Le Québec met officiellement fin à l’exploration pétrolière et gazière

Le Québec officialise sa sortie permanente de l’exploitation et de l’exploration des hydrocarbures. Au cours des prochaines années, l’industrie aura l’obligation de nettoyer et de fermer ses puits d’exploration, en partie à la charge de l’État.
Le projet de loi 21 — à ne pas confondre avec le texte législatif qui a introduit la Loi sur la laïcité de l’État — a reçu l’appui de la majorité des membres de l’Assemblée nationale mardi après-midi. Les élus de Québec solidaire se sont abstenus lorsqu’appelés à voter, parce que « la CAQ a encore manqué de courage politique en refusant de mettre de côté toute compensation financière dans sa loi », estiment-ils. L’élue du Parti conservateur du Québec, dont le camp s’oppose pourtant au projet de loi, s’est elle aussi abstenue.
Une fois sanctionnée, la loi obligera les détenteurs de claims pétroliers en territoire québécois à faire une croix sur leurs permis. Les puits en question devront être fermés à l’intérieur d’une période de trois ans s’ils ne présentent aucun risque, ou à l’intérieur d’un an s’il y a des menaces de fuites.
Le gouvernement s’engage aussi à rembourser 75 % des frais de nettoyage et de fermeture des quelque 62 puits d’exploration actifs situés au Québec. Il promet aussi de dédommager les pétrolières qui se sont procuré un permis d’exploration après octobre 2015. Au moment de déposer son projet de loi, en février, le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, avait évalué la valeur totale de ces indemnités à environ 100 millions de dollars.
Des poursuites en vue ?
Déjà, l’Association de l’énergie du Québec fourbit ses armes juridiques. Interrogé par Le Devoir en milieu d’après-midi, son président, Éric Tétrault, a convenu qu’il évaluait la possibilité de contester la loi.
M. Tétrault a vivement critiqué le projet de loi lors de son passage en commission parlementaire. En se limitant à compenser le coût des permis, Québec se magasine une forte opposition de l’industrie, qui aurait souhaité être indemnisée pour ses revenus potentiels, dit-il. « Si on change les règles du jeu, il faut une compensation adéquate. »
Dans un courriel envoyé au Devoir en cours de soirée, M. Tétrault a évalué que les réserves de pétrole situées dans le sous-sol québécois se situaient dans une fourchette financière de « 45 à 200 milliards de dollars ». « Au moment où tous les pays sont dans une réflexion sur la production d’hydrocarbures, notamment pour fournir l’Europe, le Québec est seul sur son île », a-t-il ajouté.
À l’autre bout du spectre, Québec solidaire (QS) et plusieurs groupes environnementaux estiment qu’en l’inscrivant nettement dans sa loi, le gouvernement de François Legault aurait pu éviter de dédommager les entreprises, tout en se protégeant des litiges. « Les pétrolières et les gazières nous ont déjà siphonné des millions de dollars et le gouvernement veut leur en redonner ? En pleine crise climatique, c’est inacceptable et irresponsable », a soutenu par communiqué la co-porte-parole de QS, Manon Massé, mardi.