Legault ouvert à acheter la paix avec Terre-Neuve pour Churchill Falls

Le premier ministre François Legault n’exclut pas de concéder certains avantages financiers à Terre-Neuve-et-Labrador concernant les dispositions actuelles de l’entente d’approvisionnement en électricité de la centrale de Churchill Falls, qui arrivera à échéance en 2041.
M. Legault a souligné mercredi que les tribunaux ont maintenu l’intégrité du contrat en cours, à la suite de contestations du gouvernement de St. John’s.
« On a gagné en cour, donc de ce côté-là, c’est clair, a-t-il dit dans une mêlée de presse. Est-ce qu’il y a des aménagements à faire d’ici 2041 pour, dans la balance, dire : il y en a pour Terre-Neuve ? Il faut que ce soit gagnant-gagnant. »
À la veille de son départ sur l’île, où il amorcera les négociations avec son homologue, Andrew Furey, M. Legault n’a pas exclu certains aménagements pour améliorer la situation actuelle.
« Ça va dépendre du prix qu’il nous offre à partir de 2041, a-t-il expliqué. Mais s’il nous offre un prix très avantageux à partir de 2041, est-ce qu’on est prêt à verser des montants avant 2041 ? Ça va faire partie de ce qui va être demandé probablement. Mais il est trop tôt pour répondre à la question. »
Avant de prendre le chemin pour Terre-Neuve, où il séjournera jusqu’à vendredi, M. Legault a voulu diminuer les attentes.
« Ce ne sera pas facile, la négociation, on sait que le Québec a un contrat très avantageux jusqu’en 2041 », a-t-il précisé.
Depuis 1969, Hydro-Québec achète la quasi-totalité de l’énergie produite par la centrale de Churchill Falls, d’une puissance nominale de plus de 5400 mégawatts, à 0,2 ¢ par kilowattheure (kWh).
M. Legault a affirmé que malgré l’échéance qui peut sembler lointaine, il faut commencer les négociations maintenant pour savoir si le Québec pourra continuer de compter sur cet important approvisionnement ou si de nouveaux barrages sont nécessaires.
« Construire un barrage, si on inclut les négociations avec les communautés autochtones, en moyenne au Québec, ça a toujours pris entre 12 et 15 ans. Donc en faisant un petit calcul, on se rapproche des 15 ans dans le mandat qui s’en vient. »
M. Legault a indiqué que l’issue des négociations, qui pourraient inclure le développement conjoint d’une nouvelle centrale au Labrador, sera déterminante pour savoir si Hydro-Québec aura toujours les moyens d’exporter davantage.
« On travaille avec Hydro-Québec pour voir quelle est la capacité qu’on est capable d’ajouter, a-t-il expliqué. Mais il faut savoir ce qui s’en vient du côté de Churchill Falls, et éventuellement de Gull Island [un projet de barrage]. »
À Montréal, où elle dévoilait les résultats d’Hydro-Québec, la présidente-directrice générale, Sophie Brochu, a souligné que Churchill Falls procure à la société d’État le tiers de ses profits.
« Il y a une chose qui est certaine, c’est que ça va coûter beaucoup plus cher », a-t-elle dit en parlant du renouvellement du contrat.
Nouvelles bases
Le chef libéral intérimaire, Marc Tanguay, a affirmé qu’il serait justifié de faire des concessions avant 2041 si cela permet de faire des gains au-delà de cette date butoir.
« Je pense que le fait de dire : on a une entente qui est déjà signée jusqu’en 2041, on est prêts à ouvrir cette entente-là pour aller au-delà de 2041 sur de nouvelles bases, je pense, c’est l’approche à avoir », a-t-il dit.
Quant à l’avenir des exportations d’électricité, M. Tanguay s’est fait prudent. Il a rappelé que les besoins en énergie d’ici 2050 nécessitent déjà un ajout de plus de 100 TWh à la capacité d’Hydro-Québec, qui est actuellement de 200 TWh.
« Je pense que, jusqu’à nouvel ordre, il est important de voir comment, pour nos besoins à nous, on va aller chercher ça avant de signer d’autres ententes », a-t-il affirmé.
Le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a souligné que l’apport de Churchill Falls est important pour la transition énergétique.
« Ce serait un recul que de perdre cet apport énergétique, a-t-il dit. C’est pour ça qu’on s’attend à une entente qui soit satisfaisante pour les Québécois. »
Le député péquiste Pascal Bérubé a pour sa part suggéré au gouvernement d’explorer la possibilité d’un partenariat par lequel le Québec posséderait des actifs de production d’énergie à Terre-Neuve.
Avec Jean-Louis Bordeleau