Roberge «passe à l’offensive» pour le français

Le gouvernement Legault est prêt à « prendre tous les moyens nécessaires pour ralentir, arrêter, puis inverser le déclin de la langue française » — sauf celui d’élargir la portée de la loi 101 au réseau collégial —, a indiqué le ministre Jean-François Roberge après avoir annoncé la création du Groupe d’action pour l’avenir de la langue française (GAALF) vendredi.
Le GAALF, dont les travaux seront dirigés par six ministres — soit Jean-François Roberge (Langue française), Christine Fréchette (Immigration), Bernard Drainville (Éducation), Pascale Déry (Enseignement supérieur), Mathieu Lacombe (Culture et Communications) et Martine Biron (Relations internationales) —, établira un « ambitieux Plan d’action gouvernemental pour l’avenir de la langue française » non sans avoir préalablement consulté des « experts » et des « acteurs de la société ». « Aujourd’hui, on arrête d’essayer d’exister. On passe à l’offensive pour regagner ce qu’on a perdu au fil des dernières années », a déclaré M. Roberge en marge du caucus présessionnel des élus caquistes à Laval, vendredi.
La Charte de la langue française pourra de nouveau se retrouver sous le bistouri des élus de l’Assemblée nationale, qui ont adopté la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français (loi 96) pas plus tard qu’en mai 2022.
Une nouvelle « grande offensive » gouvernementale est nécessaire en raison du portrait de la situation linguistique esquissé par Statistique Canada en août 2022, qui a entraîné une « prise de conscience » au sein de la Coalition avenir Québec, a mentionné M. Roberge, tout en pointant des données sur la langue à la maison, la langue au travail ainsi que la langue de consommation de produits culturels.
« La situation du français est inquiétante. Les statistiques sont sans équivoque : notre langue perd du terrain, souvent au profit de l’anglais », a déclaré le ministre de la Langue française, avant d’ajouter : « On est, les Québécois, à la croisée des chemins. De toute urgence, il faut améliorer considérablement la qualité et la maîtrise du français et, de toute urgence, il faut assurer sa vitalité dans toutes les sphères de la société. »
Les membres du GAALF auront pour « mission […] de trouver des idées ensemble, en équipe, des solutions, des mesures concrètes qu’on pourra, chacun dans nos ministères, implanter par la suite » pour favoriser la « relance de la langue française », a précisé M. Roberge lors d’un point de presse. « On va avoir bien sûr de l’ouverture, de l’écoute, mais vous me connaissez, beaucoup d’énergie, de rigueur », a ajouté l’élu caquiste, rappelant appartenir à « une formation politique qui est pragmatique ».
Le gouvernement québécois est déjà persuadé qu’il ne pourra faire autrement que d’accroître la proportion d’immigrants francophones, bonifier l’offre et la consommation de produits culturels « francophones et québécois », et renforcer la maîtrise de la langue française par les jeunes et les moins jeunes, a-t-il illustré.
Pas question toutefois d’élargir la portée de la Charte de la langue française à l’enseignement collégial, ce qui aurait pour effet de permettre seulement aux ayants droit, soit les enfants dont le père ou la mère a reçu un enseignement primaire en anglais au Canada, de fréquenter un cégep anglophone. « C’est une question qui a déjà été traitée préalablement. On n’a pas l’intention de changer ce qu’on a fait », a indiqué le ministre.
Le rapport du GAALF sera dévoilé d’ici la fin de l’année, a promis le ministre.
Entre-temps, le gouvernement québécois lancera une « campagne publicitaire d’une grande envergure » dotée de « budgets conséquents » par laquelle il veut atteindre « tous les Québécois », peu importe leur âge, leur langue et leur lieu de domicile. « Il faut que tout le monde prenne conscience de la situation actuelle de la langue française, que tout le monde choisisse de vivre, de consommer, de travailler en français », a fait valoir M. Roberge, qui a récemment fait son entrée sur le réseau social TikTok.
Le succès du Plan d’action gouvernemental pour l’avenir de la langue française dépendra de l’adhésion de la population. « Vraiment, pour que ça fonctionne, il faudra que tous les Québécois s’y mettent : les francophones, les allophones, les anglophones. Tout le monde doit poser des gestes pour assurer la pérennité de notre belle langue », a soutenu M. Roberge, tout en précisant que des inspecteurs ne seront pas déployés dans les maisons des Québécois afin de voir s’ils « tartinent » leur pain ou « brossent leurs dents » en français.