Une médaille de l’Assemblée nationale pour Joyce Echaquan

De l’avis de la famille Echaquan, le racisme systémique est l’un des éléments ayant contribué à la mort de la mère de famille. On voit ici le mari de Mme Echaquan, Carol Dubé, et leur fille Marie-Wassianna Echaquan Dubé un an après le décès de la femme, lors de la commémoration.
Photo: Valérian Mazataud Archives Le Devoir De l’avis de la famille Echaquan, le racisme systémique est l’un des éléments ayant contribué à la mort de la mère de famille. On voit ici le mari de Mme Echaquan, Carol Dubé, et leur fille Marie-Wassianna Echaquan Dubé un an après le décès de la femme, lors de la commémoration.

Les membres de l’Assemblée nationale ont remis mardi une médaille d’honneur à titre posthume à Joyce Echaquan. La famille de la femme atikamekw, décédée en octobre 2020 sous les insultes racistes du personnel de l’hôpital de Joliette, a tôt fait de rappeler au gouvernement que cette reconnaissance ne sera pas suffisante sans davantage de gestes concrets.

« Nous l’acceptons en rappelant que si une médaille n’est que métal, elle ne vaut rien », a fait savoir la famille de Mme Echaquan dans un communiqué diffusé en marge de la cérémonie de remise des médailles.

« Nous l’acceptons en rappelant que reconnaître le Principe de Joyce, à moitié, n’est pas suffisant. Il faut l’adopter, le faire vivre, lui donner les ressources nécessaires, afin que notre héritage soit, grâce à Joyce, une évolution sans précédent dans les relations entre allochtones et Autochtones au Québec », ont ajouté ses proches.

Après la mort de Mme Echaquan, le Conseil de la Nation Atikamekw a développé le Principe de Joyce, qui vise « à garantir à tous les Autochtones un droit d’accès équitable, sans aucune discrimination, à tous les services sociaux et de santé ». Or Québec refuse de l’adopter, puisqu’il commande d’emblée une admission du « racisme systémique », que le gouvernement de la Coalition avenir Québec ne souhaite pas reconnaître.

Pourtant, de l’avis de la famille Echaquan, le racisme systémique est l’un des éléments ayant contribué à la mort de la mère de famille, « tragique et évitable ». En cela, les conclusions des proches de la femme atikamekw rejoignent celle de la coroner chargée d’enquêter sur sa mort : en octobre 2021, Géhane Kamel a statué que « le racisme et les préjugés » auxquels Mme Echaquan a fait face à l’hôpital de Joliette « ont certainement été contributifs » au drame qui lui a coûté la vie.

D’autres personnalités honorées

Présent dans les tribunes de l’Assemblée nationale, le mari de Mme Echaquan, Carol Dubé, a été accueilli par des applaudissements de tous les élus rassemblés au Salon bleu. L’homme et certains de ses enfants se trouvaient en compagnie de la journaliste, comédienne et écrivaine Janette Bertrand, du scénariste Luc Dionne, de l’ex-député Benoît Pelletier et de Martin Lafleur, fils du défunt hockeyeur Guy Lafleur. Ils ont tous été honorés par l’Assemblée nationale pour leurs carrières et leurs engagements.

Dans le communiqué qu’elle a diffusé, la famille Echaquan a écrit qu’elle aurait « préféré ne pas être » à l’Assemblée nationale mardi. « Nous aurions évidemment préféré avoir Joyce avec nous, encore à nos côtés. Aucune médaille ne pourra jamais remplacer sa vie. Mais puisque nous y sommes, nous voulons dédier notre présence au courage des femmes atikamekw, au courage des femmes autochtones d’ici et d’ailleurs », ont-ils écrit.

Dans la foulée du décès de Joyce Echaquan, des dizaines d’Autochtones ont dénoncé les mauvais traitements qu’ils disent avoir subis dans le système de santé québécois.

La famille Echaquan a aussi dit accepter la médaille « afin que cette forme particulière de racisme [le racisme systémique] qui est présente au Québec comme ailleurs au Canada ne soit plus ignorée par les gens en position de faire changer les choses ».

À ce jour, le gouvernement Legault refuse de reconnaître l’existence du racisme systémique ailleurs que dans les pensionnats. Québec rejette aussi une recommandation de la Commission sur les relations entre les Autochtones et certains services publics (commission Viens), qui lui enjoignait de documenter les plaintes des Autochtones dans le réseau public afin de mesurer l’ampleur du phénomène de la discrimination.

La famille Echaquan conclut son communiqué en rendant hommage à Janette Bertrand, qui était assise à quelques sièges de Carol Dubé dans les tribunes de l’Assemblée nationale mardi. « Nous l’acceptons [la médaille] en espérant que la valeur de celle qu’on reçoit aujourd’hui soit un jour égale à celle que madame Bertrand a reçue en même temps, c’est-à-dire le symbole d’une contribution exceptionnelle à l’évolution des mentalités au Québec », ont écrit les proches de la femme atikamekw.

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