Le Curateur public appelé à mieux surveiller les tutelles privées

Le Protecteur du citoyen, Marc-André Dowd, souligne les améliorations et initiatives amorcées par le Curateur public afin de mieux surveiller les tutelles privées. Mais il reste encore du chemin à faire, estime-t-il.
Jacques Boissinot La Presse canadienne Le Protecteur du citoyen, Marc-André Dowd, souligne les améliorations et initiatives amorcées par le Curateur public afin de mieux surveiller les tutelles privées. Mais il reste encore du chemin à faire, estime-t-il.

Le Curateur public, qui veille à la protection des Québécois inaptes, a parfois tardé à agir lors de situations d’abus financiers envers des adultes placés sous tutelle privée, constate le Protecteur du citoyen dans une enquête dévoilée jeudi.

Dans le cas d’abus financiers supposés ou avérés, l’organisme gouvernemental a aussi parfois pris des mesures inadéquates, a effectué un suivi insuffisant ou a fait preuve d’autres omissions, peut-on lire dans le rapport spécial Sous tutelle, mais toujours vulnérables : protéger les avoirs des majeurs inaptes sous régime de protection privé.

À l’heure actuelle, près de 9400 adultes québécois ont un tuteur privé, soit un proche désigné pour agir en leur nom. « Dans la grande majorité des cas, tout se passe bien », a souligné le Protecteur du citoyen, Marc-André Dowd, lors d’un point de presse à l’Assemblée nationale. Il existe toutefois des cas d’abus, de mauvaise gestion ou d’erreurs commises de bonne foi, a-t-il ajouté.

« On nous dit que lorsque le Curateur public a connaissance de telles situations, il prend parfois des mois pour intervenir », a-t-il affirmé.

Disparités

Le rapport soulève le cas d’une personne inapte qui a reçu un héritage en 2012. Deux ans plus tard, des membres de sa famille — dont son tuteur — sont partis en voyage avec celle-ci, mais à ses frais. Le représentant légal n’a été remplacé qu’en 2019, après plusieurs manquements constatés par le Curateur public. « Oui, la personne représentée était là, en voyage, mais est-ce que c’était à elle de payer pour tous les membres de la famille ? » a soulevé Marc-André Dowd.

Ce dernier souligne que le Curateur public représente bien souvent le « dernier rempart » pour préserver les droits des personnes inaptes sous tutelle privée. « Un mandat aussi crucial ne saurait s’exercer sans porter un regard attentif et humain à la condition des personnes sous protection », a-t-il déclaré.

L’enquête de M. Dowd et de son équipe s’est amorcée en 2021. Après avoir demandé au Curateur public de recenser les dossiers comportant des abus financiers du 4 octobre 2017 au 30 avril 2021. Le Protecteur du citoyen a fait une analyse détaillée de 36 des 163 cas répertoriés.

« Des dossiers de protection privés ont échappé à la vigilance du Curateur public au cours des dernières années », peut-on lire dans le document. Ces manquements ont pu pénaliser des personnes vulnérables représentées par un tuteur privé, a ajouté Marc-André Dowd. D’autant que la situation financière de ces personnes inaptes est souvent déjà très précaire, a-t-il soutenu.

Au fil de son enquête, le Protecteur du citoyen a constaté que les pratiques de travail au sein de l’organisme gouvernemental peuvent varier selon les agents responsables des dossiers. « Cela donne alors lieu à des disparités de traitement au moment, par exemple, de décider si un dossier sera suivi plus étroitement, si des pièces justificatives seront réclamées ou si des mesures seront prises à l’égard d’un tuteur. »

Agir plus vite

Parmi les 17 recommandations formulées, le rapport invite, entre autres, l’organisme gouvernemental à agir plus vite dès qu’une situation irrégulière est détectée. Selon M. Dowd et son équipe, le Curateur public doit aussi accroître l’efficacité de ses moyens de détection des comptes problématiques.

Le Protecteur du citoyen souligne les améliorations faites par l’organisme qui veille à la protection des personnes inaptes, afin de mieux surveiller les tutelles privées. Malgré un « un resserrement des pratiques », il reste toutefois encore du chemin à faire, estime-t-il.

Dans une déclaration transmise au Devoir, le Curateur public affirme qu’il donnera suite aux recommandations du rapport. Il souligne d’ailleurs avoir entamé une refonte de ses services afin de mieux les adapter à la clientèle et d’offrir un meilleur accompagnement aux tuteurs, indique Nathalie Gilbert, coordonnatrice des relations publiques et médiatiques.

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