Le ministre Boulet interpellé sur «l’explosion incontrôlée» du travail des jeunes
L’« explosion complètement incontrôlée » du travail chez les jeunes de première et de deuxième secondaire inquiète le député solidaire Alexandre Leduc. Ce dernier a sommé le ministre du Travail Jean Boulet de ne pas accorder d’exemption aux domaines de la restauration et du commerce de détail dans son futur projet de loi sur le travail des enfants.
« Est-ce que le ministre est d’accord pour dire qu’en bas de 14 ans, la job de nos enfants est sur les bancs d’école, et pas au McDo ? » a demandé M. Leduc durant la période des questions à l’Assemblée nationale.
L’élu de Québec solidaire a brandi une étude qui a été menée auprès d’environ 18 000 Québécois de 12 à 25 ans et qui a fait l’objet d’un article du Devoir mercredi dernier. En janvier 2023, 54 % des répondants de première secondaire ont affirmé travailler, par rapport à 13 % en janvier 2022.
La place des enfants est à l’école, a dit M. Boulet en chambre. « On doit s’assurer de protéger la santé et la sécurité de nos enfants et permettre que leur parcours académique ne soit pas affecté », a-t-il ajouté, en soulignant la hausse des accidents de travail chez les jeunes.
Le ministre doit déposer un projet de loi sous peu afin de mieux encadrer le travail des enfants. La recommandation des syndicats et des associations patronales est de fixer à 14 ans l’âge minimal pour travailler.
QS craint toutefois que la restauration et le commerce de détail n’obtiennent une exemption. La semaine dernière, le co-porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, avait brandi un mandat de lobbyisme de l’Association Restauration Québec (ARQ) dont l’objectif est « d’empêcher l’ajout d’un âge minimum pour avoir accès au marché du travail ». Questionné sur la possibilité que le projet de loi inclue une exception pour ces domaines, Jean Boulet n’avait pas fourni de réponse claire. Il avait toutefois affirmé à La Presse canadienne ne pas avoir vu « de lobby intensif » de la part des restaurateurs.
Au Salon bleu jeudi, il a souligné que les lobbyistes font partie d’associations « qui ont le droit d’exprimer leurs opinions ». « On les écoute, on fait des consultations », a-t-il fait valoir.
L’industrie de la restauration appuie un encadrement plus sévère du travail des jeunes, comme un nombre maximal d’heures par semaine, indique Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l’ARQ, « mais on ne veut pas tomber avec un âge minimum qui serait la principale mesure ».
Ce sont les jeunes eux-mêmes qui viennent déposer leur candidature, soutient-il. « Avec la pénurie de main-d’oeuvre, quand on a des gens qui veulent travailler, on les prend. Mais on ne les prend pas de la même façon qu’un jeune de 22 ans. On s’entend que l’école reste la priorité. »
La conciliation travail-études choque QS
Le concept de conciliation travail-études évoqué dans l’article publié mercredi dans Le Devoir a « coupé le souffle » à Alexandre Leduc, a-t-il relaté. « A-t-on tellement perdu la tête avec la pénurie de main-d’oeuvre qu’on est rendu à trouver ça normal la conciliation travail-études pour les enfants du premier cycle du secondaire ? » s’est indigné le député d’Hochelaga-Maisonneuve.
Les jeunes sondés lors de la recherche ont dit travailler dans le but de faire des économies et de se procurer les biens qu’ils souhaitent. La Dre Mélissa Généreux, responsable de l’enquête et médecin-conseil à la Santé publique de l’Estrie, craint toutefois que le travail ne serve à combler un « vide dans la vie familiale ou la vie avec les amis, qui n’est pas au top ».
M. Leduc estime que cette piste serait à explorer en commission parlementaire. Le haut taux d’anxiété rapporté chez les filles au secondaire et aux cycles supérieurs l’inquiète également. « Il y a un cri d’alarme qui est lancé ici », a-t-il clamé au sujet des résultats de l’étude.
Avec Jean-Louis Bordeleau et La Presse canadienne