Nourrir les cerfs de Virginie est maintenant interdit neuf mois par année

Il sera désormais proscrit de nourrir un chevreuil à l’extérieur des périodes de chasse, et ce, partout au Québec.
Le gouvernement de François Legault interdira cette pratique par le biais d’un règlement qui entrera en vigueur jeudi. Il prévoit l’imposition d’amendes d’au moins 1000 $ et d’au plus 5000 $ à quiconque donnerait à manger à un cerf de Virginie entre le 1er décembre et le 31 août, sauf sur l’île d’Anticosti.
L’objectif : limiter « plusieurs problématiques bien documentées pour l’espèce, comme des problèmes de santé et de mortalité liée à une nourriture inappropriée », ou la « rétention des cerfs dans des milieux moins favorables à leur survie », a indiqué le ministère de l’Environnement par communiqué de presse mercredi.
Plusieurs municipalités, dont Longueuil et Boucherville, proscrivent déjà le nourrissage de ces cervidés. Québec souhaite étendre ce type de réglementation à l’ensemble du territoire.
« On a une problématique en milieu urbain. […] Dans ma région, à Blainville, je pourrais vous en parler aussi », a affirmé mercredi le ministre de l’Environnement Benoit Charette, à la sortie d’une séance du Conseil des ministres. « Les gens, souvent, ont voulu bien faire, ont développé une habitude de nourrir les cerfs, mais ça les limite dans un habitat qui est loin d’être naturel. »
À Boucherville, par exemple, des cerfs de Virginie ont débordé du parc national des Îles-de-Boucherville et gambadent désormais dans les rues résidentielles du secteur. Malgré un règlement municipal l’interdisant, certains résidents s’adonnent à les nourrir.
À Longueuil, la prolifération des chevreuils dans le parc Michel-Chartrand a forcé la Ville à envisager d’abattre une centaine de bêtes. Puis, dans une décision, la Cour d’appel a demandé la suspension de cette opération en attendant que la Cour supérieure du Québec porte un jugement sur le fond de l’affaire.
Pas davantage d’inspecteurs
En édictant son nouveau règlement, Benoit Charette entend tuer le problème dans l’oeuf. « C’est une solution parmi d’autres. Éventuellement, il faudra s’attaquer à la surpopulation elle-même, mais pour éviter que cette surpopulation-là se développe […], c’est une mesure qui devient nécessaire », a-t-il dit mercredi.
L’application du règlement ne passera pas par une surveillance accrue, mais par le « signalement », a indiqué M. Charette. « On comprend qu’il n’y a pas des inspecteurs partout », a reconnu l’élu de la Coalition avenir Québec.
« Il faut dire aux gens qui pensent bien faire en les nourrissant que ce n’est pas à l’avantage des cerfs », a-t-il ajouté.
Joint par Le Devoir, le directeur général de la Société pour la nature et les parcs du Québec, Alain Branchaud, a salué le geste du ministre, qui permettra selon lui d’instaurer « une nouvelle approche dans la gestion des populations de cerfs de Virginie ». « L’application du règlement pourrait toutefois poser quelques défis, notamment sur la façon de déterminer quelle espèce animale est ciblée par une personne qui offre de la nourriture. »
« S’attaquer à la surpopulation »
L’interdiction de nourrir les chevreuils n’est qu’un premier pas, selon Benoit Charette. Il faudra en temps et lieu endiguer la surpopulation en permettant la chasse dans certains parcs de la Société des établissements de plein air du Québec (SEPAQ) où le problème sévit. « Il y a des bonifications réglementaires qui vont intervenir au cours des prochains mois », a dit le ministre de l’Environnement.
Au parc national des Îles-de-Boucherville, la surpopulation provoque chaque hiver des morts, et cet hiver n’a pas fait exception. La SEPAQ n’est toutefois pas en mesure de documenter l’ampleur du phénomène. « Nous ne comptabilisons pas ces mortalités », indique-t-on dans une réponse écrite. On assure toutefois qu’un « plan » d’intervention sera mis en oeuvre d’ici la fin de l’année « afin de protéger le milieu naturel des impacts de la surabondance de cerfs de Virginie ».
Selon des informations obtenues depuis lundi, plusieurs décès de cerf ont été comptabilisés en mars à Longueuil et à Boucherville.
Avec Alexandre Shields