Marc Tanguay dans l’ombre de la course à la chefferie du PLQ
À vos marques, prêts… Alors même que leurs collègues nommaient le député de LaFontaine, Marc Tanguay, comme chef intérimaire du Parti libéral du Québec (PLQ), deux députés de la formation ont admis jeudi qu’ils réfléchissaient à se lancer dans la course au leadership permanent.
Trois jours après le départ de Dominique Anglade, le rôle de chef permanent du PLQ est venu porter ombrage à la nomination de M. Tanguay à la direction par intérim de l’opposition officielle. Accostés à l’entrée de leur réunion de caucus, les élus André Fortin et Monsef Derraji ont tous deux laissé la porte grande ouverte à une candidature à la chefferie permanente.
« Je ne suis pas venu ici ce matin pour fermer la porte [à une course à la direction] », a lancé M. Fortin lorsqu’interrogé sur ses intentions de se lancer. « J’y réfléchis », a dit M. Derraji en anglais.
Marc Tanguay assurera l’intérim d’ici le choix d’un nouveau leader, ce qui lui permettra notamment de questionner le premier ministre en période des questions au Salon bleu, mais l’engagera aussi à fixer les priorités de son caucus. L’élu, qui avait accepté le poste de leader parlementaire sous la chefferie de Mme Anglade, aura aussi à régler les différends entre le parti et la députée de Vaudreuil, Marie-Claude Nichols, toujours indépendante après son exclusion survenue à la fin du mois d’octobre.
Moi, j’ai l’intention de contacter Marie-Claude Nichols rapidement pour aller m’asseoir avec elle puis avoir une bonne discussion
Jeudi, M. Tanguay s’est engagé à aller « prendre un café » avec elle pour tenter de la rapatrier. Le mois dernier, Mme Nichols s’était vue écartée du caucus après avoir refusé des responsabilités au sein du nouveau cabinet fantôme libéral. La décision, prise par Dominique Anglade et son président de caucus, Enrico Ciccone, avait soulevé les passions de plusieurs ex-députés et militants.
Dans la foulée, Mme Anglade a convenu être allée « trop loin ». Mais il était trop tard. Sous le poids de ce qu’elle a elle-même qualifié d’« intrigues internes », l’ex-cheffe a quitté son poste lundi.
Après deux semaines « rock and roll », selon Marc Tanguay, le caucus de 19 députés « travaille en toute cohésion ». Mais le nouveau chef par intérim travaillera personnellement pour qu’il atteigne un total de 20 élus. « La main est tendue. Moi, j’ai l’intention de contacter Marie-Claude Nichols rapidement pour aller m’asseoir avec elle puis avoir une bonne discussion », a-t-il dit.
« Débat d’idées »
Quant au poste de chef permanent, impossible de savoir quand il sera pourvu. En 2020, Dominique Anglade avait été couronnée cheffe après un an et demi d’intérim de Pierre Arcand. Pour la prochaine course, « les options seront ouvertes dépendamment de la volonté [des] militants », a souligné le président du PLQ, Rafael P. Ferraro, en conférence de presse jeudi.
« Il est malheureusement trop tôt pour se prononcer là-dessus, [comme] les discussions n’ont même pas encore débuté », a-t-il dit.
Déjà — quoiqu’aucune candidature n’ait été officialisée —, les intéressés se bousculent aux portes.
Aux yeux d’André Fortin, pressenti par plusieurs analystes à l’intérim, seule l’accession à la direction du PLQ permet réellement d’exprimer « des idées nouvelles, des idées audacieuses » et de « brasser le parti un peu ». Ce pour quoi il a rapidement tiré un trait sur un poste intérimaire.
« Après la campagne électorale, je n’étais pas intéressé. Il y a cinq jours, avant la démission de Dominique Anglade, je n’étais pas intéressé. Je vous avoue qu’aujourd’hui, ma réflexion n’a pas changé », a-t-il dit, avant de se lancer dans une envolée lyrique sur le rôle de chef permanent. « On a besoin de redéfinir le Parti libéral, on a besoin d’une vision, a-t-il dit. On a besoin, vraiment, d’expliquer aux Québécois qui on est et d’amener le parti ailleurs. […] Moi, j’en ai, des idées. »
Sans confirmer noir sur blanc qu’il se lancera dans une course à la chefferie au moment où elle sera déclenchée, M. Fortin a indiqué jeudi qu’il amorçait une tournée du Québec. « Je vais être à la Chambre de commerce de Maniwaki cette fin de semaine. » Seul député issu des régions dans le caucus libéral, il compte apporter une vision « unique ». Nommer un chef « qui comprend les régions, qui sait c’est quoi vivre en région » sera important, a-t-il soutenu.
Appuis
Monsef Derraji, lui, a déjà des appuis. « Il y a beaucoup de gens qui m’encouragent à aller de l’avant », a affirmé celui qui, dans le dernier mandat, occupait le rôle important de porte-parole en matière de santé du PLQ. Il souhaite un « débat d’idées » durant la course à la chefferie, mais ne s’engage pas officiellement à se lancer.
« L’exécutif du parti a entre les mains les règles de la prochaine course, une fois ces règles […] dévoilées, là, je vais dévoiler mon intérêt », a-t-il signalé.
Mis au courant des intentions de M. Fortin d’aller rencontrer les militants, M. Derraji a affirmé que, « bien entendu », lui aussi allait le faire. « Revenir à la base, c’est très important. Écouter nos militants, revenir au travail terrain », a-t-il soutenu.
L’ex-député conservateur fédéral devenu indépendant Alain Rayes a semblé fermer la porte à faire le saut au sein de la famille libérale. « Ma priorité demeure la même : terminer mon mandat en tant que député fédéral », a-t-il répondu jeudi.
Certains libéraux de la vieille garde ont contacté M. Rayes dans les derniers mois, en préparant le terrain à un départ éventuel de Mme Anglade, afin de sonder son intérêt à briguer la chefferie du PLQ. Le député de Richmond-Arthabaska, qui a des racines conservatrices et adéquistes, dit qu’il leur a rétorqué depuis le début qu’il se concentrait sur son travail d’élu fédéral.
Joël Lightbound, l’un des députés libéraux fédéraux de la région de Québec, s’est cependant montré plus intéressé. « Ce que j’ai dit, c’est que la porte n’est pas nécessairement fermée. Je dirais qu’elle est plus un peu entrouverte », a-t-il déclaré, selon le compte rendu de Radio-Canada. « Je vais voir où je peux être le plus utile. Sauf qu’en ce moment, je me sens très utile comme député de Louis-Hébert », a-t-il cependant ajouté.
Marc Tanguay non plus n’exclut rien. Les règles de la course lui permettraient d’ailleurs d’abandonner l’intérim pour assurer une campagne à la chefferie, selon le parti. « Ma réflexion n’a même pas commencé », s’est contenté de dire le nouveau chef intérimaire du PLQ, jeudi.
Avec Marie Vastel