QS déplore de voir le «Canada anglais débarque[r] avec ses gros sabots» dans la contestation de la loi 21

Gabriel Nadeau-Dubois et Manon Massé déplorent de voir le « Canada anglais débarque[r] avec ses gros sabots et/ou son argent » dans la bataille contre la Loi sur la laïcité de l’État québécois.
Les porte-parole de Québec solidaire se sont opposés à l’adoption de la loi 21 en juin 2019. Néanmoins, ils désapprouvent l’appel lancé par le conseil municipal de Brampton, en Ontario, aux municipalités canadiennes de contribuer financièrement à l’effort de guerre contre la loi 21 après le retrait d’une personne tenant à porter un signe religieux de sa salle de classe d’une école primaire de Chelsea. À ce jour, Toronto a emboîté le pas à Brampton en libellant un chèque de 100 000 $ à l’ordre du Conseil national des musulmans canadiens, l’Organisation mondiale des sikhs du Canada et l’Association canadienne des libertés civiles, qui contestent notamment l’interdiction du port de signes religieux frappant des employés de l’État québécois dans la loi 21 devant les tribunaux. Calgary songe à faire de même.
« Quand le Canada anglais débarque avec ses gros sabots et/ou son argent dans un débat comme celui-là, il nuit à la qualité du débat au Québec. Il est contre-productif pour les gens de bonne volonté — des Québécois et des Québécoises à part entière — qui veulent faire valoir une conception différente de la laïcité », fait valoir M. Nadeau-Dubois, de passage dans la salle de rédaction du Devoir jeudi après-midi.
Le chef parlementaire de QS se garde toutefois d’inviter les opposants à la loi 21 à repousser l’aide financière du « Reste du Canada ». « Ce n’est pas à nous de leur dire quoi faire », soutient-il.
À l’instar des chefs du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade, et du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, les porte-parole de QS, Manon Massé et Gabriel Nadeau-Dubois, ont accepté de participer à une table éditoriale, soit un échange auquel un journaliste, un éditorialiste et un chroniqueur prennent part.
Derrière l’État de droit
Gabriel Nadeau-Dubois et Manon Massé déplorent la décision de la Commission scolaire Western Québec d’avoir offert un poste d’enseignante à Fatemeh Anvari, une femme de confession musulmane portant le hidjab, et ce, en contravention avec la loi 21, qui a été adoptée par l’Assemblée nationale il y a deux ans et demi. À leurs yeux, les « parties de l’État » comme les commissions scolaires ne peuvent « décider de ne pas appliquer les lois de l’État ». « On peut avoir une ouverture à reconnaître la légitimité de la désobéissance civile et individuelle dans certaines circonstances et être très clair sur le fait que l’État de droit ne peut pas se morceler de l’intérieur », souligne le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois et Mme Massé sont opposés à la loi 21, mais ignorent encore ce qu’ils en feront si QS se voit confier les commandes de l’État québécois au lendemain des prochaines élections générales, le 3 octobre 2022. Ils feront connaître leurs intentions au cours des prochaines semaines, assurent-ils au Devoir. « Il va avoir de la neige encore », a promis M. Nadeau-Dubois. « S’il ne mouille pas trop… » a précisé Mme Massé.
« Pacte intergénérationnel »
Le premier ministre François Legault décrit QS — et le « woke » qui dirige son action au Parlement — comme le principal adversaire de la Coalition avenir Québec.
Pourtant, à moins de 10 mois du scrutin, QS recueille l’appui d’à peine 13 % de l’électorat comparativement à 46 % pour la CAQ, 20 % pour le PLQ, 13 % pour le PQ et 5 % pour le Parti conservateur, selon la firme Léger. Si la tendance se maintient, le parti de gauche fera élire de 4 à 10 candidats, alors que la CAQ fera élire de 83 à 107 candidats le 3 octobre prochain, estime Québec 125.
« On ne se mentira pas, notre gros défi dans la prochaine année, c’est d’élargir notre coalition », dit sans détour Gabriel Nadeau-Dubois.
Pour y arriver, Manon Massé et lui misent sur une alliance entre les jeunes et les vieux autour d’une plateforme électorale affirmant haut et fort la volonté de lutter contre les changements climatiques, mais aussi d’améliorer les soins aux aînés : un « pacte intergénérationnel », en quelque sorte. « Les jeunes ne sauveront pas la planète tout seuls, puis les plus âgés ne règleront pas la question des soins aux aînés sans la solidarité des plus jeunes », soutiennent-ils, déterminés à faire « tomber les barrières entre les générations » à la faveur de la prochaine campagne électorale.
Selon « GND », les jeunes ne peuvent ignorer les défis liés au vieillissement de la population québécoise : « l’autre grand défi du Québec » après celui des changements climatiques. « Vous demandez à vos aînés d’être solidaires sur la question environnementale, fort bien. Vous avez, vous aussi, un devoir de responsabilité envers les autres générations », dit-il aux jeunes. C’est pourquoi M. Nadeau-Dubois, aspirant premier ministre, Mme Massé, aspirante vice-première ministre, répètent aux militants qu’ils croisent sur leur chemin d’« allez parler à [leurs] parents ; allez parler à [leurs] grands-parents. »
La plateforme électorale 2022 de QS sera « plus près des préoccupations quotidiennes et concrètes des gens » qu’elle l’était en 2018, mentionnent-ils, tout en précisant qu’elle renfermera un lot de « propositions ambitieuses sur la qualité de vie des familles ».
La plateforme électorale du PLQ de Dominique Anglade paraîtra à certains égards plus progressiste aux yeux de certains, promettant par exemple la construction de 200 000 logements sociaux, soit quatre fois plus que QS. Êtes-vous en train de vous faire déborder à gauche par les libéraux ? demande Le Devoir. « Si vous m’aviez posé cette question-là il y a 10 ans… je serais tombé dans les pommes », s’exclame Gabriel Nadeau-Dubois, ex-figure de proue du mouvement étudiant lors du Printemps érable de 2012.
Manon Massé « trouve ça ordinaire » de voir d’autres formations politiques s’approprier des propositions de longue date de QS après les avoir « méprisées » pendant des années. « Honnêtement, je veux juste que ça bouge », ajoute-t-elle près de huit ans après avoir fait son entrée à l’Assemblée nationale.