclut que M. Fitzgibbon n’a commis aucun manquement.

« Bien que je respecte son pouvoir et ses compétences, je ne partage pas ses conclusions », a-t-il dit en conférence de presse.

Dans le document, Mme Mignolet affirme que la partie de chasse de M. Fitzgibbon s’est déroulée dans un cadre privé où, après enquête, elle n’a relevé aucune preuve de conflit d’intérêts.

En octobre 2022, M. Fitzgibbon s’est rendu en hélicoptère sur une île du lac Memphrémagog, à l’invitation de l’homme d’affaires Maurice Pinsonnault, que la commissaire décrit comme une « connaissance » du ministre.

 Pierre Fitzgibbon n’a rien eu à payer durant sa journée de chasse. Le transport, les munitions, les goûters, les repas, les rafraîchissements et les cocktails étaient à la charge de ses hôtes.

Même si elle estime la valeur de cette invitation à plus de 200 $, seuil minimal qui oblige les élus à déclarer tout cadeau, Mme Mignolet conclut que le ministre n’avait pas à le faire puisque tout s’est déroulé dans le contexte d’une relation privée.

Jeudi, M. St-Pierre Plamondon s’est interrogé sur la définition de relation privée qui a mené la commissaire à tirer cette conclusion. Selon lui, des liens privés ne devraient pas empêcher la divulgation d’un tel cadeau.

« On voudrait nous faire croire que quelqu’un qui se fait offrir un voyage de chasse qui vaut plusieurs milliers de dollars, auprès de quelqu’un qui obtient des contrats de l’État pour environ 100 000 $, ça, il n’y a pas de problème, dans le contexte où M. Fitzgibbon n’en est pas à sa première histoire avec les questions d’éthique », s’est-il désolé.

M. St-Pierre Plamondon croit que cette décision ouvre la porte à des problèmes de transparence concernant les cadeaux que les élus de l’Assemblée nationale reçoivent.

« Je ne comprends pas comment on va faire, à l’avenir, pour interpréter la notion de lien privé », a-t-il dit.

Revoir le code

 

À la lumière des conclusions du rapport, le chef péquiste a ouvert la porte à des discussions qui pourraient mener à une clarification du code d’éthique.

« J’aurais eu des conclusions différentes, a-t-il souligné. Maintenant, peut-être qu’on peut, par voie législative, clarifier ces choses-là. »

Le chef libéral intérimaire, Marc Tanguay, a affirmé que sa formation s’était déjà prononcée en faveur de l’étude d’un rapport de Mme Mignolet sur la mise en oeuvre du code, dans lequel elle proposait des modifications, en 2019. Il a rappelé que le premier ministre François Legault s’est montré ouvert à revoir le code quand certaines de ses dispositions ont valu un blâme à M. Fitzgibbon en raison d’actifs qu’il détenait.

« Il faut bonifier le code d’éthique », a répété M. Tanguay.

Contrairement au PQ, M. Tanguay n’a pas contesté les conclusions de Mme Mignolet au sujet de la partie de chasse de M. Fitzgibbon. Il a souligné une mise en garde qu’elle a formulée dans son rapport où elle invite le ministre à se prémunir contre les risques d’apparence de conflits d’intérêts lorsqu’il se rendra à nouveau, comme il en a l’intention, chasser le faisan sur l’île, une décision qu’elle a qualifiée de « terrain hasardeux ».

« François Legault et M. Fitzgibbon, eux, semble-t-il, n’en ont rien à cirer », a-t-il dit en référant à l’accueil débonnaire que M. Legault a réservé mercredi au rapport d’enquête et à celui de M. Fitzgibbon, qui a refusé de changer quoi que ce soit dans sa façon de procéder.

La députée de Québec solidaire Ruba Ghazal s’est elle aussi rangée derrière les conclusions de Mme Mignolet. Elle a cependant affirmé qu’elles peuvent susciter des inquiétudes.

« Ça n’augmente pas la confiance du public envers nos institutions qui sont mises à mal, a-t-elle dit. Moi, c’est ça qui m’inquiète. Et M. Legault doit être inquiet de ça au lieu de faire des blagues sur la chasse au faisan. »

Mme Ghazal a elle aussi rappelé qu’elle aimerait « dépoussiérer le code d’éthique ».

« Il faut le revoir, a-t-elle dit. Mme Mignolet a fait des recommandations depuis 2019, et la bonne chose à faire, ce serait qu’on l’invite en commission. »

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