Fitzgibbon n’exaucera pas tous les voeux des entreprises en matière d’hydroélectricité

Pierre Fitzgibbon assure qu’il sera « parcimonieux » dans l’octroi d’électricité aux entreprises souhaitant s’alimenter sur le réseau d’Hydro-Québec. Sur les 23 000 mégawatts (MW) de demande en hydroélectricité, 10 000 au plus seront accordés, a-t-il affirmé mardi alors même qu’un autre haut placé de la société d’État quittait son poste.
Interrogé en matinée à l’entrée d’une commission parlementaire, le ministre de l’Économie et de l’Énergie s’est de nouveau engagé à ne pas « vendre l’électricité à rabais ». Dans un mémoire déposé mardi matin en commission parlementaire, Hydro-Québec chiffrait les demandes en alimentation du privé à 23 000 MW, ce qui demanderait théoriquement l’ajout de 13 complexes de la Romaine.
« Le 23 000, faut qu’on s’entende, il y a plusieurs choses là-dedans. Par exemple, il y a une demande en hydrogène vert de 9000 MW. Ça n’arrivera pas, a précisé M. Fitzgibbon en mêlée de presse. C’est un peu la liste des cadeaux de Noël. »
Selon le ministre de l’Énergie, cette liste peut comporter des « dédoublements ». « Je pense qu’on va finir, probablement, à 8000, 10 000 MW », a-t-il indiqué.
Hydro-Québec a tous les moyens d’augmenter sa capacité pour remplir ces besoins, selon M. Fitzgibbon. « Premièrement, Hydro-Québec a déjà [prévu] augmenter l’offre. Deuxièmement, l’éolien, on peut en faire beaucoup. »
Vendredi dernier, lors du caucus présessionnel de la Coalition avenir Québec, il avait de nouveau plaidé pour la « sobriété énergétique », mais le premier ministre François Legault avait exclu de l’inscrire dans une loi. La société d’État entend quant à elle faire des économies d’énergie de 8 térawattheures d’ici 2029 en « intensifi[ant] ses efforts en efficacité énergétique ».
« La meilleure manière de limiter les infrastructures, c’est d’avoir la consommation la plus efficace possible », a soutenu en commission parlementaire le vice-président à la planification intégrée des besoins énergétiques et des risques d’Hydro-Québec, Dave Rhéaume.
Ce dernier participait mardi à l’étude du projet de loi 2 « visant notamment à plafonner le taux d’indexation des prix des tarifs domestiques de distribution d’Hydro-Québec et à accroître l’encadrement de l’obligation de distribuer de l’électricité ». Le texte législatif prévoit notamment de permettre au ministre de l’Énergie de choisir les projets qui bénéficieront de l’hydroélectricité québécoise.
Nouvelle démission
Alors même que les travaux de commission se déroulaient, mardi, le vice-président exécutif d’Hydro-Québec, Éric Filion, a annoncé son départ de la société d’État. Une nouvelle confirmée quelques minutes plus tard par la vice‑présidente au développement durable, aux relations avec les communautés et aux communications, Julie Boucher, puis par un communiqué de presse. « Il nous a dit qu’il avait de nouveaux défis professionnels, que ça fait sept ans qu’il travaille chez Hydro-Québec et qu’il choisit de relever ces nouveaux défis-là », a-t-elle soutenu devant la presse parlementaire.
M. Filion a trouvé un autre emploi, il va vous dire où il va aller. [...] Ça n’a rien à voir avec le gouvernement ou avec le départ de Mme Brochu.
L’annonce du départ de M. Filion survient une vingtaine de jours à peine après celle de la démission à venir de la présidente-directrice générale d’Hydro-Québec, Sophie Brochu. La présidente du conseil d’administration, Jacynthe Côté, quittera aussi ses fonctions prochainement.
M. Fitzgibbon a affirmé que la démission de M. Filion, dont le nom avait circulé parmi les successeurs potentiels de Mme Brochu, n’avait rien à voir avec ces départs ni avec les orientations données par le gouvernement à la société d’État.
« M. Filion a trouvé un autre emploi, il va vous dire où il va aller, a-t-il dit. Les gens pourront conclure. Ça n’a rien à voir avec le gouvernement ou avec le départ de Mme Brochu. »
« Je trouve que ça brasse pas mal à Hydro-Québec », a lancé mardi le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay, lorsqu’interrogé sur cette nouvelle démission. « Il y a anguille sous roche », a ajouté le co-porte-parole solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois.
« [Hydro-Québec] est fragilisée, a souligné le député péquiste Pascal Bérubé mardi. Mais là, la nomination [d’un nouveau p.-d.g.] ne devrait pas tarder, j’imagine. » Marc Tanguay plaide pour un nouveau titulaire du poste qui aura « les coudées franches ». « On va souhaiter que la personne qui sera nommée à la tête d’Hydro-Québec aura toute l’indépendance… évidemment, la qualification, les qualités requises, [mais] l’indépendance », a-t-il dit.
En chambre, M. Legault a affirmé que le processus de sélection d’un remplaçant à Mme Brochu était enclenché. Il espère annoncer une nomination en avril.
Avec Alexandre Robillard