L’intégrité du gouvernement Charest attaquée à Québec

Jean Charest a été à la tête du gouvernement libéral de 2003 à 2012, au Québec.
Photo: Annik MH de Carufel Archives Le Devoir Jean Charest a été à la tête du gouvernement libéral de 2003 à 2012, au Québec.

Le retour potentiel de Jean Charest en politique fédérale a provoqué mardi un barrage d’allégations de corruption, de la part de partis de l’opposition et d’au moins un ministre du gouvernement, qui ont attaqué son bilan comme premier ministre du Québec.

Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a soulevé des doutes sur l’intégrité du gouvernement libéral de M. Charest, au pouvoir à Québec de 2003 à 2012.

« Les très, très, très lourds soupçons de corruption qui continuent à entourer Jean Charest devraient faire réfléchir les gens qui envisagent de voter pour lui », a-t-il déclaré lors d’un point de presse à l’Assemblée nationale.

M. Nadeau-Dubois a soutenu que le bilan de M. Charest devrait le tenir à l’écart de fonctions électives.

« L’héritage de Jean Charest, au Québec, c’est une démocratie affaiblie par la corruption, c’est un territoire ravagé, en matière d’environnement, c’est un retard historique dans notre lutte contre les changements climatiques et c’est des services publics en ruines », a-t-il dit.

Le Devoir a rapporté la semaine dernière que M. Charest réfléchissait activement à être candidat à la succession d’Erin O’Toole, qui a quitté il y a deux semaines ses fonctions de chef du Parti conservateur du Canada (PCC).

Selon les plus récentes informations disponibles mardi, M. Charest poursuit sa réflexion. Une décision de sa part est toujours possible cette semaine, a indiqué son entourage au Devoir.

Mâchurer

 

Dans un échange avec la presse parlementaire, mardi, le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a fait référence à Mâchurer, l’enquête policière de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) qui porte sur le financement du Parti libéral du Québec (PLQ). Toujours en cours en novembre dernier, elle ciblait notamment M. Charest.

« Ça parle de l’héritage que Jean Charest a laissé en termes de qualité de nos institutions, a dit le chef péquiste en regrettant qu’aucun coupable n’ait jusqu’ici été désigné clairement. On a, d’une certaine manière, normalisé la corruption en la banalisant. L’impunité en démocratie, c’est la pire chose. »

M. St-Pierre Plamondon a pris soin de ne pas désigner M. Charest comme responsable de ces dérives. Mais il a rappelé les conclusions de la commission Charbonneau, dont les travaux ont porté sur les liens entre le milieu de la construction et le financement politique.

« Clairement, le rapport de la commission Charbonneau disait que le politique était au courant et savait qu’il y avait des gains politiques, qu’il y avait des gains financiers en échange de contrats juteux, a-t-il dit. Donc, il y a une responsabilité politique des gens, à l’époque, au Parti libéral. »

M. St-Pierre Plamondon ne s’est pas prononcé sur la possible candidature de M. Charest.

« C’est un héritage qui, à mes yeux, est indéfendable, a-t-il dit. À la population de juger si c’est normal de continuer la vie politique comme si de rien n’était. »

La cheffe libérale, Dominique Anglade, s’est abstenue de tout commentaire au sujet de l’éventuelle candidature de M. Charest. Mme Anglade s’en est remise au choix des électeurs concernés.

« On n’est pas là pour évaluer le bilan de Jean Charest », a-t-elle dit en soulignant tout de même qu’il a été le premier à former un conseil des ministres paritaire.

Mme Anglade a refusé de dire si le fait d’être ciblé par une enquête policière devrait être un critère d’exclusion dans la course conservatrice.

La cheffe libérale a toutefois laissé entendre que c’était « tolérance zéro » au PLQ dans ce type de situation.

« On s’assure de regarder si la candidature correspond aux valeurs que l’on veut mettre de l’avant », a-t-elle dit.

« Pas un modèle »

Les salves contre M. Charest ne sont pas limitées à l’opposition, mardi. En se rendant au Salon bleu pour la période des questions, le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, Éric Caire, a également attaqué son bilan, jugeant qu’il a été un mauvais premier ministre.

« Je regarde l’état dans lequel se trouve le Québec, le réseau de la santé, le réseau de l’éducation, les services aux aînés, les finances, vous en voulez combien, des mauvaises raisons ? On sait qu’au niveau de l’éthique, ça n’a pas été un modèle du genre », a-t-il laissé tomber.

Ex-procureure en cheffe de la commission Charbonneau, la ministre des Affaires intergouvernementales, Sonia LeBel, a refusé de se prononcer sur la candidature éventuelle de M. Charest dans la course à la direction du PCC.

« Je pense que les gens ont écouté la commission Charbonneau, ils se feront leur propre opinion », a-t-elle déclaré.

Avant de faire le saut en politique québécoise, en 1998, M. Charest a été chef du Parti progressiste-conservateur, qui a fusionné ensuite avec l’Alliance canadienne pour donner naissance au PCC actuel.

En 2020, M. Charest avait envisagé une première fois de se lancer dans la course à la chefferie qui a mené au choix de M. O’Toole. Il avait finalement renoncé.

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