Deux élus libéraux ciblés par des actes violents

Deux députés libéraux ont été visés par des actes violents au cours des derniers jours, à Montréal, ce qui soulève des questions sur les mesures de sécurité dont les élus et les candidats bénéficient pendant la campagne électorale en cours.
La députée de Saint-Laurent, Marwah Rizqy, est apparue ébranlée devant les médias pour témoigner de l’impact d’avoir été la cible, à partir du 19 août, de menaces de mort répétées de la part d’un individu qui a comparu vendredi dernier. Il a ensuite été remis en liberté sous conditions, après avoir été accusé de harcèlement criminel.
« Je suis une femme quand même assez forte, mais c’est la première fois que j’étais dans ma salle de bains et mes genoux ont commencé à claquer, a relaté Mme Rizqy aux journalistes, à l’occasion d’une étape de la campagne libérale en Estrie. Je me suis dit : “Non, ce n’est pas normal ce qui m’arrive.” »
L’individu a commencé par formuler ses menaces contre la députée libérale, qui en est à son huitième mois de grossesse, sur les réseaux sociaux.
Puis, la semaine dernière, il a laissé des messages menaçants sur la boîte vocale du bureau de circonscription de son collègue Enrico Ciccone, le député libéral de Marquette, qui les visaient tous les deux.
Mesures de sécurité
Le Parti libéral du Québec a révélé mercredi que le bureau de circonscription de M. Ciccone avait été la cible de vandales qui l’ont également cambriolé, la nuit dernière.
Mme Rizqy n’avait pas prévu de rendre public qu’elle avait été la cible de menaces, mais à la suite du cambriolage du bureau de son collègue et d’une agression verbale dont a été victime la vice-première ministre fédérale, Chrystia Freeland, elle a choisi d’en parler.
« Si on veut servir le peuple, on le fait de façon honnête et de bonne foi. Je donne mon 100 % et je n’ai pas besoin de menaces de mort », a-t-elle dit.
Contrainte à des rendez-vous médicaux pour sa grossesse et en pleine campagne électorale, Mme Rizqy a demandé à ce que les mesures de sécurité soient renforcées lorsque des situations comme la sienne visent des membres de la classe politique.
« Je ne peux pas commencer à me cacher, sinon je cède à la peur, je ne peux pas faire ça, a-t-elle dit. La semaine passée, mes nuits ont été très courtes. »
Elle aurait souhaité que le tribunal ordonne une évaluation psychiatrique de l’individu qui l’a menacée avant de le remettre en liberté, en attendant la suite des procédures.
« On m’a dit qu’il est pas mal obsédé par rapport à moi, il pourrait avoir des problèmes de santé mentale », a-t-elle affirmé.
Actuellement, la protection policière est réservée aux membres du Conseil des ministres et aux chefs des partis politiques.
Comparativement aux dernières campagnes, le niveau de sécurité a été augmenté cette année autour des chefs. Très visibles, plusieurs véhicules de police et des agents sont notamment présents sur le parcours de la cheffe libérale, Dominique Anglade.
Climat détérioré
En campagne électorale pour la troisième fois, Mme Rizqy constate que le climat du débat démocratique s’est détérioré avec la pandémie.
« Ce que je vois, c’est des gens qui sont décomplexés dans leur colère et qui le disent publiquement et qui n’ont aucune gêne pour utiliser des propos complètement déplacés », a-t-elle raconté.
Mme Rizqy a affirmé qu’il n’était pas encore possible de savoir s’il y a un lien entre les menaces formulées contre elles et le cambriolage du bureau de M. Ciccone.
Dans un communiqué, M. Ciccone s’est dit ébranlé par les événements survenus à son bureau.
« Je suis extrêmement peiné et inquiet, particulièrement pour mes employés et les citoyens qui nous font confiance, a-t-il déclaré. Un bureau de comté, c’est la maison des citoyens. Ce devrait être intouchable. »
Les malfaiteurs s’y sont introduits après avoir défoncé le mur mitoyen d’un commerce voisin. Ils ont causé beaucoup de dommages matériels, avant de prendre la fuite avec des ordinateurs ainsi que le serveur qui enregistre toutes les images vidéo des caméras de sécurité.
Un porte-parole de la Sûreté du Québec, Stéphane Tremblay, a déclaré que des policiers ont été mandatés pour enquêter sur une introduction par effraction dans un bureau de circonscription à Lachine.
« L’enquête est en cours, et on est en cueillette d’information, mais je n’ai rien de plus sur l’ampleur des dommages et je n’ai pas d’indication qu’il y a des suspects qui sont rencontrés en ce moment », a-t-il dit.
Réactions des chefs
Mme Anglade a estimé mercredi qu’une augmentation de la sécurité autour des députés pourrait être envisagée durant la campagne électorale.
« C’est une question qui mérite d’être soulevée dans le contexte actuel, on a vu ce qui s’est passé avec Enrico et Marwah, a-t-elle dit en point de presse. On veut s’assurer de faire une campagne électorale dans un contexte qui est sécuritaire. »
Le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, a dénoncé les actes de vandalisme perpétrés depuis le début de la campagne électorale, dont celui visant M. Ciccone.
« Peu importe le parti [visé], c’est inacceptable », a-t-il fait valoir en marge d’une annonce, à Laval.
Le co-porte-parole de Québec solidaire Gabriel Nadeau-Dubois a eu « de la peine » en prenant connaissance des actes perpétrés à l’égard de ses collègues libéraux, mercredi. « Comment ça se fait qu’on est rendus là ? » s’est-il demandé à voix haute.
À Saint-Jérôme, le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, a exprimé sa préoccupation face aux récents développements.
« Ça devrait être une source de fierté collective que notre capacité de mener cet exercice-là, sans qu’il y ait de violence, sans qu’il y ait d’intimidation, c’est une source de bonheur, de quiétude dans notre société. »
À Alma pour un rassemblement militant, le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime, a condamné « toute forme de violence ». « Ce n’est pas comme ça, au Québec, qu’on règle les conflits quand on n’est pas d’accord », a-t-il ajouté.
Avec Marco Bélair-Cirino, François Carabin, Isabelle Porter, Florence Morin-Martel et Dave Noël