QS veut voir les animaux de compagnie autorisés dans tous les logements
Québec solidaire (QS) déposera d’ici la mi-juin un projet de loi qui empêcherait toute interdiction de la présence d’animaux de compagnie dans les logements locatifs. Une proposition à laquelle s’oppose farouchement une association de propriétaires, la CORPIQ.
« Permettre aux gens d’avoir un animal de compagnie dans leur logement, c’est une manière simple d’enlever de la pression sur les locataires, au moment où l’on vit une crise du logement sans précédent », a relevé jeudi la co-porte-parole de Québec solidaire, Manon Massé, lors d’un point de presse tenu dans le bureau de circonscription de son collègue Andrés Fontecilla.
Québec solidaire déposera un projet de loi d'ici l'été pour permettre les animaux de compagnie dans tous les logements locatifs de la province. #polqc pic.twitter.com/GMfOvZ8NEH
— Zacharie Goudreault (@zac_goudreault) March 2, 2023
Actuellement, un propriétaire peut inscrire dans un bail une interdiction de posséder des animaux de compagnie. Dans un contexte de pénurie de logements, cette situation a pour effet de limiter considérablement les options qui s’offrent à des milliers de locataires en quête d’un toit, en particulier quand leurs revenus sont limités. « En ce moment, on est en pleine crise de santé mentale, en pleine crise du logement, et il faut qu’on se donne les moyens de permettre aux locataires du Québec de garder leurs animaux de compagnie, parce que ça leur fait du bien », a souligné Manon Massé.
Selon la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ), 25 % des propriétaires de logements locatifs tolèrent les animaux de compagnie sans conditions, et 65 % les autorisent en imposant certaines restrictions (en n’acceptant que les chats, par exemple). La SPCA a pour sa part affirmé ces dernières années qu’à peine plus de 4 % des propriétaires acceptaient les chiens dans leurs logements.
« C’est déjà assez difficile de se trouver un logement abordable en ce moment, en pleine crise. Mais en trouver un quand on a un animal de compagnie, c’est devenu pratiquement impossible », a ainsi souligné M. Fontecilla, qui est porte-parole de QS en matière d’habitation.
Modification au Code civil
Le parti d’opposition à l’Assemblée nationale entend ainsi déposer d’ici la fin de la session parlementaire un projet de loi autorisant la présence d’animaux de compagnie dans tous les logements du Québec. Concrètement, la formation propose de modifier l’article 1900 du Code civil du Québec afin de préciser que les propriétaires ne peuvent insérer dans leurs baux une clause interdisant la présence d’animaux de compagnie.
La proposition n’est pas inédite. L’Ontario a rendu illégales de telles clauses dans les années 1990, tandis qu’une mesure semblable a été adoptée en France dans les années 1970. « Il est temps que Québec emboîte le pas », a ainsi fait valoir Manon Massé.
L’annonce a d’ailleurs eu lieu en présence de deux chiens de compagnie et de la directrice générale de la SPCA de Montréal, Sophie Gaillard, qui appuie l’initiative. Année après année, des milliers d’animaux de compagnie sont abandonnés dans des refuges en marge de la période des déménagements — une situation qui n’est pas étrangère à la difficulté qu’éprouvent de nombreuses personnes à trouver un appartement qui les accepte, a souligné Mme Gaillard.
À la SPCA de Montréal, « c’est environ un animal par jour qui est abandonné dans le contexte d’un déménagement », a-t-elle relevé. « C’est encore plus dramatique quand on sait que ces animaux sont abandonnés parce que les gens n’ont d’autre choix que de les abandonner », a enchaîné Andrés Fontecilla.
La SPCA de Montréal avait d’ailleurs recueilli l’an dernier 33 000 signatures dans le cadre d’une pétition soumise à l’Assemblée nationale qui lui demandait de mettre fin à la possibilité d’interdire les animaux de compagnie dans les logements.
De l’opposition chez les propriétaires
Appelé à réagir, le porte-parole de la CORPIQ, Marc-André Plante, s’est pour sa part opposé avec véhémence à la proposition de QS. « Ça n’a pas de sens, des propositions de même », a lancé M. Plante jeudi en entrevue au Devoir.
Le porte-parole estime que cette proposition ne tient pas compte du fait que de nombreux logements ne sont pas bien insonorisés et que la présence d’animaux peut incommoder le voisinage.
Un tel projet de loi, s’il est adopté, viendrait aussi alourdir le fardeau des propriétaires, qui devront aller se battre devant le Tribunal administratif du logement si des animaux endommagent les logements, soutient-il. « Ça ne tiendra pas la route, les propriétaires vont s’y opposer coûte que coûte. »
Or, « les propriétaires ont déjà tous les recours nécessaires si jamais il y a des problèmes par rapport à la présence d’animaux » dans leurs logements, réplique le porte-parole du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, Martin Blanchard. D’autant plus, avance-t-il, que « l’immense majorité » des locataires qui ont des animaux de compagnie « ne posent pas problème ».
Joint par Le Devoir, le cabinet de la ministre responsable de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, a indiqué que son adjointe parlementaire, Chantale Jeannotte, « s’est fait confier le mandat de rencontrer divers groupes et experts ayant un intérêt pour le marché locatif afin d’effectuer des recommandations qui permettront d’apporter des solutions aux enjeux du logement locatif dans le contexte actuel ». « La question des animaux dans les logements en fait partie », a-t-on confirmé.
Mme Jeannotte, qui est députée de Labelle, rencontrera d’ailleurs les représentants de la SPCA à ce sujet la semaine prochaine, a indiqué le cabinet de Mme Duranceau.