Legault demande des excuses au CRTC

Lors de la campagne électorale de 2018, M. Legault s’était engagé à réduire la taille de l’État en éliminant 5000 postes dans les organismes publics, un objectif qui n’a pas été atteint.
Photo: Jacques Boissinot Archives La Presse canadienne

Lors de la campagne électorale de 2018, M. Legault s’était engagé à réduire la taille de l’État en éliminant 5000 postes dans les organismes publics, un objectif qui n’a pas été atteint.

Le premier ministre François Legault a réclamé mardi des excuses au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) après une décision blâmant Radio-Canada pour la mention en ondes du titre du livre Nègres blancs d’Amérique de Pierre Vallières.

M. Legault a commenté brièvement le verdict de l’autorité réglementaire, qui a suscité la controverse depuis sa publication la semaine dernière.

« Je pense que c’est le CRTC qui devrait s’excuser », a déclaré le premier ministre lors d’une conférence de presse à Venise-en-Québec, webdiffusée par la Coalition avenir Québec (CAQ), à l’occasion de l’annonce d’une candidature locale.

Le cabinet du premier ministre a ensuite précisé pourquoi M. Legault a réclamé ces excuses.

« Parce que selon nous, et un grand nombre de journalistes et d’ex-journalistes, cette décision du CRTC est une grave atteinte à la liberté d’expression, a répondu l’attaché de presse Ewan Sauves. La liberté de la presse est fondamentale au Québec et il est primordial de préserver l’indépendance journalistique. »

Dans une lettre obtenue par Le Devoir, la ministre québécoise de la Culture et des Communications, Nathalie Roy, a demandé mardi à son homologue fédéral Pablo Rodriguez, ministre du Patrimoine canadien, d’intervenir pour empêcher toute entrave à la liberté journalistique, à la suite de cette décision du CRTC.

« C’est une porte désormais qui s’ouvre sur une censure désincarnée de tout contexte permettant de mieux comprendre le passé, a-t-elle écrit. Il est donc de notre responsabilité collective à l’égard des générations présentes et futures de laisser libre circulation à la connaissance et aux histoires qui nous ont construites notamment dans le cadre d’émissions d’affaires publiques. »

Lundi, Mme Roy avait déjà exprimé sa solidarité avec les représentants des médias touchés par cette décision.

La semaine dernière, dans sa décision, le CRTC a demandé à Radio-Canada de s’excuser à la suite d’une plainte référant à la mention en ondes, en 2020, du « mot en n » contenu dans le titre du livre de M. Vallières. Le diffuseur public n’a pas encore réagi mais plusieurs de ses employés, actuels et passés, ainsi que des personnalités influentes du monde des médias, ont dénoncé cette atteinte à la liberté de presse.

À Québec, le chef du Parti conservateur du Québec (PCQ), Éric Duhaime, a estimé, mardi, que Radio-Canada n’a pas à s’excuser.

« Ça atteint des proportions complètement loufoques, c’est [comme le roman d’anticipation] 1984 quand on ne peut plus citer un ouvrage, a-t-il dit. Il n’y a pas de raison de s’excuser. Si quelqu’un devait s’excuser, ce sont les gens qui ont pris la décision de demander à Radio-Canada de s’excuser. »

Des candidatures à la CAQ

Mardi, M. Legault a amorcé sa journée à Repentigny, où il a annoncé que l’ex-journaliste Pascale Déry sera candidate pour la CAQ, sept ans après avoir tenté sans succès de se faire élire au fédéral sous la bannière conservatrice de Stephen Harper.

M. Legault a souligné l’expérience de Mme Déry à l’Institut économique de Montréal (IEDM).

« Ça, c’est un petit peu centre-droit ou droite, fédéraliste centre-droit », a-t-il souligné lors d’une conférence de presse qui était webdiffusée.

M. Legault a rappelé que l’objectif de l’IEDM était de proposer des solutions pour améliorer l’efficacité des ministères, organismes et sociétés d’État.

Le premier ministre a attribué à la pandémie la difficulté de son gouvernement à atteindre le même objectif. « Peut-être qu’on n’a pas mis tout le temps qu’on aurait dû mettre là-dessus, a-t-il dit. Je ne me trompe pas en disant qu’il y a encore beaucoup de travail à faire pour améliorer l’efficacité, pour enlever la bureaucratie. »

Lors de la campagne électorale de 2018, M. Legault s’était engagé à réduire la taille de l’État en éliminant 5000 postes dans les organismes publics, un objectif qui n’a pas été atteint.

Mme Déry a fait un plaidoyer nationaliste, mardi, tout en soulignant que sa nouvelle formation politique est une coalition regroupant des gens de divers horizons. Elle a référé à son collègue Bernard Drainville, ex-ministre péquiste, dont l’adhésion à la CAQ a forcé M. Legault à répéter que le projet de son parti n’est pas la souveraineté du Québec.

« Il y a des gens comme M. Drainville, comme moi, comme d’autres, et on va partager nos opinions, c’est le but, l’objectif est qu’on travaille tous ensemble », a-t-elle dit.

En après-midi, M. Legault s’est rendu à Venise-en-Québec pour annoncer la candidature de l’agricultrice et entrepreneure Audrey Bogemans, qui tentera de succéder à Claire Samson dans Iberville. Expulsée de la CAQ après un don au PCQ, Mme Samson, qui quittera la politique à la fin de son mandat, avait ensuite rejoint le parti de M. Duhaime, devenant sa première élue, en juin 2021.

Opportunisme

 

M. Duhaime a accusé Mme Déry de faire preuve d’opportunisme en choisissant la CAQ plutôt que sa formation politique.

« Je suis de ceux qui pensent que quand on défend nos convictions, on fait changer les sondages, plutôt que de se mettre en arrière de partis qui tirent dans les sondages et […] la population se rend ensuite compte que c’était pas nécessairement approprié », a-t-il dit.

M. Duhaime a dévoilé mardi le slogan de son parti, « Libres chez nous », en se défendant de toute ambiguïté sur son positionnement au sein du Canada.

« On n’est pas un parti indépendantiste, on veut rester à l’intérieur du Canada, c’est très clair au PCQ. La liberté n’est pas juste une question constitutionnelle, c’est aussi une question de comment le gouvernement traite les citoyens. Au Québec, depuis deux ans et demi, la liberté des citoyens a été brimée comme jamais. »

M. Duhaime a expliqué que son slogan référait tout de même à celui du Parti libéral du Québec, « Maîtres chez-nous », utilisé durant la campagne électorale de 1962.

« À l’époque l’idée c’était que le Québec soit plus maître chez-lui à l’intérieur du Canada, c’était le message des libéraux qui ont enclenché la Révolution tranquille. Aujourd’hui notre message c’est qu’on veut que les Québécois soient davantage libres chez-eux à l’intérieur du Québec. »

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