Charest dit avoir subi des dommages irréparables à cause des fuites de l’UPAC

« Pour le prix d’une feuille de papier, d’une enveloppe et d’un timbre, j’aurais accepté que cette affaire, quoique grave, soit réglée, a dit Jean Charest. Cette demande d’excuses n’a jamais fait l’objet d’un accusé de réception. »
Justin Tang La Presse canadienne « Pour le prix d’une feuille de papier, d’une enveloppe et d’un timbre, j’aurais accepté que cette affaire, quoique grave, soit réglée, a dit Jean Charest. Cette demande d’excuses n’a jamais fait l’objet d’un accusé de réception. »

L’ex-premier ministre libéral Jean Charest s’est plaint, mercredi, d’avoir subi des dommages irréparables en raison des fuites de l’enquête Mâchurer menée par l’Unité permanente anticorruption (UPAC).

M. Charest a affirmé qu’une décision rendue en sa faveur par la Cour supérieure, mardi, n’efface pas les torts qu’il a subis par la publication de ses renseignements personnels dans les médias.

« Pour ma famille et moi, les dommages causés par cette affaire sont irréparables », a-t-il affirmé dans une déclaration écrite.

L’ex-élu réclame toujours des excuses du gouvernement, qu’il accuse d’avoir manqué à ses obligations en matière de protection de sa vie privée.

« Pour le prix d’une feuille de papier, d’une enveloppe et d’un timbre, j’aurais accepté que cette affaire, quoique grave, soit réglée, a-t-il dit. Cette demande d’excuses n’a jamais fait l’objet d’un accusé de réception. »

En 2022, l’UPAC a fermé l’enquête Mâchurer, qui portait sur le financement du Parti libéral du Québec (PLQ), sans que des accusations soient portées contre M. Charest ou les autres personnes qui étaient visées par l’enquête, dont le collecteur de fonds Marc Bibeau et la directrice du financement Violette Trépanier.

Mercredi, M. Charest a affirmé qu’il attend les résultats d’une enquête du Bureau des enquêtes indépendantes qui doit faire la lumière sur la manière dont les fuites se sont produites.

La Cour supérieure du Québec a accordé mardi à M. Charest un dédommagement de 385 000 $, à la suite d’un recours qu’il avait intenté en 2020 en raison des fuites.

Dans sa décision, le juge Gregory Moore conclut que l’incapacité de l’UPAC de « respecter plusieurs lois qui protègent les renseignements personnels et les informations conservées aux dossiers d’enquête constitue une faute lourde ».

En 2014, Radio-Canada avait révélé l’existence de l’enquête Mâchurer en précisant qu’elle s’intéressait à l’implication de M. Charest dans le financement du PLQ. Le Journal de Montréal a publié plusieurs reportages sur le sujet de 2017 à 2018.

Dans sa décision, le juge Moore avance le chiffre de 54 fuites, qui se sont étalées de 2012 à 2018.

Excuses pas exclues

Le premier ministre François Legault n’a pas exclu la possibilité que le gouvernement présente des excuses à M. Charest, dont le gouvernement a nommé le premier commissaire de l’UPAC, Robert Lafrenière.

« Il y a eu des fuites à l’UPAC sous la gestion de M. Lafrenière, qui a été choisi par le gouvernement libéral. La question qui se pose est de savoir : est-ce que moi, je dois faire des excuses au nom du gouvernement libéral qui a nommé M. Lafrenière ? Je n’exclus pas ça, mais on va analyser ça. »

Le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, n’a pas donné d’indication sur l’intention du gouvernement d’en appeler ou non du jugement.

Le chef intérimaire du PLQ, Marc Tanguay, s’est plaint que la marque de la formation politique avait été entachée par les fuites de Mâchurer.

« Toutes ces fuites-là auront nui à la marque libérale, c’est très clair », a-t-il dit.

M. Tanguay n’a pas voulu attribuer aux fuites de l’UPAC l’entière responsabilité des défaites qui ont précipité le PLQ à des niveaux d’appuis historiquement bas, dans l’électorat.

« Le résultat de la dernière élection, je n’irai pas vous dire que c’est à cause des 54 fuites de l’UPAC, mais il est clair que ça n’a pas aidé, ç’a nui », a-t-il dit.

Le député du Parti québécois, Pascal Bérubé, a estimé que la marque libérale avait notamment souffert des révélations de la Commission Charbonneau.

« Je pense que l’essentiel des éléments importants qui touchent le Parti libéral sur cette question-là sont arrivés après le départ des libéraux », a-t-il dit en évoquant la défaite du PLQ en 2012.

Corruption

Le co-porte-parole de Québec solidaire (QS), Gabriel Nadeau-Dubois, a affirmé que la population québécoise devrait recevoir des excuses pour les dysfonctionnements de l’UPAC qui ont empêché de voir clair dans les pratiques du PLQ.

« On a créé l’UPAC pour attraper les bandits et remettre de l’argent dans les coffres de l’État et finalement, on n’a pas attrapé grand monde et on remet de l’argent dans les poches de Jean Charest », a-t-il déploré.

Le député de QS a affirmé que le PLQ a contribué lui-même à ternir sa marque de commerce.

« Ce qui a terni la marque libérale, c’est les moeurs politiques du Parti libéral, sa manière de faire de la politique, c’est les multiples scandales de corruption qui ont éclaté pendant que ce parti gouvernait le Québec, c’est ce qui a fait mal à la marque libérale », a-t-il dit.

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